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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 40.1908

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Nr. 5
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Locquin, Jean: Le paysage en France au début du XVIIIe siècle et l'œuvre de J. - B. Oudry (1686-1755)
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https://doi.org/10.11588/diglit.24867#0387

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LE PAYSAGE EN FRANCE ET L’OEUVRE DE J.-B. OUDRY 355

tournois d’idées, les duels entre de prétendus « principes » ; tant pis
si la discussion s’échauffe! Ils sont réalistes par horreur de la bana-
lité ou simplement par genre, comme, il y a une vingtaine d’années,
tous nos jeunes rapins se proclamaient « impressionnistes ». L’es-
prit académique de Le Brun, avec ses excès, avait rendu inévitable
cette réaction. Mais si cette réaction jette le discrédit sur la solen-
nelle peinture d’histoire, elle ne correspond pas à une poussée sou-
dainement irrésistible du sentiment de la nature. Il y a beaucoup
de froideur, de dilettantisme et de snobisme sous ces apparences
fougueuses de novateurs.

Sauveur le Comte, les Martin, François Desportes, qui essayent
de continuer la tradition de van der Meulen, semblent obéir à une
secrète tendance de montrer à leurs contemporains qu’ils sont à la
mode du jour et qu’ils connaissent quelques tableaux de Brueghcl,
de Paul Bril, de Cuyp, de Fyt, de Snyders ou de van Goyen. Ils font
mine de combattre Poussin, parce que Poussin porte un grand nom,
mais, tandis qu'ils le combattent, ils ne sentent pas qu’au fond l’art
de Poussin les domine encore. L’autorité du maître a pu être un
instant compromise par l’exclusivisme de quelques-uns de ses plus
bruyants admirateurs. Mais combien nombreux sont, dans l’école
nouvelle, ceux à qui il a révélé la nature! Et, tous, ils redeviennent
bon gré mal gré ses humbles disciples chaque fois qu’ils n’imitent
plus servilement les « Flamands ». Débarrassés de leurs Romains en
toges, de leurs pyramides et de leurs ruines de marbre, les paysages
de Poussin —même si la couleur en est fortement altérée aujour-
d’hui — n’apparaissent-ils pas d’une conception pittoresque aussi
vraie, aussi sincère que les compositions des « flamingants » de la
lin du xvne siècle? En fait, jusqu’à Watteau, malgré la victoire des
rubénistes, si l’on découvre bien ce que nos paysagistes doivent à
Poussin, on ne voit guère ce que Poussin pourrait leur envier. Ils
font l’effet d’être désorientés, livrés à une sorte de désarroi, très
sensible, par exemple, dans l’œuvre hybride de Jean Forest. Forest
est le type de ces « flamingants » idéalistes qui s’appliquent à com-
biner les deux tendances contraires, sans d’ailleurs rien inventer,
car les Hollandais italianisants — Jean Weenix, Karel du Jardin,
Nicolas Berchem — les ont précédés dans cette voie. En somme,
entre la mort de van der Meulen et les débuts de Watteau, nos
paysagistes conservent une attitude doctrinale, ils sont encore à la
recherche d’une formule; leur principale préoccupation est de con-
cilier la manière de Rubens avec celle de Poussin.
 
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