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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 40.1908

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Nr. 5
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Hepp, Pierre: Le Salon d'Automne
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https://doi.org/10.11588/diglit.24867#0415

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LE SALON D’AUTOMNE

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sa mémoire qu’en le prenant comme poète. A ce dernier titre, il
n’est guère que l’auteur d’un copieux recueil de pièces inégales,
sans variété, de souffle court et dont la fantaisie de carnaval, quoique
séduisante, ne dépasse pas un niveau de faible altitude. A titre de
peintre, il est un remarquable inventeur, un coloriste hors ligne et
surtout un surprenant instinctif. On saisira la valeur de son instinct
en le comparant en pensée à trois peintres qu’il rappelle tour à tour :
Diaz, Ziem et Fromentin, trois intelligences insuffisamment dotées
en substance humaine. La comparaison leur est cruelle. Monticelli
les « tombe » indiscutablement. Non seulement, par ses vertus de
transposition, il échappe, à peu d’exceptions près, aux prises intellec-
tuelles du temps, mais il échappe encore à ses prises physiques par
l'inaltérabilité de sa pâte. On s’ingénierait vainement à découvrir
une craquelure dans l’effervescente matière de ses féeries, de scs
paysages, de ses natures mortes. La fraîcheur en est déconcertante
et n’a d’égale que son faste sensuel. Aujourd’hui qu’à l’instigation de
Cézanne on interroge l’énigme des vitraux, des tapisseries, des
faïences, on est mieux en mesure de comprendre Monticelli qu’au
moment où ses « pochades » sans prix lui servaient à payer ses
repas. On sait voir autre chose en lui que ihigrément d’une jolie
palette et qu’un Vénitien portatif. On salue un précurseur qui dut
attendre, pour être justement apprécié, que la suite des événements
eût placé les esprits au point de vue qui fut le sien.

Un éthéromane partageant ses loisirs entre la contemplation
des eaux-fortes de Düreretde Rembrandt et la lecture d’Hoffmann et
autres fantastiques que Gustave Doré ou Tony Johannot auraient illus-
trés, se procurerait sans doute une ivresse visionnaire analogue à
celle de Bresdin. Tenir Bresdin pour un novateur en fait d’imagerie,
serait le mal juger. Il est original par sa façon de rêver; seulement,
ne nous y trompons pas, les éléments de son rêve sont empruntés
de toutes mains. Sa création est seconde. Sa culture fond et se com-
bine dans le creuset de son imagination. Cela ne signifie pas que l’on
ait eu tort de ramener une pincée de ses cendres du fond de l’oubli
où elles séjournent. Comme Monticelli, Bresdin sera méconnu tanL que
l’on s’obstinera à ne voir en lui que le poète. C’est dans la manière
de dire, non dans ce qu’il dit, que siège l’invention de Bresdin. Là
encore il rappelle Rembrandt et Dürer, et le premier plus que le se-
cond; car jamais Dürer ne prit avec une planche les libertés que
prenait Bresdin, grisé par l’amusement du travail. On reconnaît dans
la verve, la souplesse et l’éclat de Bresdin que le sentiment de
 
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