PLANCHES XXVIF A XXXIIIe, MÉLANGES. 3o3
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mosaïques, tels que nous les montrent l'abside de Sens {Etudes XV et XVI) et les mosaïques de Cler-
mont-Ferrand (mos. e). Évidemment l'architecte commence à perdre le sentiment de sa tâche. La dis-
parition de ces réseaux fermes, larges et variés, qui, n'accordant aux accessoires qu'une place tout à fait
secondaire, ennoblissent le vitrail par le jeu même de l'ossature, annonce que la main du maître a cessé
de tenir le crayon. Le génie de la composition générale plie et recule; on voit que les travaux d'inven-
tion ont dû être distribués entre des subalternes après le premier jet, si bien que l'ordonnateur semble
avoir eu grande hâte d'abdiquer sa responsabilité en la partageant. Alors les artistes du second ordre
accaparent tout ce que laisse échapper la main nonchalante du chef, et les décorateurs s'attribuent
une importance hors de proportion. Quelques pas encore, et cette décoration de plus en plus appauvrie
achèvera entièrement de disparaître pour céder le terrain aux scènes historiques, comme à Reims
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{Etudes XVIII, XIX), à Troyes { Etude XIII), à Strasbourg {Etude XIV), etc.
Les mosaïques de Strasbourg et de Colmar (mos. g, h) trahissent, il faut l'avouer, une époque plus
avancée (et partant, une école bien moins élevée) que celle dont nous nous occupions spéciale-
ment- dans ce volume. Nous espérons néanmoins qu'on nous saura gré de les avoir fait connaître.
Elles offrent le plus riche système d'ornementation qui ait été mis en œuvre lorsque l'extrême mai-
greur des jours trop subdivisés dans les entre-meneaux rendit les médaillons impossibles. Ces longs
rubans diaprés de couleurs diverses, à la manière des plates-bandes d'un parterre consacrées à diffé-
rentes espèces de fleurs, s'associent merveilleusement avec les découpures des gigantesques fenêtrages
qui prévalurent entre le xive siècle et le xvie. Les absides devinrent d'immenses corbeilles de fleurs
d'où descendirent ces fraîches guirlandes que les siècles ne devaient point faner.
Au milieu de ces fleurs aériennes s'élancèrent les édicules fantastiques aux délicats supports, aux dais
ouvragés, aux pignons en dentelles, aux mille clochetons dorés couronnant les images des élus; sem-
blables à ces autres édifices que l'orfèvrerie construisait en argent et en or, et faisait étinceler de
pierreries au-dessus des saintes reliques. Notre Etude XII (fig. c, e) ne donne qu'un aperçu de cette
magnificence un peu coquette, mais souverainement gracieuse. Bourges nous en offrira de nombreux
exemples s'il nous est donné de conduire jusqu'à sa fin la monographie dont nous achevons en ce
moment le premier volume.
Au point où nous sommes actuellement parvenus, nous pouvons du moins nous rendre le témoi-
gnage d'avoir traité avec quelque honneur une noble et grande époque qui le méritait, sans contredit,
et qui avait déjà trop attendu cette tardive justice. Si nous ne nous abusons, il y aura dans tous ces
éléments réunis plus d'une leçon dont on n'avait pas assez soupçonné l'importance. L'avenir y pourra
trouver de quoi s'enrichir; et ne fût-ce que cela, nous aurons contribué à l'appréciation d'un passé
où dormaient de vieilles gloires, qu'il ne fallait pas laisser ensevelies plus longtemps dans un si pro-
fond sommeil.
« Exposui sicut potui ; nec ignoro quod non omnibus place-
bit; .... Ubi autem dixi quod a Patribus accepi, dum sic
absit typhus prœsumptionis ut non desit fructus devotionis,
patienter audiam de superfluitate causantes. »
Bernard., Excus. post Homil. sup. Missus est
(t.I,755).
FIN.
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mosaïques, tels que nous les montrent l'abside de Sens {Etudes XV et XVI) et les mosaïques de Cler-
mont-Ferrand (mos. e). Évidemment l'architecte commence à perdre le sentiment de sa tâche. La dis-
parition de ces réseaux fermes, larges et variés, qui, n'accordant aux accessoires qu'une place tout à fait
secondaire, ennoblissent le vitrail par le jeu même de l'ossature, annonce que la main du maître a cessé
de tenir le crayon. Le génie de la composition générale plie et recule; on voit que les travaux d'inven-
tion ont dû être distribués entre des subalternes après le premier jet, si bien que l'ordonnateur semble
avoir eu grande hâte d'abdiquer sa responsabilité en la partageant. Alors les artistes du second ordre
accaparent tout ce que laisse échapper la main nonchalante du chef, et les décorateurs s'attribuent
une importance hors de proportion. Quelques pas encore, et cette décoration de plus en plus appauvrie
achèvera entièrement de disparaître pour céder le terrain aux scènes historiques, comme à Reims
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{Etudes XVIII, XIX), à Troyes { Etude XIII), à Strasbourg {Etude XIV), etc.
Les mosaïques de Strasbourg et de Colmar (mos. g, h) trahissent, il faut l'avouer, une époque plus
avancée (et partant, une école bien moins élevée) que celle dont nous nous occupions spéciale-
ment- dans ce volume. Nous espérons néanmoins qu'on nous saura gré de les avoir fait connaître.
Elles offrent le plus riche système d'ornementation qui ait été mis en œuvre lorsque l'extrême mai-
greur des jours trop subdivisés dans les entre-meneaux rendit les médaillons impossibles. Ces longs
rubans diaprés de couleurs diverses, à la manière des plates-bandes d'un parterre consacrées à diffé-
rentes espèces de fleurs, s'associent merveilleusement avec les découpures des gigantesques fenêtrages
qui prévalurent entre le xive siècle et le xvie. Les absides devinrent d'immenses corbeilles de fleurs
d'où descendirent ces fraîches guirlandes que les siècles ne devaient point faner.
Au milieu de ces fleurs aériennes s'élancèrent les édicules fantastiques aux délicats supports, aux dais
ouvragés, aux pignons en dentelles, aux mille clochetons dorés couronnant les images des élus; sem-
blables à ces autres édifices que l'orfèvrerie construisait en argent et en or, et faisait étinceler de
pierreries au-dessus des saintes reliques. Notre Etude XII (fig. c, e) ne donne qu'un aperçu de cette
magnificence un peu coquette, mais souverainement gracieuse. Bourges nous en offrira de nombreux
exemples s'il nous est donné de conduire jusqu'à sa fin la monographie dont nous achevons en ce
moment le premier volume.
Au point où nous sommes actuellement parvenus, nous pouvons du moins nous rendre le témoi-
gnage d'avoir traité avec quelque honneur une noble et grande époque qui le méritait, sans contredit,
et qui avait déjà trop attendu cette tardive justice. Si nous ne nous abusons, il y aura dans tous ces
éléments réunis plus d'une leçon dont on n'avait pas assez soupçonné l'importance. L'avenir y pourra
trouver de quoi s'enrichir; et ne fût-ce que cela, nous aurons contribué à l'appréciation d'un passé
où dormaient de vieilles gloires, qu'il ne fallait pas laisser ensevelies plus longtemps dans un si pro-
fond sommeil.
« Exposui sicut potui ; nec ignoro quod non omnibus place-
bit; .... Ubi autem dixi quod a Patribus accepi, dum sic
absit typhus prœsumptionis ut non desit fructus devotionis,
patienter audiam de superfluitate causantes. »
Bernard., Excus. post Homil. sup. Missus est
(t.I,755).
FIN.
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