DES PIERRES GRAVÉES. 51
moins étonnante chez un peuple qui conservoit encore le senti-
ment de son ancienne liberté, & à qui ce symbole de la Royauté
devoit être odieux. Ce qui est plus étonnant encore , c’ess que
malgré de si grands honneurs rendus à Aggrippa, son nom soit
bien moins célébré que celui de Mécène.
Tous deux avoient un mérite également rare , tous deux
étoient amis d’Auguste. Le premier affermit le pouvoir de l’Em-
pereur par les victoires multipliées qu’il remporta sur ses en-
nemis : le sécond lui concilia l’efiime & l’amour des Romains
qu’il accoutuma insensiblement à porter le joug, & dont il sut
amollir l’ame en leur offrant des amusemens & des plaisirs :
l’un & l’autre enfin se rendirent nécessaires à Auguste, & furent s
après lui, les premiers de l’Etat ; cependant le nom d’Agrippa
n’esi pas devenu , comme celui de Mécène , un titre glorieux:
pour les Souverains même. Et l’on ne dira pas que le nom de
Mécène n’est parvenu avec tant d’éclat à la posiérité, que parce
qu’il a suivi le sort de ceux d’Horace & de Virgile dont les
écrits sont immortels, car Horace , à qui Mécène doit en partie
sa renommée, a chanté ausii Agrippa : peut-on même imaginer
un éloge plus ingénieux & plus ssatteur que l’Ode qu’il lui a
adressée ( 1 ) ? Et Virgile n’avoit - il pas su placer dans la des-
(1) Scriberis Vario sortis, & hojlium
Victor Mæonii car minis alite,
Quant rem cumque serox navibus, aut equis
Miles te duce gejjerit.
Nos, Agrippa, neque hcec dicere, nec gravem
Peleidœ Jlomachum cedere nejcii ,
Nec cursus duplicis per mare Ulyjjeï,
Nec Jœvam Pelopis domum.
Conamur tenues grandia : dum pudor }
Imbellifque lyræ Mufa potens vetat
Laudes egregii Cœfaris , & tuas
Culpa deterere ingeril.
Qui s Martem tunica tectum adamantina.
Digne scripjerit ? aut pulvere Troïco
Nigrum Merionem ? aut ope Palladis
Tydiden fuperis parem ?
moins étonnante chez un peuple qui conservoit encore le senti-
ment de son ancienne liberté, & à qui ce symbole de la Royauté
devoit être odieux. Ce qui est plus étonnant encore , c’ess que
malgré de si grands honneurs rendus à Aggrippa, son nom soit
bien moins célébré que celui de Mécène.
Tous deux avoient un mérite également rare , tous deux
étoient amis d’Auguste. Le premier affermit le pouvoir de l’Em-
pereur par les victoires multipliées qu’il remporta sur ses en-
nemis : le sécond lui concilia l’efiime & l’amour des Romains
qu’il accoutuma insensiblement à porter le joug, & dont il sut
amollir l’ame en leur offrant des amusemens & des plaisirs :
l’un & l’autre enfin se rendirent nécessaires à Auguste, & furent s
après lui, les premiers de l’Etat ; cependant le nom d’Agrippa
n’esi pas devenu , comme celui de Mécène , un titre glorieux:
pour les Souverains même. Et l’on ne dira pas que le nom de
Mécène n’est parvenu avec tant d’éclat à la posiérité, que parce
qu’il a suivi le sort de ceux d’Horace & de Virgile dont les
écrits sont immortels, car Horace , à qui Mécène doit en partie
sa renommée, a chanté ausii Agrippa : peut-on même imaginer
un éloge plus ingénieux & plus ssatteur que l’Ode qu’il lui a
adressée ( 1 ) ? Et Virgile n’avoit - il pas su placer dans la des-
(1) Scriberis Vario sortis, & hojlium
Victor Mæonii car minis alite,
Quant rem cumque serox navibus, aut equis
Miles te duce gejjerit.
Nos, Agrippa, neque hcec dicere, nec gravem
Peleidœ Jlomachum cedere nejcii ,
Nec cursus duplicis per mare Ulyjjeï,
Nec Jœvam Pelopis domum.
Conamur tenues grandia : dum pudor }
Imbellifque lyræ Mufa potens vetat
Laudes egregii Cœfaris , & tuas
Culpa deterere ingeril.
Qui s Martem tunica tectum adamantina.
Digne scripjerit ? aut pulvere Troïco
Nigrum Merionem ? aut ope Palladis
Tydiden fuperis parem ?