DES PIERRES GRAVÉES.
*35
CARACALLA, Cornaline.
Il y a peu de Princes, quelque vicieux qu’ils aient été, dont
l’hidoire ne nous ait transmis quelques aâions dignes de louan-
ges ; mais il n’en ell pas ainli de Caracalla : toute sa vie n’ell
qu’un tissu de crimes. Après avoir conçu le noir projet d’abréger
les jours d’un père expirant, il signala le commencement de son
règne par le meurtre de l’infortuné Géta, son frère, qu’il afîassina sur
le sein de Julie leur mère ; & peu s’en fallut que Julie elle-même
ne devînt la viélime de la rage de ce furieux, parce que tou-
chée également & de la mort d’un fils qu’elle aimoit, & des
circonstances de cette mort, elle avoit laissé échapper quelques
larmes.
La mort de Géta fut suivie de celle de tous ses amis : il
suffisoit d’avoir été attaché à ce Prince malheureux , pour être
enveloppé dans la funeste proscription par laquelle Caracalla
sembloit vouloir anéantir tout ce qui pouvoir lui rappeller son
crime. On compte jusqu’à vingt mille personnes de l’un & de
l’autre sexe qui subirent la mort sous le prétexte vague de leurs
liaisons avec Géta (i) ; mais la plus illustre de ces viâimes est sans
contredit Papinien. Ce Préfet du Prétoire avoit reçu ordre , dit-on ,
d’employer toute son éloquence pour faire l’apologie du meurtre
de Géta ; & en refusant d’obéir au tyran , il lui avoit répondu
qu’il étoit plus aisé de commettre un parricide que de le jus-
tifier (2).
(1) Dio. Lib. LXXVII.
(z) Il paroît consiant que le meurtre de Papinien a été ordonné par Caracalla;
mais les Historiens varient sur les circonstances de la mort de cet illustre Romain.
Voici ce qu’on en lit dans Spartien. Multi dicunt Basïianum ( Bassïen étoit le vrai
nom de Caracalla ) occiso fratre, illi ( Papiniano ) mandasse, ut & in Senatu per
Tome, II ïi
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CARACALLA, Cornaline.
Il y a peu de Princes, quelque vicieux qu’ils aient été, dont
l’hidoire ne nous ait transmis quelques aâions dignes de louan-
ges ; mais il n’en ell pas ainli de Caracalla : toute sa vie n’ell
qu’un tissu de crimes. Après avoir conçu le noir projet d’abréger
les jours d’un père expirant, il signala le commencement de son
règne par le meurtre de l’infortuné Géta, son frère, qu’il afîassina sur
le sein de Julie leur mère ; & peu s’en fallut que Julie elle-même
ne devînt la viélime de la rage de ce furieux, parce que tou-
chée également & de la mort d’un fils qu’elle aimoit, & des
circonstances de cette mort, elle avoit laissé échapper quelques
larmes.
La mort de Géta fut suivie de celle de tous ses amis : il
suffisoit d’avoir été attaché à ce Prince malheureux , pour être
enveloppé dans la funeste proscription par laquelle Caracalla
sembloit vouloir anéantir tout ce qui pouvoir lui rappeller son
crime. On compte jusqu’à vingt mille personnes de l’un & de
l’autre sexe qui subirent la mort sous le prétexte vague de leurs
liaisons avec Géta (i) ; mais la plus illustre de ces viâimes est sans
contredit Papinien. Ce Préfet du Prétoire avoit reçu ordre , dit-on ,
d’employer toute son éloquence pour faire l’apologie du meurtre
de Géta ; & en refusant d’obéir au tyran , il lui avoit répondu
qu’il étoit plus aisé de commettre un parricide que de le jus-
tifier (2).
(1) Dio. Lib. LXXVII.
(z) Il paroît consiant que le meurtre de Papinien a été ordonné par Caracalla;
mais les Historiens varient sur les circonstances de la mort de cet illustre Romain.
Voici ce qu’on en lit dans Spartien. Multi dicunt Basïianum ( Bassïen étoit le vrai
nom de Caracalla ) occiso fratre, illi ( Papiniano ) mandasse, ut & in Senatu per
Tome, II ïi