ï2o DESCRIPTION
il avoit été affligé pendant si long-temps , si les mœurs graves
& sévères de Marc-Aurele n’eulsent souvent mis un frein à sa
licence.
Dès que Vérus n’avoit plus à redouter l’œil attentif de son
Collègue , il suivoit sans mesure tous ses goûts & ne tardoit
pas à faire connoître ce qu’on eût pu attendre d’un Empereur
tel que lui.
Envoié contre les Parthes qui menaçoient l’Empire d’une in-
vasion, il ne se signale que par des excès, à chaque pas il laisse
des traces de ses inclinations frivoles & honteuses. L’amour de
la table le retient dans toutes les maisons de campagne de l’I-
talie , & il s’y abandonne avec si peu de ménagement qu’il
tombe malade à Canouse. La mort d’un de ses Lieutenants, les
légions Romaines taillées en pièces , les Syriens prêts à se dé-
clarer contre l’Empire , l’Orient ravagé , tant de malheurs ne
peuvent l’arracher de l’Apulie où il prend le plaisir de la chasie.
C’efi avec la même lenteur qu’il parcourt les villes maritimes
de l’Asie. Il arrive enfin à Antioche , & tandis que ses Géné-
raux font respe&er les armes Romaines , il ne s’occupe que des
plaisirs de cette ville voluptueuse , il s’y plonge dans toutes
sortes de débauches & devient l’objet du mépris des Syriens eux-
mêmes qui l’accablent de plaisanteries en plein théâtre. Ce n’est
qu’avec répugnance qu’il revient à Rome recevoir les honneurs
du triomphe 9 & cette pompe porte elle-même l’empreinte de
la légèreté de son caraâère. Au lieu de Rois vaincus on ne voit
à sa suite que des Comédiens & des Bateleurs qu’il avoit amenés
de Syrie, & qui eurent toujours depuis la plus grande part à sa
familiarité.
Cette conduite effrayoit d’autant plus juflement l’Empire, qu’à
cette époque Marc-Aurele commença à perdre un peu de son
ascendant sur l’esprit de son Collègue ; mais une apoplexie vio-
lente mit heureusement fin à une vie qui ne présageoit que des
malheurs. Vérus mourut après neuf ans de règne , & quoiqu’in-
digne d’être compté parmi les bons Princes, il fut placé , suivant
l’usage , au rang des Dieux.
COMMODE.
il avoit été affligé pendant si long-temps , si les mœurs graves
& sévères de Marc-Aurele n’eulsent souvent mis un frein à sa
licence.
Dès que Vérus n’avoit plus à redouter l’œil attentif de son
Collègue , il suivoit sans mesure tous ses goûts & ne tardoit
pas à faire connoître ce qu’on eût pu attendre d’un Empereur
tel que lui.
Envoié contre les Parthes qui menaçoient l’Empire d’une in-
vasion, il ne se signale que par des excès, à chaque pas il laisse
des traces de ses inclinations frivoles & honteuses. L’amour de
la table le retient dans toutes les maisons de campagne de l’I-
talie , & il s’y abandonne avec si peu de ménagement qu’il
tombe malade à Canouse. La mort d’un de ses Lieutenants, les
légions Romaines taillées en pièces , les Syriens prêts à se dé-
clarer contre l’Empire , l’Orient ravagé , tant de malheurs ne
peuvent l’arracher de l’Apulie où il prend le plaisir de la chasie.
C’efi avec la même lenteur qu’il parcourt les villes maritimes
de l’Asie. Il arrive enfin à Antioche , & tandis que ses Géné-
raux font respe&er les armes Romaines , il ne s’occupe que des
plaisirs de cette ville voluptueuse , il s’y plonge dans toutes
sortes de débauches & devient l’objet du mépris des Syriens eux-
mêmes qui l’accablent de plaisanteries en plein théâtre. Ce n’est
qu’avec répugnance qu’il revient à Rome recevoir les honneurs
du triomphe 9 & cette pompe porte elle-même l’empreinte de
la légèreté de son caraâère. Au lieu de Rois vaincus on ne voit
à sa suite que des Comédiens & des Bateleurs qu’il avoit amenés
de Syrie, & qui eurent toujours depuis la plus grande part à sa
familiarité.
Cette conduite effrayoit d’autant plus juflement l’Empire, qu’à
cette époque Marc-Aurele commença à perdre un peu de son
ascendant sur l’esprit de son Collègue ; mais une apoplexie vio-
lente mit heureusement fin à une vie qui ne présageoit que des
malheurs. Vérus mourut après neuf ans de règne , & quoiqu’in-
digne d’être compté parmi les bons Princes, il fut placé , suivant
l’usage , au rang des Dieux.
COMMODE.