ET DE LA CURIOSITE 133
parable maîtrise de l'écriture et de l'orchestration.
J'avais regretté naguère de n'y voir que la couleur
locale de la palette éblouissante, mais si connue,
des Rirnsky-Korsakoff et des Balakirelî. Aujour-
d'hui, je crois comprendre que M. Dukas, son ins-
tinct et sa raison étant d'accord, a réalisé dans ce
pastiche l'imago exacte qu'il se faisait irrésistible-
ment de l'Orient, à travers Thamar et Sohéhéra-
zade. C'est pourquoi la Péri n'est pas qu'un sim-
ple pastiche, mais bien mieux. Sans doute, un pré-
curseur,un créateur génial eût-il trouvé une forme
neuve, une traduction musicale réellement inédite
de la grâce et de la passion persanes ; mais, à moins
d'un miracle (d'ailleurs possible), l'œuvre de ce
précurseur eût risqué d'être inégale, incertaine,
maladroite. Celle de M. Dukas n'est que certitude,
égalilé, maîtrise. Avec un très grand talent, l'ar-
tiste a réalisé ce qu'il avait voulu. Personnelle-
ment, je n'en préfère pas moins les pages d'intense
émotion ou d'éclatante joie d'Ariane et Barbe-
Bleue. Mais il faut prendre la Péri pour ce
qu'elle est : de la musique destinée à être traduite
plastiquement; en somme, l'élément principal d'un
ensemble que complètent les danses, les costumes,
le décor. Cet ensemble est fort harmonieux. La
seule critique que je me permettrais, c'est que le
décor offre un peu trop l'aspect d'un agrandisse-
ment photographique de miniature persane. Il est
vrai que la musique, fort développée, usant de
sonorités considérables, donne aussi cette impres-
sion, de sorte que l'équilibre général n'est pas
rompu. Dans le c is présent, c'est l'essentiel.
Charles Kœchlin.
REVUE DES REVUES
Bulletin de Correspondance hellénique.
XXXVI (1912). — P. 219. K. Yallois, « Stoiba » et
«. Kerkis ». Étude sur la signification de ces doux
termes d'architecture qui se rencontrent dans l'ins-
cription d'Épidaure relative à la construction du
temple d'Esculape. Le premier désignerait la
rampe d'accès; l'autre une aile (c'est-à-dire la
moitié) d'un fronton.
— P. 248. Paul Perdrlzet, Némésis. Publie et
commente notamment : 1° Deux curieuses statuettes
de Némésis, dans des collections égypti urnes, où
la déesse est représentée foulant aux pieds une
tête d'homme (le Crime) ; 2- un relief du musée
du Caire qui montre Némésis court vêtue écrasant
le Crime (une femme); derrière elle, une autre
femme en deuil personnifie le Remords. En termi-
nant, l'auteur combat la théorie d'Amelung sur
l'influence prépondérante du style do Praxitèle
dans l'Egypte ptolémaïque.
— P. 275. Ch. Picard et Ad. Reinach, Voyage
dans la Chersonèse et aux lies de la mer de
Thrace. Çà et là quelques monuments de sculp-
ture : p. 310 (Madytos), stèle funéraire, homme,
femme et petite servante ; p. 317 (Imbros), cippe
de style pittoresque : arbre et sanglier poursuivi
par un chien.
— P.353. Rhomaios, Inscriptions de Tëgée. P. 378,
stèle votive à Poséidon (iv* siècle?) : Aphrodite
vue de profil, tenant une pomme et une colombe,
relief très peu accentué.
— P. 439. W.-B. Dinsmoor, Etudes sur les « Tré-
sors » de Delphes. Pausanias nomme 8 Trésors
étrangers dans l'enceinte d'Apollon ; les fouilles en
ont révélé 24 : d'où les difficultés d'identification.
Los « Trésors » dont M. Dinsmoor propose l'attri-
bution sont, par ordre chronologique, ceux des
Athéniens (580), Guidions, Spinafiens (?), Syra-
cusains, Clazoméniens, Massilioles, Siphniens,
Potidéens, Acanthiens, Sicyoniens, Thébains.
— P. 495. Ch. Dugas, Les vases rhodievs géomé-
triques. Ces vases, peu nombreux, forment trois
groupes : 1" motifs simples, linéaires, confinés
dans un cadre réservé sur l'épaule ; 2° ornemen-
tation plus étendue et plus compliquée, rôle de
l'oiseau ; 3° passage au style orientalisant. L'au-
teur énumère les exemplaires déjà publiés et pu-
blie quelques inédits : 3 beaux spécimens du
groupe 2, dont un de Myrina. Ces vases paraissent
se rattacher au type des Cyclades ; outre Rhodes,
Milet doit avoir été un centre de fabrication.
— P. 523. A. de Riddor, L'Athéna mélancolique.
Le « pilier » est bien une stèle inscrite, peut-être
celle où était gravée la loi relative à l'érection du
Parthénon. Athéna n'est pas mélancolique, mais
calme.
— P. 534. G. Seure, Antiquités thrace! de la Pro-
pontide (collection Stamoulis, à Silivri). Monuments
romains et byzantins (p. 558, slèle de sacrifice ;
p. 572, stèle votive à Dionysos Eleinitès ; p. 582,
série de o cavaliers thraces »; p. 595, funéraires
de fillettes avec oiseau et bouquet; p. 598, curieuse
boucherie-rôtisserie; p. 601, banquets funèbres).
— P. 642. Bourguet, Le Trésor de Corinthe (à
Delphes). Il se trouvait à l'extrémité orientale de
l'aire. Identification assurée par une dalle inscrite.
BIBLIOGRAPHIE
Les Masques et les Visages à Florence et au
Louvre, par Robert de la Sizeranne. — Paris,
Hachette et G'". Un volume in-8°, de 252 pages
illustré.
Que furent, dans leur vie privée et intime, ces
femmes de la Renaissance dont nous admirons
les portraits dans les musées de Florence, de Paris
et de Chantilly : la Belle Simonetla, Bianca
Cappello, Isabelle d'Esté? Q 10 fut ce Balthazar
Castiglione qui occupe aujourd'hui au Louvre la
place de la Joconde'! Et ce chevalier à genoux, en
extase, dans le tableau la Vierge de ta Victoire,
pourquoi est-il là et que fît-il ? Voilà ce que
M. Robert de la Sizeranne est parvenu à retrouver
après plusieurs années do recherches en Ilalie, et
ce qu'il nous raconte dans son nouveau livre Les
Masques et les Visages, dont les divers chapitres
ont été analysés ici même au fur et à mesure de
leur apparition dans la Revue des Deux-Mondes.
Die Colonna, par la comtesse Louise Ross. —
Leipzig, Klinkhardt et Biermann. 2 volumes in-8°T
de 274 et 258 pages, avec 35 planches hors texte.
Entreprendre de faire revivre la gloire des
Colonna depuis le x" siècle jusqu'au xix% c'est
presque tenter d'écrire l'histoire de Rome, tant les
fastes de l'illustre famille se trouvent constamment
liés aux destinées de la Ville Eternelle. La tâche
n'a pas effrayé la comtesse Louise Ross et elle
s'en est tirée à son honneur. L'évocation,
parable maîtrise de l'écriture et de l'orchestration.
J'avais regretté naguère de n'y voir que la couleur
locale de la palette éblouissante, mais si connue,
des Rirnsky-Korsakoff et des Balakirelî. Aujour-
d'hui, je crois comprendre que M. Dukas, son ins-
tinct et sa raison étant d'accord, a réalisé dans ce
pastiche l'imago exacte qu'il se faisait irrésistible-
ment de l'Orient, à travers Thamar et Sohéhéra-
zade. C'est pourquoi la Péri n'est pas qu'un sim-
ple pastiche, mais bien mieux. Sans doute, un pré-
curseur,un créateur génial eût-il trouvé une forme
neuve, une traduction musicale réellement inédite
de la grâce et de la passion persanes ; mais, à moins
d'un miracle (d'ailleurs possible), l'œuvre de ce
précurseur eût risqué d'être inégale, incertaine,
maladroite. Celle de M. Dukas n'est que certitude,
égalilé, maîtrise. Avec un très grand talent, l'ar-
tiste a réalisé ce qu'il avait voulu. Personnelle-
ment, je n'en préfère pas moins les pages d'intense
émotion ou d'éclatante joie d'Ariane et Barbe-
Bleue. Mais il faut prendre la Péri pour ce
qu'elle est : de la musique destinée à être traduite
plastiquement; en somme, l'élément principal d'un
ensemble que complètent les danses, les costumes,
le décor. Cet ensemble est fort harmonieux. La
seule critique que je me permettrais, c'est que le
décor offre un peu trop l'aspect d'un agrandisse-
ment photographique de miniature persane. Il est
vrai que la musique, fort développée, usant de
sonorités considérables, donne aussi cette impres-
sion, de sorte que l'équilibre général n'est pas
rompu. Dans le c is présent, c'est l'essentiel.
Charles Kœchlin.
REVUE DES REVUES
Bulletin de Correspondance hellénique.
XXXVI (1912). — P. 219. K. Yallois, « Stoiba » et
«. Kerkis ». Étude sur la signification de ces doux
termes d'architecture qui se rencontrent dans l'ins-
cription d'Épidaure relative à la construction du
temple d'Esculape. Le premier désignerait la
rampe d'accès; l'autre une aile (c'est-à-dire la
moitié) d'un fronton.
— P. 248. Paul Perdrlzet, Némésis. Publie et
commente notamment : 1° Deux curieuses statuettes
de Némésis, dans des collections égypti urnes, où
la déesse est représentée foulant aux pieds une
tête d'homme (le Crime) ; 2- un relief du musée
du Caire qui montre Némésis court vêtue écrasant
le Crime (une femme); derrière elle, une autre
femme en deuil personnifie le Remords. En termi-
nant, l'auteur combat la théorie d'Amelung sur
l'influence prépondérante du style do Praxitèle
dans l'Egypte ptolémaïque.
— P. 275. Ch. Picard et Ad. Reinach, Voyage
dans la Chersonèse et aux lies de la mer de
Thrace. Çà et là quelques monuments de sculp-
ture : p. 310 (Madytos), stèle funéraire, homme,
femme et petite servante ; p. 317 (Imbros), cippe
de style pittoresque : arbre et sanglier poursuivi
par un chien.
— P.353. Rhomaios, Inscriptions de Tëgée. P. 378,
stèle votive à Poséidon (iv* siècle?) : Aphrodite
vue de profil, tenant une pomme et une colombe,
relief très peu accentué.
— P. 439. W.-B. Dinsmoor, Etudes sur les « Tré-
sors » de Delphes. Pausanias nomme 8 Trésors
étrangers dans l'enceinte d'Apollon ; les fouilles en
ont révélé 24 : d'où les difficultés d'identification.
Los « Trésors » dont M. Dinsmoor propose l'attri-
bution sont, par ordre chronologique, ceux des
Athéniens (580), Guidions, Spinafiens (?), Syra-
cusains, Clazoméniens, Massilioles, Siphniens,
Potidéens, Acanthiens, Sicyoniens, Thébains.
— P. 495. Ch. Dugas, Les vases rhodievs géomé-
triques. Ces vases, peu nombreux, forment trois
groupes : 1" motifs simples, linéaires, confinés
dans un cadre réservé sur l'épaule ; 2° ornemen-
tation plus étendue et plus compliquée, rôle de
l'oiseau ; 3° passage au style orientalisant. L'au-
teur énumère les exemplaires déjà publiés et pu-
blie quelques inédits : 3 beaux spécimens du
groupe 2, dont un de Myrina. Ces vases paraissent
se rattacher au type des Cyclades ; outre Rhodes,
Milet doit avoir été un centre de fabrication.
— P. 523. A. de Riddor, L'Athéna mélancolique.
Le « pilier » est bien une stèle inscrite, peut-être
celle où était gravée la loi relative à l'érection du
Parthénon. Athéna n'est pas mélancolique, mais
calme.
— P. 534. G. Seure, Antiquités thrace! de la Pro-
pontide (collection Stamoulis, à Silivri). Monuments
romains et byzantins (p. 558, slèle de sacrifice ;
p. 572, stèle votive à Dionysos Eleinitès ; p. 582,
série de o cavaliers thraces »; p. 595, funéraires
de fillettes avec oiseau et bouquet; p. 598, curieuse
boucherie-rôtisserie; p. 601, banquets funèbres).
— P. 642. Bourguet, Le Trésor de Corinthe (à
Delphes). Il se trouvait à l'extrémité orientale de
l'aire. Identification assurée par une dalle inscrite.
BIBLIOGRAPHIE
Les Masques et les Visages à Florence et au
Louvre, par Robert de la Sizeranne. — Paris,
Hachette et G'". Un volume in-8°, de 252 pages
illustré.
Que furent, dans leur vie privée et intime, ces
femmes de la Renaissance dont nous admirons
les portraits dans les musées de Florence, de Paris
et de Chantilly : la Belle Simonetla, Bianca
Cappello, Isabelle d'Esté? Q 10 fut ce Balthazar
Castiglione qui occupe aujourd'hui au Louvre la
place de la Joconde'! Et ce chevalier à genoux, en
extase, dans le tableau la Vierge de ta Victoire,
pourquoi est-il là et que fît-il ? Voilà ce que
M. Robert de la Sizeranne est parvenu à retrouver
après plusieurs années do recherches en Ilalie, et
ce qu'il nous raconte dans son nouveau livre Les
Masques et les Visages, dont les divers chapitres
ont été analysés ici même au fur et à mesure de
leur apparition dans la Revue des Deux-Mondes.
Die Colonna, par la comtesse Louise Ross. —
Leipzig, Klinkhardt et Biermann. 2 volumes in-8°T
de 274 et 258 pages, avec 35 planches hors texte.
Entreprendre de faire revivre la gloire des
Colonna depuis le x" siècle jusqu'au xix% c'est
presque tenter d'écrire l'histoire de Rome, tant les
fastes de l'illustre famille se trouvent constamment
liés aux destinées de la Ville Eternelle. La tâche
n'a pas effrayé la comtesse Louise Ross et elle
s'en est tirée à son honneur. L'évocation,