ULYSSE CHEZ LES ARCADIENS
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De même il me semble que le nouveau type d’Ulysse sacrifiant aux dieux à Mantinée
(MavTtveta), c’est-à-dire dans la ville indiquée par le devin ((/.àvTtç)1, fut choisi par
les Mantinéens pour dire aux Lacédémoniens : « Ah ! vous avez détruit la ville sacrée
de Trophonios! la ville où Ulysse est venu jadis ériger des temples aux dieux sur le
conseil du devin de Lebadie ! la voilà reconstruite après votre terrible désastre à Leuctres,
désastre qui nous avait été prédit par Trophonios lui-même, irrité justement contre vous.
Prenez garde de recommencer la guerre contre une ville sacrée ! »
Je ne terminerai pas ce travail sans remarquer combien de faits nouveaux se trouvent
éclaircis et expliqués par un seul monument numismatique resté jusqu’ici lettre close.
Une seule monnaie nous permet de comprendre, pour la première fois, après tant de
siècles, quel était le peuple indiqué par le grand poète dans une des plus intéressantes
rapsodies de son épopée; elle nous permet d’éviter les mauvaises interprétations des
anciens et des modernes ; de comprendre l’esprit et la série des faits d’une épopée qui
faisait la suite de l’Odyssée; de connaître le costume fort intéressant dont étaient revêtus
ceux qui descendaient chez Trophonios ; elle nous montre la forme inconnue jusqu’à pré-
sent des crépides de Lebadie; elle nous donne l’explication juste d’une pierre gravée, un
des plus rares et intéressants monuments de cette espèce; elle nous fait comprendre
pourquoi en Arcadie, et non dans un autre pays, il y a tant de légendes sur la fin de la
vie d’Ulysse; dans cette monnaie, nous possédons un monument, pour ainsi dire, com-
mémoratif de la fameuse bataille de Leuctres et de la reconstruction de Mantinée par le
conseil et l’appui d’Epaminondas, le plus noble des anciens stratèges; la date exacte de
ce monument numismatique nous est en même temps affirmée, circonstance qui peut
rendre les plus grands services à la classification chronologique des monnaies du
Péloponnèse tout entier. Vraiment, après cela, on ne peut que regretter fort le peu de
place que l’étude des types monétaires tient dans les recueils archéologiques, où les
monnaies ne paraissent le plus souvent que par exception et comme s’il s’agissait de
monuments qui n’ont qu’une valeur secondaire pour la connaissance de l’antiquité. Il y
a là pourtant mille et mille problèmes à résoudre, mille et mille questions de la plus
grande importance, qui sont bien dignes d’attirer l’attention de tous ceux qui s’intéressent
à la connaissance générale de l’antiquité.
Jean N. SVORONOS.
1. La légende selon laquelle Mantinée, dont le nom si-
gnifie le pays du devin ou la ville indiquée par le devin (cf.
Pape-Benseler, Wærterbuch der Griech. Eigennamen, 1875)
était bâtie •/.aià [j.avrslav, un serpent ayant indiqué le che-
min , n’est pas peut-être sans allusion à l’indication de
Trophonios. Nous savons que ce devin était représenté par
un serpent. (Suidas, s. v. Tpo^ojvioç.)
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De même il me semble que le nouveau type d’Ulysse sacrifiant aux dieux à Mantinée
(MavTtveta), c’est-à-dire dans la ville indiquée par le devin ((/.àvTtç)1, fut choisi par
les Mantinéens pour dire aux Lacédémoniens : « Ah ! vous avez détruit la ville sacrée
de Trophonios! la ville où Ulysse est venu jadis ériger des temples aux dieux sur le
conseil du devin de Lebadie ! la voilà reconstruite après votre terrible désastre à Leuctres,
désastre qui nous avait été prédit par Trophonios lui-même, irrité justement contre vous.
Prenez garde de recommencer la guerre contre une ville sacrée ! »
Je ne terminerai pas ce travail sans remarquer combien de faits nouveaux se trouvent
éclaircis et expliqués par un seul monument numismatique resté jusqu’ici lettre close.
Une seule monnaie nous permet de comprendre, pour la première fois, après tant de
siècles, quel était le peuple indiqué par le grand poète dans une des plus intéressantes
rapsodies de son épopée; elle nous permet d’éviter les mauvaises interprétations des
anciens et des modernes ; de comprendre l’esprit et la série des faits d’une épopée qui
faisait la suite de l’Odyssée; de connaître le costume fort intéressant dont étaient revêtus
ceux qui descendaient chez Trophonios ; elle nous montre la forme inconnue jusqu’à pré-
sent des crépides de Lebadie; elle nous donne l’explication juste d’une pierre gravée, un
des plus rares et intéressants monuments de cette espèce; elle nous fait comprendre
pourquoi en Arcadie, et non dans un autre pays, il y a tant de légendes sur la fin de la
vie d’Ulysse; dans cette monnaie, nous possédons un monument, pour ainsi dire, com-
mémoratif de la fameuse bataille de Leuctres et de la reconstruction de Mantinée par le
conseil et l’appui d’Epaminondas, le plus noble des anciens stratèges; la date exacte de
ce monument numismatique nous est en même temps affirmée, circonstance qui peut
rendre les plus grands services à la classification chronologique des monnaies du
Péloponnèse tout entier. Vraiment, après cela, on ne peut que regretter fort le peu de
place que l’étude des types monétaires tient dans les recueils archéologiques, où les
monnaies ne paraissent le plus souvent que par exception et comme s’il s’agissait de
monuments qui n’ont qu’une valeur secondaire pour la connaissance de l’antiquité. Il y
a là pourtant mille et mille problèmes à résoudre, mille et mille questions de la plus
grande importance, qui sont bien dignes d’attirer l’attention de tous ceux qui s’intéressent
à la connaissance générale de l’antiquité.
Jean N. SVORONOS.
1. La légende selon laquelle Mantinée, dont le nom si-
gnifie le pays du devin ou la ville indiquée par le devin (cf.
Pape-Benseler, Wærterbuch der Griech. Eigennamen, 1875)
était bâtie •/.aià [j.avrslav, un serpent ayant indiqué le che-
min , n’est pas peut-être sans allusion à l’indication de
Trophonios. Nous savons que ce devin était représenté par
un serpent. (Suidas, s. v. Tpo^ojvioç.)