MOUVEMENT DES ARTS.
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La fin de février verra mettre sur table la collection de monnaies féodales fran-
çaises de M. Jean Rousseau. Le catalogue de cette collection, du plus haut intérêt pour
ceux qui veulent reconstruire l'histoire avec les rares matériaux du passé, a été rédigé
par MM. Benjamin Fillon, de Fontenay, et Yendic, avec une conscience et une érudition
qui en font un monument dans l'histoire de la numismatique française. Nous ne pou-
vons aujourd'hui qu'annoncer ce catalogue, enrichi de planches et de bois qui repro-
duisent les pièces uniques ou rarissimes, ou curieuses comme point de départ dans la
discussion.
PII. BURTY.
LIVRES D'ART
Le Chemin des Écoliers, promenade de Paris a Marly-le-Roi, en suivant
les rords du Rhin, par X.-B. Saintine, avec vignettes sur bois de
MM. G. Doré, Forster, Lancelot, etc. — Paris, Hachette et Ge, 1860.
L'aimable chemin que le chemin des écoliers, surtout lorsqu'on le suit en compa-
gnie de gens d'esprit et de talent! Et de quelle vogue il a joui en tout temps! Quoi
qu'en ait dit récemment notre collaborateur et ami Léon Lagrange, les plus charmants
voyages ne sont-ils pas ceux que nous racontent, les pieds sur les chenets, les voya-
geurs d'outre-fanlaisie? Les lettres de Jacquemont sont bien intéressantes; mais que
nous avons de plaisir à suivre Sterne depuis son débarquement à Calais jusque dans la
boutique de la marchande de gants au Palais-Royal! Je ne dis point de mal du recueil
de La Harpe, mais me suis-je jamais endormi pendant le Voyage autour de ma
chambre? Tony Johannot, dans son Voyage oit il vous plaira, n'est-il pas un de ceux
qui ont le plus contribué à nous dégoûter des voyages avec récits en âmes, en urnes
et en îmes. Il avait fait passer devant nos yeux des monstres si doucement horribles,
une Allemagne si rêveuse; il nous avait fait traverser les espaces imaginaires sur la
croupe de coursiers si spirituellement fantastiques, que nous avions résolu de ne plus
ouvrir que des récits de voyages où sa fantaisie tient les guides, où le crayon galope en
croupe de la plume.
Il y a précisément un peu de ces deux maîtres que nous citions plus haut dans le
Chemin des écoliers de M. X.-B. Saintine. M. Saintine a parfois quelque chose de la
bonne humeur narquoise de Sterne, mais sa plaisanterie finit le plus souvent par un
soupir moitié voilé, moitié railleur, à la façon de Xavier de Maistre; il y a toujours
une larme au bout de ses sourires. Nos lecteurs retrouveront dans les mésaventures
quelquefois un peu trop volontaires du héros, M. Canaple, la gaieté encore jeune du
collaborateur de VOurs et le Pacha, et la sensibilité toujours communicative de l'au-
teur de Picciola.
M. X.-B. Saintine, le jour fameux où il partit de la rue de Vendôme pour se rendre,
parla barrière de Belleville, à Marly-le-Roi, avait pris au passage cet infatigable com-
pagnon de route qui s'appelle Gustave Doré. Ils entendent l'aigre premier-dessus des
crincrins et la monotone harmonie du trombone, ils approchent : c'est une danse de
village, et Doré croque au passage cette sarabande enragée où l'adjoint conduit le qua-
drille, la pipe à la bouche et les mains dans les poches, où le bel Isidore esquisse un
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La fin de février verra mettre sur table la collection de monnaies féodales fran-
çaises de M. Jean Rousseau. Le catalogue de cette collection, du plus haut intérêt pour
ceux qui veulent reconstruire l'histoire avec les rares matériaux du passé, a été rédigé
par MM. Benjamin Fillon, de Fontenay, et Yendic, avec une conscience et une érudition
qui en font un monument dans l'histoire de la numismatique française. Nous ne pou-
vons aujourd'hui qu'annoncer ce catalogue, enrichi de planches et de bois qui repro-
duisent les pièces uniques ou rarissimes, ou curieuses comme point de départ dans la
discussion.
PII. BURTY.
LIVRES D'ART
Le Chemin des Écoliers, promenade de Paris a Marly-le-Roi, en suivant
les rords du Rhin, par X.-B. Saintine, avec vignettes sur bois de
MM. G. Doré, Forster, Lancelot, etc. — Paris, Hachette et Ge, 1860.
L'aimable chemin que le chemin des écoliers, surtout lorsqu'on le suit en compa-
gnie de gens d'esprit et de talent! Et de quelle vogue il a joui en tout temps! Quoi
qu'en ait dit récemment notre collaborateur et ami Léon Lagrange, les plus charmants
voyages ne sont-ils pas ceux que nous racontent, les pieds sur les chenets, les voya-
geurs d'outre-fanlaisie? Les lettres de Jacquemont sont bien intéressantes; mais que
nous avons de plaisir à suivre Sterne depuis son débarquement à Calais jusque dans la
boutique de la marchande de gants au Palais-Royal! Je ne dis point de mal du recueil
de La Harpe, mais me suis-je jamais endormi pendant le Voyage autour de ma
chambre? Tony Johannot, dans son Voyage oit il vous plaira, n'est-il pas un de ceux
qui ont le plus contribué à nous dégoûter des voyages avec récits en âmes, en urnes
et en îmes. Il avait fait passer devant nos yeux des monstres si doucement horribles,
une Allemagne si rêveuse; il nous avait fait traverser les espaces imaginaires sur la
croupe de coursiers si spirituellement fantastiques, que nous avions résolu de ne plus
ouvrir que des récits de voyages où sa fantaisie tient les guides, où le crayon galope en
croupe de la plume.
Il y a précisément un peu de ces deux maîtres que nous citions plus haut dans le
Chemin des écoliers de M. X.-B. Saintine. M. Saintine a parfois quelque chose de la
bonne humeur narquoise de Sterne, mais sa plaisanterie finit le plus souvent par un
soupir moitié voilé, moitié railleur, à la façon de Xavier de Maistre; il y a toujours
une larme au bout de ses sourires. Nos lecteurs retrouveront dans les mésaventures
quelquefois un peu trop volontaires du héros, M. Canaple, la gaieté encore jeune du
collaborateur de VOurs et le Pacha, et la sensibilité toujours communicative de l'au-
teur de Picciola.
M. X.-B. Saintine, le jour fameux où il partit de la rue de Vendôme pour se rendre,
parla barrière de Belleville, à Marly-le-Roi, avait pris au passage cet infatigable com-
pagnon de route qui s'appelle Gustave Doré. Ils entendent l'aigre premier-dessus des
crincrins et la monotone harmonie du trombone, ils approchent : c'est une danse de
village, et Doré croque au passage cette sarabande enragée où l'adjoint conduit le qua-
drille, la pipe à la bouche et les mains dans les poches, où le bel Isidore esquisse un