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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 9.1861

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Nr. 6
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Blanc, Charles: Un an a Rome et dans ses environs: album de Jean-Baptiste Thomas
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https://doi.org/10.11588/diglit.17225#0345

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336

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

l'Ara-Cœli pour assister à la bénédiction du Bambino ; je suivais la pro-
cession fleurie de la Fête-Dieu, et les bannières et les riches lanternes
portées sur des bâtons, et les Vierges couronnées, et les enfants déguisés
en anges avec des ailes cle carton sur les épaules. Je voyais étinceler les
illuminations pontificales à la coupole de Saint-Pierre, et le feu d'artifice
au château Saint-Ange; je regardais un instant les courses de chevaux;
j'écoutais, ici, des missionnaires prêchant en pleine rue, montés sur un
chapiteau antique; là, les rustiques accords de la musette despifferari;
plus loin, les facéties débitées devant la baraque de Polichinelle. Chaque
feuillet du livre éveillait en irïoi un souvenir : celui-ci me transportait
au couvent des Gamaldules, sur la hauteur deFrascati; celui-là m'ouvrait
la chapelle Sixtine au moment où l'on y chante les prières des quarante
heures, quand la croix et l'autel sont tendus de noir et qu'à travers la
fumée des cierges on aperçoit les terribles figures de Michel-Ange qui tom-
bent comme une avalanche de damnés dans l'enfer. Un autre me rappelait
mes promenades solitaires dans les ruines du Golisée, avant l'arrivée des
confréries, qui ont planté les stations du Calvaire autour de cette arène
où les chrétiens étaient jadis offerts en spectacle aux empereurs et livrés
aux bêtes, et je contemplais de nouveau avec étonnement ce cirque païen,
dégradé, ruiné, devenu le sanctuaire d'un culte qui, à son tour, semble
tomber en ruines !

Heureux privilège des arts du dessin ! leurs images muettes sont sou-
vent plus éloquentes que la parole et plus persuasives que l'écriture; elles
sont plus frappantes que la réalité même, parce qu'elles la dégagent de tous
les détails insignifiants qui l'obstruaient et nous empêchaient de la bien
saisir. Pour celui qui est allé à Rome, les dessins de Thomas valent un
second voyage sur les bords du Tibre; pour celui qui ne l'a point visitée,
c'est une représentation vivante de tout ce qu'il aurait vu dans cette ville
extraordinaire ; mais ce que le peintre nous montre dans la cité antique,
c'est la vie moderne. D'autres en ont dessiné les ruines, les monuments,
les ouvrages d'art sculptés ou peints : Thomas nous retrace les scènes de
chaque jour, les tableaux de la rue, le spectacle de la place publique. Ces
scènes, ces tableaux ont toujours quelque chose de remarquable et d'in-
attendu. L'action la plus simple ne se fait pas à Rome comme à Paris, ni
même comme à Venise, ou à Florence, ou à INaples. Nulle part on ne
verrait, par exemple, une jeune fille s'agenouiller à quinze pas d'un
confessionnal pour recevoir le coup de baguette qui doit l'absoudre de
tout péché véniel et lui procurer une indulgence de quarante jours. La
dévotion, la haine, l'amour, prennent à Rome des formes inconnues, des
proportions surprenantes. 11 n'est rien qu'on ne puisse faire accepter à la
 
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