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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 12.1862

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Nr. 1
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Delaborde, Henri: La collection de tableaux de M. Le Comte Duchatel, 1, École italienne, école française: les cabinets d'amateurs
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https://doi.org/10.11588/diglit.17331#0024

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LA COLLECTION DE TABLEAUX DE M. DUCHATEL. 19

lait les glorieuses reliques de l'art ancien, et, sauf une exception en
faveur d'une toile capitale de Marilhat, — exception légitimée d'ailleurs
par le mérite de l'artiste et par la valeur même du travail, — c'est aux
œuvres des écoles d'Italie et des écoles des Pays-Bas qu'a été réservé le
droit de décorer les murs le mieux en relief et en vue. Est-il besoin
d'ajouter que l'Œdipe occupe une place d'honneur parmi ces tableaux
d'élite, et que, même à côté d'eux, il ne perd rien de sa beauté, de sa
vigoureuse élégance, de sa signification magistrale? Que serait-ce s'il
apparaissait ailleurs, en regard de ce qui se fait aujourd'hui? Quel plus
fier démenti aux erreurs de notre goût, quel châtiment pour les talents
mensongers qu'avoisinerait ce talent sincère, quelle justice faite dès à
présent des torts que nous nous donnons presque sans y penser, mais
que punira sévèrement l'avenir! TJn jour viendra, et ce jour est prochain
peut-être, où l'on s'étonnera de nos admirations actuelles, de nos com-
plaisances, tout au moins, pour tels talents dont nous aurons consenti à
choyer les caprices, à encourager les écarts, à sanctionner môme les
plus vicieuses entreprises. Certaines jactances pittoresques dont, volon-
tairement ou non, nous aurons été les dupes ; certains fiévreux défis au
bon sens, où nous aurons cru voir des inspirations saines et des signes
de force, seront, à un moment donné, jugés pour ce qu'ils valent, et
perpétueront les souvenirs de notre indulgence, mieux sans doute que
les témoignages de notre sagacité. Qu'importe, après tout ? Si ces témoi-
gnages nous accusent, d'autres, plus sérieux et plus durables, défen-
dront victorieusement notre cause auprès de ceux qui nous suivront; si
la postérité vient à sourire de nos méprises, elle saluera en revanche
avec un pieux respect, elle achèvera de consacrer les titres que quelques
artistes de haute race se seront acquis sous nos yeux. h'OEdipc et la
Source sont de nature à nous rassurer sur ce point. A Dieu ne plaise que
ce soient là les seules preuves qui doivent survivre ! Mais ne restât-il,
des travaux de M. Ingres, que ces deux admirables figures, elles suf-
firaient encore pour glorifier le nom du maître et l'art de notre
temps ; elles suffiraient pour protester, à l'honneur de ce siècle, contre
les égarements de beaucoup d'entre nous et pour venger la dignité de
l'école française, compromise aujourd'hui par le crédit que nous attri-
buons aux faux prophètes, par notre complicité passive ou par nos
enthousiasmes malavisés.

HENRI DEL ABORDE.

(La fin au prochain numéro.)
 
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