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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 12.1862

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Nr. 4
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Blanc, Charles: Le cabinet de M. Thiers: les cabinets d'amateurs à Paris
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https://doi.org/10.11588/diglit.17331#0300

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

rai saisi, muet et immobile d'admiration. Ce que voyant, M. Thiers tra-
versa rapidement son cabinet, et vint me montrer avec enthousiasme le
bronze que je regardais... une maquette de Michel-Ange !

Esprit de feu, toujours prêt, toujours prompt à saisir une idée et
à l'exprimer, M. Thiers n'est jamais plus alerte que lorsqu'il est aux
prises avec une question d'art. 11 est bien le personnage que Y Histoire
de dix ans nous représente comme un homme d'imagination vive, aimant
passionnément les arts, fougueux dans ses fantaisies, pressé de jouir, et
capable d'oublier un instant les affaires d'État pour la découverte d'un
bas-relief de Jean Goujon.

Si on lui parle des arts, M. Thiers, en effet, n'hésite pas à quitter son
travail qu'il reprend avec une prodigieuse facilité. Toujours levé à cinq
heures du matin, travaillant sans relâche jusqu'à une heure, c'est dans
l'après-midi qu'il visite les musées ou les galeries particulières, et se livre
à ce qui a fait la passion de toute sa vie. Ayant dû beaucoup d'aisance
à la famille dans laquelle il est entré et à des ouvrages dont le succès
et le prix ont été sans exemple dans la librairie, économe, il le dit lui-
même, pour tout ce qui n'est pas objet d'art, il a pu composer ce cabinet
unique dont la pensée mérite d'être signalée aux vrais amateurs. « Si
j'avais voulu acheter des tableaux, nous disait M. Thiers, je serais perdu.
Ma petite fortune y eût été engloutie. J'en ai acheté trois ou quatre jolis,
mais de médiocre valeur, et je me suis arrêté. Au surplus, quand j'aurais
eu à ma disposition les richesses de nos plus grands financiers, je n'au-
rais pas fait beaucoup plus. Regardez, en effet, les collections célèbres
de notre temps : ces collections, qui ont coûté des sommes énormes, vous
donnent-elles une seule des sensations que vous avez éprouvées à Flo-
rence, à Rome, à Madrid, à Venise, à Dresde? Assurément non. Eh bien,
c'est le souvenir de tant de belles choses me poursuivant, me désolant
sans cesse, qui m'a inspiré l'idée de ce petit musée si complet dont je
me suis entouré. »

Le goût des choses d'art n'est donc pas, chez M. Thiers, une affaire de
mode, une manière d'amuser le tapis à ce grand jeu de la fortune politique
dont il sait les retours. Au milieu de ses triomphes, dans le temps où il
paraissait appartenir tout entier à la tribune et aux affaires, il trouvait du
loisir pour causer esthétique avec Chenavard, pour s'enquérir des pein-
tures de Sigalon, pour lire Vasari ou Léon-Baptiste Alberti. Que dis-je!
c'est par une brochure sur le Salon de 1822 que M. Thiers avait débuté
dans la littérature, absolument comme M. Guizot par son opuscule sur
le Salon de 1810. Avant que d'entreprendre Y Histoire de la Révolution
française, il avait écrit pour le Constitutionnel des pages pleines de sens
 
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