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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 21.1866

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Nr. 2
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Lagrange, Léon: Pierre Puget, [7]
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https://doi.org/10.11588/diglit.19278#0174

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PIERRE PUGET.

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faire un pareillement tant de lun que de l’autre, je ne le scaurois faire pour moins de
vint et sinq mille. Ainsi Monsieur on ne devrois pas espargner rien pour me contenter
a faire pacer ces deux caisses par les vois assurées puisque l’ouvrage est fait et que
difisilement on en pourra avoir du mesme eslan les intentions du Roy qu’il les agréé1.
Je ne puis que vous en protester, afin que je ne sois pas reprocliable de mes soins,
tenant copie de ma présente lettre. Notre Seigneur vous tiene en sa sainte grâce, et
suis avec un très profon respect,

Monsieur,

Yottre très humble et très obéissant serviteur.

P. PUGET.

Le bas-relief à'Alexandre et Biogène n’en arriva pas moins à Paris;
mais les nombreux raccords qu’on y remarque prouvent qu’il eut à subir
des avaries assez graves. Une fois remisé dans les magasins du Louvre,
on l’y laissa, sans qu’il pût accomplir sa dernière étape de Paris à Ver-
sailles. Il demeura là, à peu près ignoré, jusqu’au jour où l’appropriation
des salles des antiques permit de lui faire une place. Aujourd’hui, fixé
contre un des murs de la salle Puget, il se trouve admirablement exposé.
Et cependant ce n’est pas encore là ce que Puget aurait désiré pour son
œuvre. Il l’avait conçue et composée en vue de la lumière extérieure.
Aussi désignait-il comme l’emplacement le plus favorable la façade du
château de Versailles. Alors peut-être un rayon de soleil, tombant de
haut derrière la tête d’Alexandre eût projeté son ombre sur le Diogène,
Cet acteur essentiel, dont Eugène Delacroix a signalé l’absence, Puget ne
l’avait pas oublié, mais il l’attendait de la collaboration de la nature.

Des lettres que je viens de citer, quelque navrantes qu’elles soient,
il ne faudrait pas tirer une conclusion trop rigoureuse, comme ont fait la
plupart des historiens; Puget se plaint sans cesse, donc il est malheureux.
Puget réclame de l’argent, donc il est pauvre. Puget parle de s’expatrier,
donc il maudit une patrie qui le laisse mourir de faim et de misère.
Quand on écrit avec l’imagination, on peut trouver un certain plaisir
d’antithèse à faire d’un grand homme un pauvre diable. Pour nous, qui
nous efforçons d’écrire avec des faits, les lettres de Puget ne prouvent
qu’une chose, c’est qu’il n’était pas content. On ne lui payait pas son
dû, premier grief : deuxième grief, on ne paraissait pas très-avide de ses
œuvres. Son amour-propre souffrait autant que sa bourse. Quant à la
pauvreté, nous pouvons en juger sur pièces probantes. Voici d’abord un

\. Les éditeurs des Archives de l'art français ont donné la leçon que je reproduis;
mais je lirais plus volontiers : «... On en pourra avoir du mesme, estan les intentions
du Roy qu’il les agrée. »
 
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