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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 21.1866

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Nr. 5
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Bulletin mensuel: octobre 1866
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https://doi.org/10.11588/diglit.19278#0519

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BULLETIN MENSUEL

OCTOBRE 1866

LE CHRIST EN CROIX DU PALAIS DE JUSTICE.

'Attraction du moment., c’est un tableau, très-ancien par lui-même, en
réalité très-nouveau. Tous les Parisiens l’ont entrevu, bien peu le con-
naissent. Il suffit d’être entré une fois à la première chambre de la Cour
impériale, pour avoir remarqué contre le mur, au-dessus de la tête des
juges, dans un cadre de style ogival, une peinture d’aspect roussâtre où l’œil finissait par
distinguer un Christ en croix entouré de plusieurs personnages. La majesté de la justice
interdisait un examen plus approfondi et tenait la curiosité à distance. Aussi, le Christ
du Palais, plus familier aux plaideurs et aux avocats qu’aux artistes, invisible pour les
magistrats qui lui tournent le dos, est-il demeuré une énigme. M. Passavant a oublié
de s’en enquérir. M. Waagen l’a ignoré. Parmi les dilettantes de l’art et de l’érudition,
pas un peut-être ne serait en état de fournir à ce sujet un renseignement précis.

Aujourd’hui, le Christ du Palais daigne venir à nous. La fièvre de toilette qui tra-
vaille Paris a envahi le sanctuaire de la justice. L’antique Palais fait peau neuve, et le
vieux tableau, descendu de sa place consacrée, va recevoir un coup d’éponge. Dans
l’atelier qui l’abrite un instant, on peut le voir de près, on peut l’examiner tout à son
aise. Déjà M. Ingres l’a visité. Tous les amis de l’art voudront accomplir le même
pèlerinage.

La tradition, qui n’v va pas de main morte, mais qui va souvent à l’aveuglette, a
toujours rattaché au Christ du Palais le souvenir d’un grand maître de l’art. Avant la
Dévolution, elle disait Van Eyck; depuis, elle a dit Albert Durer. Il paraît assez difficile
de concilier les deux attributions. La première avait pour elle l’autorité d’un vieil on
dit. La plus récente figure en toutes lettres dans des catalogues et dans des livres.
Quand la grand’cbambre du Parlement cessa d’exister, c’est le Louvre qui hérita du
précieux Christ. Le savant Denon l’y inscrivit alors sous le nom d’Albert Durer. Du-
laure accepta les yeux fermés le catalogue officiel, et un historien d’Albert Durer, un
honnête Allemand, trop confiant en l’infaillibilité du Louvre, conserva à son héros ce
tableau qu’il n’avait pas vu.

Un coup d’œil suffit pour renverser le fragile échafaudage de Denon, Dulaure et
Heller, et pour reléguer parmi les vieilles lunes l’attribution de l’ancien directeur des
musées. A défaut des caractères du dessin et de l’exécution, le costume seul en dit assez,
La plupart des personnages sont chaussés de souliers à la poulaine.

L’attribution à Van Eyck se soutiendrait mieux. M. Taillandier, auteur d’une notice
insérée dans les Mémoires de la Société royale des Antiquaires de France en 1844-,
a réuni tous les arguments historiques à l’appui de cette attribution. Lui aussi avait pu
voir le tableau de près; car le Christ du Palais, réclamé en 1811 par le premier pré-
 
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