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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 21.1866

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Nr. 5
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Bulletin mensuel: octobre 1866
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https://doi.org/10.11588/diglit.19278#0521

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

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elle le fait vivre en 1371, date impossible ici, puisque le peintre a représenté le per-
sonnage de saint Louis sous les traits de Charles VU.

L’aspect du tableau ne résout rien à première vue, si ce n’est l’impossibilité de
l’attribution à Albert Durer. Sous le vernis roussâtre dont l’avait couvert JVI. de la
Roserie apparaît un coloris plutôt clair que chaud, un dessin d’une grande délicatesse,
d’une sincérité tour à tour savante et maladroite. Rien de plus fermement exécuté que
les têtes de Charlemagne et de saint Louis; et en même temps rien de plus naïf que
les petits personnages dont l’artiste a égayé ses plans secondaires. Le groupe placé
derrière saint Denis a quelques têtes d’un réalisme presque grossier; et cependant
le groupe des saintes femmes exprime, avec une distinction exquise, la sensibilité la
plus touchante. Une d’elles, qui soutient Marie évanouie, présente un détail caractéris-
tique. Son visage, incliné de trois quarts, est vu en raccourci et dans la demi-teinte,
sans que cette position compliquée pour la moindre atteinte à la correction du dessin
et à la justesse du ton. A moins que mes souvenirs ne me trompent, je n’aperçois dans
aucune œuvre de Jean Van Evck ni de Memling un mouvement de tète analogue. Enfin
le paysage, avec ses silhouettes tranquilles, ses tons légers et fins, ses masses domi-
nant les détails, ne paraît pas se rattacher directement à la manière flamande.

Au surplus, dans cette causerie rapide, il ne s’agit pas de discuter. Un fait se
présente : je l’expose avec les circonstances qui peuvent en déterminer la valeur. En
commençant, j’empruntais à la langue anglaise le mot d’attraction. Un autre mot de la
même famille rendra bien la pensée qui m’a poussé à parler du Christ du Palais. Je
voudrais provoquer une agitation autour de ce tableau d’une importance considérable
pour l’art et pour l’histoire. Je voudrais convier tous les amateurs à le voir, tous les
érudits à l’étudier, tous les experts à l’examiner de près. La restauration de M. Haro,
conduite avec une retenue, une conscience et un goût dignes des plus vifs éloges, nous
rend presque un chef-d’œuvre. Tous tant que nous sommes, qui nous efforçons d’épeler
l’alphabet de l’art, apportons à la solution du problème notre concours sympathique.
Il y a là une énigme à déchiffrer. Ouvrons une large enquête, et que chacun dise son
mot. La vérité est au bout.

Mais, pour que l’enquête soit fructueuse, il la faudrait générale, je dirai presque
universelle. Ce précieux tableau, rajeuni par une restauration intelligente, montrez-Ie
au grand public de Paris. Et puisque ce public doit se grossir, dans quelques mois,
d’une foule accourue des quatre coins du globe, ne laissez pas le Christ du Palais
retourner aux limbes solennels de la première Chambre avant d’avoir été vu de tous.
Hélas! l’exposition multiple de 1867 n’a pas su réserver une place pour les chefs-
d’œuvre de la peinture, seuls exclus de Y Histoire du Travail. Mais j’espère encore
que l’initiative privée voudra combler la lacune d’un programme incomplet, en ouvrant
quelque part une exhibition de tableaux de maîtres. Viennent alors tous les Waagen
d’outre-Rhin, tous les Eastleake d’outre-Manche, on les conviera, eux aussi, à la solu-
tion du problème, sans craindre que le «Silence, Messieurs! » d’un huissier d’audience
vienne couper court aux discussions.

LÉON LAGRANGE.

Le Directeur : ÉMILE GAL1CHON.

paris. —- imprimerie de j. ci.aye, rue saint-benoît, 7.
 
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