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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Nr. 2
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Gerspach, Edouard: La mosaïque absidale de Saint-Jean de Lateran
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https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0147

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138

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

la figure ne fut jamais, selon la Tabula Magna, « ni brûlée ni mutilée,
quoiqu’elle fût livrée sept fois aux flammes et qu’elle passât par la porte
sainte située sous le portique ». Outre l’inscription que nous avons re-
produite, rappelant que le pape Nicolas IY avait fait remettre la figure à
sa place primitive, il est un autre témoignage du même fait; les mo-
saïstes Torriti et Camerino, fiers et heureux d’avoir été admis à toucher
à l’image miraculeuse, relatent le fait dans une inscription en mo-
saïque située dans l’abside : « Il (le pape Nicolas IV) prend cette vénérable
figure du Sauveur qui avait apparu aux yeux des hommes, sans la briser,
là où elle était, où elle restait, et la remet dans la même situation. »

Les textes et la tradition sont donc d’accord : il y a toujours eu à
cette place une image en buste du Christ ; l’image a-t-elle toujours été
en mosaïque ? C’est fort probable. Mais a-t-elle toujours été la même ?
Malgré les textes, nous ne pouvons l’admettre. Les rédacteurs des inscrip-
tions ont voulu perpétuer la légende, et le soin qu’ils ont pris à diverses
époques de confirmer la tradition marque clairement l’intention.

Les yeux sont grands ouverts, le regard fixe et doux, les sourcils
minces; les pommettes des joues sont peu saillantes; les coins de la
bouche légèrement ouverte sont abaissés, la lèvre inférieure lippue; les
cheveux, épais, lisses et noirs, sont très abondants; séparés sur le front
par la raie médiane à la mode des Nazaréens, ils retombent en ondes sur
les épaules en encadrant le visage; la barbe est entière et forte, elle se
termine en pointe arrondie. La physionomie est empreinte d’une rési-
gnation triste et douce, elle porte quarante ans environ. La robe est
grise avec une légère bordure rouge brun, elle est découpée en carré et
laisse voir un cou puissant; un pallium d’or est posé sur l’épaule droite.
Le nimbe est un champ d'or plein et uni.

Ce caractère répond-il aux Christs figurés du vie siècle ? Non cer-
tainement. A cette époque régnait encore l’usage, remarqué dans les
catacombes, de représenter le Christ sous les traits d’un bel adolescent
imberbe; nous le trouvons ainsi dans les mosaïques de Ravenne, jeune,
souriant, heureux. Ce n’est qu’à partir du ixe siècle que les choses et la
religion s’assombrissent; le Christ perd sa grâce juvénile, il devient
triste d’abord, sérieux et sévère, puis souffrant, et dès le commencement
de cette période il paraît avec la barbe. 11 y a sans doute quelques
exceptions à cette règle, mais elles sont très rares, et, si l’on trouve des
Christs barbus antérieurs au ixe siècle, la barbe est alors toujours
fourchue. La coupe carrée du devant de la robe et le pallium se trouvent
avant le vic siècle, mais ils persistent longtemps après. Le nimbe devrait
être crucifère ou à croisillons, ces ornements étant réservés à la Divinité.
 
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