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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Nr. 3
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Havard, Henry: Les derniers concours de la ville de Paris
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https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0293

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280

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Le concours de la ville de Paris dont nous nous occupons aujourd’hui a été ouvert
le 28 janvier 1880 à l’École des beaux-arts. C’est de beaucoup le plus considérable
de tous ceux auxquels nous avons été conviés jusqu’à ce jour.

Importance et nombre des sujets, tout se trouvait réuni pour en faire une épreuve
exceptionnelle. Dix-sept tableaux, tous de grandes dimensions, et parmi lesquels
figurent deux plafonds et deux longues frises, l’une mesurant trente mètres, l’autre
quarante mètres de développement : certes, il y avait là de quoi tenter la verve de nos
jeunes artistes. Il ne faut donc pas s’étonner que cent neuf concurrents aient répondu
à l’appel de la ville.

De tous les ensembles demandés, celui de la mairie du XIX0 arrondissement se
trouvait être le plus important. Il s’agissait d’une salle de mariage dont la décoration
comprend un plafond, six panneaux de 4rn,'IO de hauteur sur une largeur variant de 3
à 6 mètres, et trois dessus de porte.

Une salle de mariage! certes, voilà une pièce qu’il nous faut décorer gaiement.
Les dispositions matrimoniales de nos contemporains ne sont point telles qu’on ne
doive les encourager par une agréable perspective. On pouvait donc s’attendre à un
débordement d’images aimables et joyeuses. Il n’en arien été malheureusement, et cela
nous a semblé tenir à une préoccupation singulière. Nos jeunes artistes ont été évidem-
ment touchés par cette pensée que le conseil municipal, leur juge, était grand ennemi
des allégories; aussi se sont-ils efforcés de symboliser les actes de la vie civile en-une
série de représentations de la vie contemporaine. Grande nouveauté assurément et
problème difficile. L’existence moderne, en effet, n’est pas toujours empreinte d’une
débordante gaieté. C’est pourquoi, sous la brosse de nos jeunes innovateurs, la mo-
dernité a bien vite tourné au réalisme et le réalisme à la tristesse. Au lieu de sujets
joyeux, on nous a peint des drames.

Ainsi, voilà MM. Gervex et Blanchon, deux artistes de valeur, qui, oubliant qu’on
leur demandait non pas des études de mœurs ni la représentation d’un fait accidentel,
mais de symboliser notre vie civile, ont cru devoir personnifier l’existence municipale
en nous peignant, avec un talent très réel et un sentiment très vrai d’observation, une
École du soir, un Bureau de bienfaisance et d’autres épisodes encore, tout aussi
peu réjouissants et capables d’assombrir les fronts les mieux disposés aux pensées
sereines.

M. Georges Bertrand est encore plus exclusif ; son tempérament de coloriste l’éloigne
des images brunes et creuses. Il fait resplendir les harmonies de sa palette dans des
oppositions brillantes et vigoureuses, mais ses sujets sont des plus lugubres. Faut-il
donc exiger que les jeunes filles se marient en ayant sous les yeux les douleurs de l’en-
fantement ou les affres de la mort, et que les devoirs du mariage doivent être figurés à
leurs yeux par un mari haranguant sa femme sur un esquif en perdition?

M. Glaize n’est guère mieux inspiré. C’est au prolétariat qu’il est allé demander ses
sujets, et il n’a pas donné la préférence aux meilleures impressions de la vie prolétaire,
car ses personnages ont un parfum d’Assommoir peu fait pour disposer les fiancés au
mariage.

Dans des données plus calmes, je mentionnerai les compositions de M. Bin, et je
trouve dans les esquisses de M. Debat-Ponsan d’heureux motifs empruntés à la pre-
mière République. Mais, malgré cela, il serait imprudent de prétendre que nos jeunes
concurrents aient trouvé la formule définitive de la décoration moderne.

Disons bien vite que les disciples dç l’archaïsme n’ont point, eux non plus, donné
 
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