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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Nr. 4
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Müntz, Eugène: Les maisons de Raphael à Rome: d'apres des documents inédits ou peu connus
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https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0375

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358

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Vatican, quoique sur la rive opposée. Mais, avant cl’aller plus loin, lais-
sons la parole au notaire chargé de dresser l’acte d’acquisition :

« Le 24 mars 1520, les chanoines de Saint-Pierre confirment la ces-
sion faite par Leonardo Bartolini au seigneur Raphaël d’Urbin, peintre,
de ses droits à la location d’un terrain appartenant au susdit chapitre.
Ce terrain est situé à côté de l’église Saint-Biaise délia Pagnotta, dans
la région du Pont1; il est bordé de tous côtés par des rues ( juxta ab
omnibus lateribus vins publiais) et mesure 217 cannes et demie, mesure
romaine. La cession a lieu à titre d’emphythéose perpétuelle, avec cette
condition expresse que le seigneur Raphaël construira sur le terrain en
question une maison destinée à lui servir d’habitation (dictus dominas
Raphaël... promisit... indicto terreno domos habitabiles ipsius domini
Rapluielis suorumque heredum et successorum propriis sumptibus et
expensis construere et fabricare, ac construi et fabricari facere). Dans
le cas où ces constructions ne seront pas élevées dans un délai de cinq
ans, le terrain tout entier doit faire retour au Chapitre (in eventum in
quem dictus dominus Raphaël suique heredes et successores in domibus
dicto terreno fiendis per quinquennium négligentes fuerint et illas facere
cessuverint). Le cens annuel est fixé à SO ducats, de 10 carlins chacun,
payables le jour de la fête de saint Pierre et de saint Paul. »

Ainsi qu’on vient de le voir par ce dernier chill're, il s’agissait d’une
propriété assez considérable, puisque la location seule du terrain s’éle-
vait à la somme de 80 ducats d’or, représentant au denier vingt un
capital de 1,500 à 2,000 ducats2. 11 est vrai que la via Giulia passait
alors pour le plus beau quartier de Rome. Commencée par Jules II, cette
rue, qui aujourd’hui encore offre un caractère de noblesse et d’élégance
si saisissant, renfermait plusieurs édifices construits par Bramante. C’était
la résidence des grands seigneurs, des prélats, des banquiers. Raphaël
pouvait désormais marcher de pair avec ces favoris de la fortune.

La date du contrat offre un intérêt particulier. Ce document est du
24 mars 1520; le 6 avril suivant, Raphaël expirait. On voit dans quelles
dispositions d’esprit l’artiste se trouvait presque à la veille de sa mort.
L’avenir lui apparaissait sous les couleurs les plus riantes. Lui qui avait
embelli, transfiguré le séjour de tant de grands personnages, songeait
enfin à se créer une demeure digne de lui. Riche, au comble de la gloire,
il aspirait, je ne dirai pas au repos, — il était trop jeune pour se con-

1. En 1316, l’architecte Antonio da San-Gallo et l’orfèvre Caradosso achetèrent
également des terrains situés à côté de Saint-Biaise.

2. D’après une note du Raphaël de Passavant (t. Ier, p. 283), le ducat d’or aurait
aujourd’hui une valeur de 60 francs. Celte évaluation, toutefois, me paraît exagérée.
 
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