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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Nr. 6
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Bonnaffé, Edmond: Physiologie du curieux, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0511

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490

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

le choix; mais la beauté n’est pas le but exclusif de leur recherche;
elle se rencontre là d’occasion, perdue dans la foule, elle n’occupe pas
la première place et figure à son rang, dans sa case, avec son éti-
quette.

Le curieux d’objets d’art ne cherche pas la série, il ne vise que le
beau ; il ne classe pas, il écréme.

Le curieux de science et d'histoire est toujours un savant ; le curieux
d’art l’est quelquefois. Le premier a besoin d’érudition dans sa spécia-
lité, pour apprendre à déterminer les époques, les catégories, les espèces.
Le second peut s’en passer à la rigueur; avec du goût, du coup d’œil,
une longue expérience et le sentiment artiste, il en sait assez pour
choisir un bronze de maître, une médaille exquise, une toile imma-
culée.

Il est l’amateur par excellence, c’est-à-dire l’amoureux ; il aime l’art
sous toutes les formes, à tous les âges et chez tous les peuples. 11 l’aime
jeune, vivant, actuel, dans son printemps et sa fraîcheur; il l’aime
encore vieilli, ennobli par le temps; il l’aime jusqu’au bout, dans ses
derniers lambeaux marqués de l’empreinte auguste des siècles, dans sa
rouille sacrée, dans ce je ne sais quoi cl’inachevé que donne la ruine. Un
jour, le Poussin, rencontrant un étranger qui venait à Rome acheter des
antiques : « Tenez, dit-il en ramassant une poignée de sable mêlé de
ciment, de porphyre et de marbre, emportez cela pour votre musée et
dites ’i « Ceci est l’ancienne Rome. »

Millin veut que l’amateur possède « l’érudition historique, des con-
naissances acquises dans une vie retirée, et l’équilibre de l’âme ». Millin
est exigeant. Couvreur n’avait ni érudition ni connaissancè acquise ; on
peut même affirmer que les éléments de la civilité puérile ne lui étaient
pas familiers. Sa vie retirée s’écoulait dans le tumulte de l’Hôtel des
ventes ou dans sa boutique toujours pleine. Dirai-je qu’il avait ce flair
singulier qui permet à certains animaux de découvrir des truffes? Qu’im-
porte après tout, pourvu que ce soient des truffes ? et Couvreur a passé
sa vie à en trouver.

Octave est un voyant; il connaît le signe mystérieux, invisible aux
profanes et toujours le même, que depuis six mille ans le génie imprime
invariablement sur ses œuvres; chez lui tout est délicat, excellent, trié
sur le volet. Parlez-lui d’archéologie, de textes, de monogrammes, il
vous dira que l’érudition n’est pas son affaire, qu’elle est utile, salu-
taire, rassurante, qu’il est bon de l’avoir, mais, qu’on peut s’en dis-
penser. L’amoureux n’est pas tenu de produire un diplôme de médecin.
 
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