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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Nr. 6
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Chennevières-Pointel, Charles Philippe de: Le salon de 1880, 2
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https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0540

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518

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

en 1564, devant le maire et les jurats. M. Priou a donné à son tableau
une belle et pompeuse ordonnance, et la coloration en est très riche et
très montée de ton, comme il sied à une cérémonie d’apparat. Les têtes
et les mains des personnages sont dessinées d’un grand goût; en somme,
c’est l’une des meilleures toiles de ce genre qui soit au Salon ; elle ira
rejoindre à Bordeaux, dans la Chambre de commerce, le tableau de
M. Dupain, le Droit de sortie, qui figura avec tant d’honneur à l’Expo-
sition de 1878. De ce même M. Dupain, nous voyons au présent Salon
une peinture importante, empruntée, cette fois encore, à l’histoire de la
Gironde, son pays. C’est la Mort de Pélion et de Buzot le soir du 30 prai-
rial. Il se passe là, sur la lisière d’un petit bois., au coin d’un champ
de blé mûr pour la moisson, à l’heure douteuse du soleil couchant, un
drame horrible : les deux Girondins proscrits, traqués de ville en ville
par le comité révolutionnaire, amaigris par la faim, les vêtements en
lambeaux, se sont décidés à se brûler la cervelle, et luttent contre les
chiens quasi sauvages des métairies voisines, qui vont dévorer leurs
cadavres. Jamais le jeune peintre du Bon Samaritain n’a été mieux
maître de son dessin solide et de bonne école, de sa brosse large et vigou-
reuse, que dans le rendu de cette scène dont la terreur semble empruntée
au Dante, dans ce Pétion étendu raide sur les blés piétinés, dans ce
Buzot qui se débat, blessé à mort et couvert de sang, contre la férocité
de ces demi-loups enragés. Cherchez-vous un homme qui vous traduise
les fastes révolutionnaires dans leur implacable énergie, le voilà.

Rien au monde de plus bizarre que le résultat produit dans l’esprit,
des artistes par le désir d’être agréables à la République, arbitre aujour-
d’hui triomphant et souveraine dispensatrice des commandes et des
acquisitions. Ces jeunes peintres, sincères et droits, ouvrent l’histoire
de la Révolution; ils y cherchent naïvement des figures et des scènes
favorables à l’exercice de leur pinceau; ils y trouvent quoi? De singu-
liers sujets, en vérité, et point tant flatteurs pour la maîtresse du jour :
M. Lix, Camille Desmoulins au Palais-Royal, provoquant les citoyens à
l’émeute; — M. Betsellère, les soldats de Dumouriez venant insulter et
menacer leur général dans sa propre tente; —M. L. Mélingue, Marat
écrivant tranquillement dans son lit ses listes infâmes de proscription;
— M. G. Cain, le buste du même Marat, placé aux piliers des Halles, en
présence des attroupements ennemis de muscadins et d’argousins. Il n’y
manque que cette fête de la déesse Raison, prêtée par M. Muller à la
salle des aquarellistes, pour l’œuvre des écoles libres, et représentant la
Maillard portée en triomphe dans le chœur de Notre-Dame, sur les
épaules de la canaille avinée, au hurlement des hymnes sacrilèges. La
 
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