Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 33.1886

DOI Heft:
Nr. 4
DOI Artikel:
Hymans, Henri: Correspondance de Belgique
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.19427#0383

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
348

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Dresde, sur la Baigneuse de la National Gallery et sur la Bethsabée du Louvre,
création que M. Lacaze envisageait comme la perle de sa riche galerie, l’échantillon
le plus splendide de ce qu’il nommait la « manière féroce » de Rembrandt.

Le peintre a 47 ans; douze années se sont écoulées depuis la Ronde de nuit, el
s’il était possible de douter des progrès qui, dans l’intervalle, doivent s’accomplir
encore, il nous suffirait, au musée de Bruxelles même, de porter des regards sur
l’admirable portrait d’homme, daté de 1641, et que, seul, Rembrandt pouvait être
en état de surpasser en excellence.

Sans doute, les sept années qui nous séparent encore des Syndics vont ajouter
à la liberté de l’allure, mais non point aux perfections de faire, et puisqu’il s’agit
d’un portrait de femme, nous pouvons juger comme arrivées à leur plus haut
degré d’épanouissement les exigences picturales, en ce qui concerne l’ampleur de
la touche et la franchise de l’allure.

On n’a point fait mystère du prix d’achat de cette œuvre : cent mille francs, et
ce n’est pas un mince denier, sans doute. Peut-être va-t-on redire qu’il est loisible
à un particulier de se passer de telles fantaisies, qu’un État a d’autres devoirs à
remplir. J’ose croire que ceux qui parlent de la sorte se trompent du tout au tout.
Il ne s’agit pas de fantaisies à satisfaire, mais de l'intérêt majeur, — étant donné
qu’un musée est chose d’utilité publique, — qu’il y a à montrer aux générations
futures la puissance du génie dans un ordre de travaux où tant d’hommes cherchent
et continueront, il faut l’espérer du moins, à chercher la perfection.

C’est un précepte de marchand que l’œuvre acquise d’emblée est toujours la
moins chère, et l’expérience, je crois, le confirme.

D’une simplicité qu’il faudrait qualifier d’austère s’il s’agissait d’un Philippe de
Champagne et d’un Van der Helst, le nouveau Rembrandt de Bruxelles captive par
la merveilleuse harmonie des colorations jointe à une intensité de vie que le
maître lui-même a rarement poussée plus loin. Je doute qu’on ait été au delà dans
l’art suprême de dissimuler l’art. La vive lumière ne semble pas plus atténuée que
l’ombre n’est poussée à outrance ; cependant tout se tient. L’idée d’opposition heurtée,
qui, dans l’esprit de tant de personnes, caractérise le vrai Rembrandt, le mystère
même, est absolument écartée. La face et les mains sont enlevées en pleine
lumière et les contours se fondent comme dans la nature, sans aucun recours à ces
accents qui, chez Rembrandt lui-même, viennent accuser parfois les reliefs.

En somme, même dans ses eaux-fortes, le maître n’a point fait preuve d’un
tact plus exquis d’opération, et l’entreprise de reproduire une telle page a bien
de quoi tenter le graveur.

Pour être complet j’aurais à dire l’origine du tableau; malheureusement les
renseignements que j’ai pu me procurer à cet égard sont des plus vagues. On
m’affirme que le portrait appartint à Louis XVIII et passa ensuite dans une
collection anglaise. Je donne le renseignement pour ce qu’il peut valoir; les
vendeurs ne tiennent pas toujours à faire connaître la provenance de leur
marchandise. J’ai simplement à faire remarquer que mes recherches pour rencontrer
une mention quelconque de ce Rembrandt en Angleterre ont été absolument
infructueuses.

Le Musée de Bruxelles ne possédait rien encore de Van Beyercn; il vient de se
procurer un fort joli spécimen du maître, — authentiqué par un monogramme, —
et d’une facture moins vigoureuse que les amas de poissons et de victuailles auxquels
 
Annotationen