Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (2. Pér. 34.1886)

ANDREA MANTEGNA

([cinquième article *. )

uand, au retour de son voyage à Rome,
Mantegna rentra dans son atelier de
Mantoue, il avait près de soixante ans;
mais, pour de pareils inventeurs, la vie
n’est qu’une succession de jeunesses,
différentes parce qu’elles sont marquées
par plus de science, mais semblables
en ce sens que l’énergie morale et l’en-
thousiasme restent toujours aussi viva-
ces. Le sentiment du beau geste, le goût
de la draperie à l’antique, la ferme vo-
lonté d’écrire la forme avec un instrument d’airain se retrouvent
dans certains dessins achevés par le maître peu de temps après son
retour à Mantoue. Le plus célèbre de ces dessins est celui que Yasari
a possédé, la Judith conservée aujourd’hui au Musée des Offices.
On considère comme autographe la signature en lettres majuscules
qui y figure et la date qui fixe au mois de février 1491 l’exécution
de ce chef-d’œuvre. Judith y est représentée debout, en compagnie
d’une esclave mauresque, et mettant dans un sac la tête d’Holopherne.
Yasari nous apprend que cette Judith qui, pour lui, est moins un
dessin qu’une opéra colorita, est faite en clair obscur d’après un
procédé passé de mode et qui consiste à utiliser les blancs du papier
pour obtenir les accents de la lumière. C’est un des plus beaux des-
sins de la collection florentine.

1. tV°y- Gaxelte des beaux-arts, 2e période, t.
t. XXXIV, p. 5.

XXXIII, p. 3, 177 et 480;