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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 34.1905

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Germain, Alphonse: Jean Seignemartin: petits maîtres oubliés
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https://doi.org/10.11588/diglit.24816#0148

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132

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

d’abord élève d’Ingres, devint disciple de Delacroix, et dont on peut
voir à Paris, en Saint-Germain-l’Auxerrois, une composition aux
tonalités harmonieuses1. Un peintre de Lyon ne pouvait se mettre
alors à meilleure école pour former sa vision et se préparer aux
contextures sérieuses. Guichard reconnut bien vite les rares qualités
de Seignemartin ; il l’aima paternellement, l’entoura d’une sage sol-
licitude et l’initia, dans toute l’acception du terme, à l’art de Dela-
croix. C’est surtout de ce dernier que notre débutant ressentit l’in-
fluence. Il l’admirait éperdument. S’il étudia Rubens avec une vive
dilection, il n’élut jamais d’autre guide esthétique que l’auteur des
Croisés à Constantinople et de la Lutte de Jacob.

Chercheur intelligent, il s’appliqua aussi à pénétrer l’art de Ver-
nay, près duquel il vécut quelque temps, et dont les symphonies
achevèrent peut-être de lui révéler sa propre âme d’artiste, de lui
rendre précises bien des choses qu’il sentait confusément. En tout
cas, il était capable de lire dans les orchestrations picturales de ce
magicien; plus d’une, sans doute, l’encouragea dans ses audaces de
coloriste; plus d’une, notamment parmi celles des paysages, lui fil
comprendre, on peut le croire, que, pour représenter ses visions
avec art2, il devait, non pas inventer une gamme de teintes irréelles,
mais exalter les réalités, non pas dénaturaliser, mais choisir dans la
nature de somptueux éléments, de merveilleux accords, et ne jamais
porter les taches d’un effet à leur maximum d’intensité, de chatoie-
ment ou de transparence sans en respecter scrupuleusement les
valeurs, qu’il s’agisse d’un plein air ou d’un décor d’intérieur. Cette
importante loi des valeurs, en bon adepte de Delacroix, il la tenait
en haute estime et la pratiquait fidèlement3.

C’est parce qu’elles ont été combinées et accomplies d’après les
principes précités que certaines témérités de Turner restent sédui-
santes, que maintes féeries de Monticelli et maintes rêveries de
Yernay enchanteront jusqu’à leur dernier jour; elles élèvent au-
dessus du plan matériel sans sortir du terrestre, sans transporter
dans ces mondes chimériques que même l’halluciné William Blake
n’a pu rendre acceptables.

1. C’est une descente de croix d’un noble aspect, que malheureusement on a
recouverte d’un vernis par trop luisant. Elle orne une paroi du transept près de
la sacristie.

2. La plupart des paysages de Vernay sont des interprétations de visionnaire.

3. On peut voir à ce sujet un passage typique dans l’une de ses lettres (ou-
vrage cité, p. 23).
 
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