Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 34.1905)

CHARLES EPHRUSSI

Ce fut, pour tous ceux qui le connaissaient, une stupeur et un
chagrin profonds que d’apprendre, vers la fin du mois de septembre
dernier, la maladie soudaine, puis la mort de l’homme aimable et
bon, de l’intelligence d’élite qu’était Charles Ephrussi. Il avait
réuni dans la société parisienne, surtout dans le monde des arts et
des lettres, des amitiés nombreuses, tout naturellement suscitées
par le charme et la sûreté de son commerce, l’élévation de son
esprit, la délicatesse de son cœur. Il suffisait de l’approcher pour
être séduit par la distinction de ses manières, conquis par son
affabilité, l’attrait de sa conversation fine et instructive, son carac-
tère généreux et enthousiaste, et, par-dessus tout, cette infinie
bonté qui restera le trait distinctif de sa physionomie et qui le
faisait se dévouer avec tant d’abnégation à ceux qu’il aimait.

Aussi, rarement obsèques furent plus touchantes, par l’affliction
sincère qui se lisait sur les visages des assistants; tous sentaient ce
qu’ils perdaient en celui qui les avait quittés : un cœur affectueux,
un esprit qui, ainsi que l’écrivait le marquis de Chcnncvières d’un
des plus chers amis de Charles Ephrussi, le vicomte Both de Tauzia,
_« avait appliqué à une carrière où ne sont requis que des instincts
de goût et d’intelligence spéciale, bien vite acquis par sa délicatesse
de nature, les qualités et la conduite du plus galant homme ».

Comme amateur d’art et historien, non moins que comme homme
privé, Charles Ephrussi, en effet, avait conquis une situation privi-
légiée faite d’estime et de respect, et le couronnement en avait été
la direction de cette Gazette où, dès l’âge de vingt-six ans, il faisait
ses débuts.

XXXIV. — 3” PÉRIODE.

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