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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 34.1905

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Nr. 5
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Silvy, Léon: L' origine de la "Vierge de miséricorde"
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https://doi.org/10.11588/diglit.24816#0446

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402

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

« Cette vision qui nous a été accordée à nous les premiers prouve
combien l’ordre très saint de Citeaux te plaît : qu’il reste donc tou-
jours couvert de ta protection, lui qui s’est consacré à loi avant
les autres, Vierge bienheureuse. »

L’intérêt du second vers est évident : s’il disait vrai, nous con-
naîtrions l’origine du motif de la Vierge au manteau, restée jusqu'à
ce jour ignorée. Ce serait une vision (ostensio) dont l’ordre cister-
cien aurait été favorisé le premier. Jean de Cirey voulait reconsti-
tuer le trésor moral de son abbaye et réunir tout ce qui, dans les
traditions ou les bibliothèques, était de nature à raffermir l'ordre
déclinant, au temporel comme au spirituel. On trouve dans son re-
cueil des chartes, des nomenclatures de saints et des poésies : le sou-
venir de cette vision grandiose devait être trop vivace pour qu’elle
ne méritât pas une place d’honneur.

Mais Jean de Cirey ne s’explique pas autrement. Il fallait donc
retrouver l’histoire de cette vision dans une chronique, et la dater.
Après quelques recherches, je fus assez heureux pour la rencontrer
dans le Dialogus miraculorum de Césaire de Heistcrbach La voici
brièvement : « Un moine cistercien, fort dévot à Notre-Dame, ravi
en extase, contempla les gloires célestes : il voyait l’Église triom-
phante, les Anges, les Prophètes, les Apôtres... et distinguait aussi
des Chanoines réguliers, des Prémontrés, ou des Clunisiens. Mais il
n’apercevait personne de son ordre. Inquiet, gémissant, il se tourna
vers la Bienheureuse Mère de Dieu : « Qu’est-ce donc? Très Sainte
Dame, dit-il, je ne vois pas ici un seul Cistercien. Vos serviteurs
si dévots seraient-ils exclus d’une pareille béatitude? » Le voyant
troublé, la Reine du ciel lui répondit : « Je les aime tant, mes
Cisterciens, que je les couve sous mes bras. «Ouvrant alors le man-
teau dont elle paraissait revêtue, et qui était d’une grandeur extra-
ordinaire, elle lui montra une foule innombrable de moines, de con-
vers et de religieux. Ivre de joie, le moine revint à lui et rendit
grâces, puis raconta à son abbé ce qu’il avait vu et entendu. Celui-
ci, au chapitre suivant, rapporta le prodige aux abbés assemblés,
qui en furent enthousiasmés, et ainsi s’accrut encore leur amour de
la Sainte Mère de Dieu. »

Césaire de Heisterbach écrit son Dialogus en 1221, et nous dit
que le fait se passa « il y a quelques années » [ante pocos a?mos).
Manrique, qui rédigea les annales de l’ordre au xvue siècle, se crut

1. Cf. B. Tissier, Bibliotheca patrum cisterciensis. Bonnefontaine, 1660, tome I.
Cæsarius Heisterbacensis, Vit, 58, page 222.
 
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