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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 34.1905

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Nr. 6
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Koechlin, Raymond: Quelques ateliers d'ivoiriers français aux XIIIe et XIVe siècles, 2, L'atelier des tabernacles de la Vierge
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https://doi.org/10.11588/diglit.24816#0518

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

reflète dans leurs imitations. Si dans le Couronnement le Christ a
perdu beaucoup de son antique majesté, la Vierge a la grâce chaste
et décente d’une jeune épousée; à la Crucifixion, le pathétique s'est
affaibli sans doute, et peut-être est-ce la force de la tradition qui
soutient l’imagier plus que son propre génie, mais, n’ayant plus de
passion, il lui reste le goût qui y supplée; quant au Jugement dernier,
il serait vain assurément d’y chercher aucune imagination tragique :
c’est sans conviction profonde que cette aimable Vierge et saint
Jean-Baptiste implorent un Christ médiocrement formidable; tou-
tefois la composition reste harmonieuse et noble. Les volets eux-
mêmes, où les scènes habituelles demeurent figurées par des per-
sonnages qui n’ont rien d’imprévu, sont traitées avec soin, et les
ordinaires formules, sans se dissimuler, ni surtout se renouveler,
font oublier leur banalité à force de bonne grâce. L’art du commen-
cement du xive siècle est tout entier dans ces jolis monuments :
tempéré, modéré, il préfère le fait divers au drame, et si parfois on
peut lui reprocher de traiter un peu le drame en fait divers, il rem-
plit bien son idéal; c’est la grâce qu’il a recherchée, une grâce où
se sent encore la gravité de l’art du siècle précédent, une grâce un
peu trop dépourvue d’imagination créatrice dans les grands sujets,
mais infiniment aimable dans les moindres, et qui a produit des
œuvres d’une délicatesse et d’un charme parfaits.

Malheureusement ce sont là des qualités qui ne durent guère, et si
elles apparaissent pleinement encore dans ces monuments, la for-
mule envahit peu à peu les autres, la vie se retire bientôt et nous
n’avons plus enfin que des représentations soit banales et sans
style, soit minaudières, soit grimaçantes. Combien de temps s’est
prolongé l’atelier? Il est difficile de le dire; les architectures de
convention ne permettent guère de dater nos monuments, puisque
des motifs subsistent dans les arts mineurs de longues années, un
siècle parfois, après que la mode en a disparu des grands édifices ;
et, quant au style des figures, il ne saurait nous donner des ren-
seignements précis. On peut croire pourtant qu’une pièce telle que
le grand polyptyque de l’ancienne collection Soltykoff1, aujourd’hui
au South Kensington (n° 140-06), doit dater de la seconde moitié du
xive siècle, et l’on se rend compte à la voir du chemin parcouru. A
vrai dire, après l’avoir attribué à l’Italie, on le donne présentement

1. Repr. au catalogue de la vente. Un polyptyque très semblable, qui a figuré à
la vente Steinen 1886 (n° 23 du catalogue), se trouve aujourd'hui à Berlin dans la
belle collection de Mme Hainauer (n° 141 du cat. Bode).
 
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