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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 39.1908

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Nr. 2
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Roche, Denis: Nicolas Rœhrich: artistes contemporains
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https://doi.org/10.11588/diglit.24866#0163

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

pourpre; quelques voiles sur la mer, peintes sans recherche de
joliesse, la robe du vieillard, les crânes de chevaux, font des notes
d’un blanc substantiel et rompu.

La mer profonde et dure de l’extrême Nord, la nappe terne ou
luisante d’un des mille lacs qui, comme les lacs légendaires de Fin-
lande, parsèment les entours de la Baltique, ou l’étal des larges
fleuves boueux sont rarement absents des toiles de M. Rcehricb.
Deux toiles de l’année 1901-1902 — si féconde pour le peintre —
furent, entre autres, singulières et révélatrices dans la série où les
eaux jouent un rôle. L’une, sous le nom à'Expédition de saint
Vladimir contre Korsoune, est un fouillis de barques Scandinaves,
proue dressée en col d'oiseau fantastique, voile levée, boucliers pen-
dants aux bordages, qui attendent, menaçantes, rangées contre la
rive d’un fleuve. L’autre, dans un claquant vol de mouettes, montre
sur le bleu uni d’un fleuve l’arrivée en file indienne de quelques-
uns de ces mêmes bateaux, appareillés de rouge: Hôtes d'outre-mer,
c’est le nom dont la vieille Russie appelait les premiers navigateurs
qui vinrent commercer avec elle. Dans le Combat, une toile toute
rouge des feux du soir, au vaste ciel, M. Rœhrich a fait glisser sur
les vagues dansantes, pareils à d’infernales poules d’eau, ces vieux
bateaux qui lui sont chers. 11 a songé aussi aux chantiers sur lesquels
on les construisait. C’est un tableau suggestif. Dans les grosses
membrures, on voit s’affairer des sayons blancs; les troncs d’arbres
disparaissent à plaisir ; le col d’oiseau à la proue est dressé et colo-
rié comme dès l’origine, et, infailliblement, un ornement, lignes
brisées et cercles, court au bordage, non moins essentiel dans l’idée
des constructeurs que le planchéiage extérieur de la cale.

Comme il avait peint ses Slaves construisant leurs bateaux,
M. Rœhrich les peignit construisant une ville : chantier plus vaste,
parsemé de bastions et de tourelles, et dans lequel s’agitent de
mêmes taches blanches. Toute une page de la vie ancienne (que
l’artiste a eu bien soin, comme il fait coutumièrement, de ne dater
par aucun détail spécial), immémoriale et d’hier, antéhistorique ou
pouvant se rapporter aux Moscovites d’Ivan IV élevant une redoute, se
trouva retracée avec la réalité et comme la brutalité d’une peinture
faite aujourd’hui d’après nature. Ce fut toute une affaire à Moscou
quand la galerie Trétiakov acheta cette toile d’assez grandes dimen-
sions : chacun doit y voir maintenant ce qu’elle est en fait : une
feuille historique, profonde et intense, du passé russe. En une autre
toile, M. Rœhrich peignit à nouveau cette ville, terminée, paisible,
 
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