GAZETTE DES BEAUX-ARTS
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belle que telle autre. Dans toutes, Jeanne y apparaît comme une
hostie diaphane et radieuse. Mais nulle part peut-être elle n’est aussi
belle, aussi pure que dans la double feuille du Sacre, à genoux der-
rière son roi, la paupière baissée, le front appuyé à la hampe de son
oriflamme, toute vêtue de blanc et couverte de lys.
Le Saint François d'Assise est la dernière œuvre de Maurice Boutet
de Monvel. Il y travaillait lorsqu’il mourut ; et elle n’est pas achevée.
Depuis longtemps ce sujet le tentait. Voici trois ans, sa fragile santé
lui laissa quelque répit, et il put partir pour l'Italie. Il gagna
l’Ombrie, fidèle décor de ses rêves, où rien ne le déçut. Ses yeux
privilégiés surent voir devant les oliviers, au pied des cyprès, le
fantôme du saint qui y habite encore. « Douceur franciscaine » :
expression que l’usage a abîmée, et qui, hélas! n’est plus qu’un
<( cliché ». Employons-la cependant ici, car elle convient à l’œuvre,
qui joint la familiarité «à la grâce, le respect à l’amour, et qui esl
toute baignée de foi. Le Saint François n’a pas, pour nous toucher,
toutes les fortes raisons qui font pour nous, de la Jeanne d'Arc, une
sorte de bréviaire. Mais on y trouve tout ce que Boutet de Monvel a
aimé : les enfants et les bêtes, les ciels purs et tins comme des
regards, et ces regards qui ne cachent rien d’une âme sans ombre
et sans amertume : l’âme même de Maurice Boutet de Monvel,
qu’une troupe de mésanges accompagna sans doute jusqu’au Paradis,
où le durent fort tendrement accueillir la sainte et le saint dont il
avait fait ses patrons.
JEAN-LOUIS Y A U n O Y E R
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belle que telle autre. Dans toutes, Jeanne y apparaît comme une
hostie diaphane et radieuse. Mais nulle part peut-être elle n’est aussi
belle, aussi pure que dans la double feuille du Sacre, à genoux der-
rière son roi, la paupière baissée, le front appuyé à la hampe de son
oriflamme, toute vêtue de blanc et couverte de lys.
Le Saint François d'Assise est la dernière œuvre de Maurice Boutet
de Monvel. Il y travaillait lorsqu’il mourut ; et elle n’est pas achevée.
Depuis longtemps ce sujet le tentait. Voici trois ans, sa fragile santé
lui laissa quelque répit, et il put partir pour l'Italie. Il gagna
l’Ombrie, fidèle décor de ses rêves, où rien ne le déçut. Ses yeux
privilégiés surent voir devant les oliviers, au pied des cyprès, le
fantôme du saint qui y habite encore. « Douceur franciscaine » :
expression que l’usage a abîmée, et qui, hélas! n’est plus qu’un
<( cliché ». Employons-la cependant ici, car elle convient à l’œuvre,
qui joint la familiarité «à la grâce, le respect à l’amour, et qui esl
toute baignée de foi. Le Saint François n’a pas, pour nous toucher,
toutes les fortes raisons qui font pour nous, de la Jeanne d'Arc, une
sorte de bréviaire. Mais on y trouve tout ce que Boutet de Monvel a
aimé : les enfants et les bêtes, les ciels purs et tins comme des
regards, et ces regards qui ne cachent rien d’une âme sans ombre
et sans amertume : l’âme même de Maurice Boutet de Monvel,
qu’une troupe de mésanges accompagna sans doute jusqu’au Paradis,
où le durent fort tendrement accueillir la sainte et le saint dont il
avait fait ses patrons.
JEAN-LOUIS Y A U n O Y E R