L’OEUVRE DE TIL-A. STEINLEN
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plus sereines l’occupent : illustration de la délicieuse Histoire du
chien de Brisquet, couvertures de livres ou titres de chansons, et, dans
ce même domaine de la lithographie, ces affiches dont il faut louer
sans réserve la belle composition décorative : celles de son exposition
à la Bodinière en 1894, du Lait pur stérilisé de la Vingeanne, de la
Tournée du Chat Noir, de la Compagnie française des chocolats et des
thés, N Yvette Guilbert, de la Clinique Chéron, de l’imprimerie Charles
Verneau, du Paris d’Emile Zola, du Cocorico, bien d’autres encore.
L’eau-forte, à son tour, devait tenter ce mâle et souple talent. Ses
premiers essais, suivant le catalogue de M. E. de Crauzat qui sert de
base à cet article, datent de janvier 1898 : c’est une planche de
simples croquis. Puis, vont se succéder des figures isolées, des études
d’après ses amis les chats, des blanchisseuses revenant du lavoir ou
rapportant leur travail, des chemineaux, des Chanteurs des rues dans
un effet de lumière rembranesque, des paysages, des académies, etc.,
traités tantôt à l’eau-forte, tantôt au vernis mou, tantôt à la pointe
sèche comme la planche qui accompagne ces lignes. Ici encore
s’admirent les qualités qu’a louées à bon droit Anatole France :
« une sensibilité subtile, vive, attentive, une infaillible mémoire
de l’œil, des moyens rapides d’expression qui destinaient Steinlen
à devenir le dessinateur et le peintre de la vie qui passe1 ».
Peintre de la vie, il l’a été également au sens propre du mot :
à l’exposition collective de ses œuvres qui eut lieu en 1903, place
Saint-Georges, on a pu admirer une centaine de toiles, où, dans
des tonalités assombries, s’affirmaient les mêmes qualités de force
et de synthèse qui distinguent son œuvre de dessinateur.
Mais, avant tout, Steinlen reste le maître des « moyens rapides
d’expression » : crayon, plume ou pointe. E’hommage qu’apporte
aujourd’hui M. E. de Crauzat au graveur et au dessinateur est donc
pleinement justifié. Ce catalogue complet de l’œuvre de l’artiste en
ces deux domaines, avec la description minutieuse et le détail des
états de chaque planche, avec la reproduction des estampes ou des
illustrations les plus belles ou les plus caractéristiques (près de 300
sont ainsi mises sous nos yeux) sera bien accueilli non seulement
des amateurs, mais encore de tous ceux qui considèrent Steinlen
comme un des maîtres qui, avec Forain, auront donné de notre
société contemporaine l’image la plus vigoureuse et la plus incisive.
A. M.
1. Préface au catalogue de l’exposition des œuvres de l’artiste, 32, place
Saint-Georges, novembre-décembre 1903.
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plus sereines l’occupent : illustration de la délicieuse Histoire du
chien de Brisquet, couvertures de livres ou titres de chansons, et, dans
ce même domaine de la lithographie, ces affiches dont il faut louer
sans réserve la belle composition décorative : celles de son exposition
à la Bodinière en 1894, du Lait pur stérilisé de la Vingeanne, de la
Tournée du Chat Noir, de la Compagnie française des chocolats et des
thés, N Yvette Guilbert, de la Clinique Chéron, de l’imprimerie Charles
Verneau, du Paris d’Emile Zola, du Cocorico, bien d’autres encore.
L’eau-forte, à son tour, devait tenter ce mâle et souple talent. Ses
premiers essais, suivant le catalogue de M. E. de Crauzat qui sert de
base à cet article, datent de janvier 1898 : c’est une planche de
simples croquis. Puis, vont se succéder des figures isolées, des études
d’après ses amis les chats, des blanchisseuses revenant du lavoir ou
rapportant leur travail, des chemineaux, des Chanteurs des rues dans
un effet de lumière rembranesque, des paysages, des académies, etc.,
traités tantôt à l’eau-forte, tantôt au vernis mou, tantôt à la pointe
sèche comme la planche qui accompagne ces lignes. Ici encore
s’admirent les qualités qu’a louées à bon droit Anatole France :
« une sensibilité subtile, vive, attentive, une infaillible mémoire
de l’œil, des moyens rapides d’expression qui destinaient Steinlen
à devenir le dessinateur et le peintre de la vie qui passe1 ».
Peintre de la vie, il l’a été également au sens propre du mot :
à l’exposition collective de ses œuvres qui eut lieu en 1903, place
Saint-Georges, on a pu admirer une centaine de toiles, où, dans
des tonalités assombries, s’affirmaient les mêmes qualités de force
et de synthèse qui distinguent son œuvre de dessinateur.
Mais, avant tout, Steinlen reste le maître des « moyens rapides
d’expression » : crayon, plume ou pointe. E’hommage qu’apporte
aujourd’hui M. E. de Crauzat au graveur et au dessinateur est donc
pleinement justifié. Ce catalogue complet de l’œuvre de l’artiste en
ces deux domaines, avec la description minutieuse et le détail des
états de chaque planche, avec la reproduction des estampes ou des
illustrations les plus belles ou les plus caractéristiques (près de 300
sont ainsi mises sous nos yeux) sera bien accueilli non seulement
des amateurs, mais encore de tous ceux qui considèrent Steinlen
comme un des maîtres qui, avec Forain, auront donné de notre
société contemporaine l’image la plus vigoureuse et la plus incisive.
A. M.
1. Préface au catalogue de l’exposition des œuvres de l’artiste, 32, place
Saint-Georges, novembre-décembre 1903.