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— 52

monumentale où tout le monde trouve à
s’instruire et où les connaissances fonda-
mentales nécessaires ne sont point noyées
dans les détails techniques accessoires du
domaine des spécialistes.

Le livre de M. Pietro Selvatico possède
avant tout un parfum de terroir, un souci de
l’originalité bien rares dans une matière
depuis longtemps sillonnée de tant de sen-
tiers battus. Ses illustrations nombreuses,
toujours choisies en connaissance de cause,
ne figurent pas dans les nombreux recueils
illustrés qui répètent, comme ù plaisir, les
clichés familiers admirés sur la foi des
guides par le monde des touristes péninsu-
laires.

Pour les étrangers, le travail de M. Selva-
tico présente un intérêt énorme, et certes
nous osons prédire que le dernier fascicule
n’en sera pas terminé que l’éditeur trouvera
lucratif et «actuel» d’en publier une tra-
duction française. En attendant, donnons à
grands traits, l’analyse de cette publication.

L’auteur commence son livre par une
étude esthétique sur les origines et l’essence
mêmes de l’art dans le passé et le présent
et sur les moyens de préparer à la pensée
artistique de nouveaux champs pour l’avenir.

Le chapitre I, envisage l’influence de
l’«Hiératisme oriental» sur l’art eu Europe
et traite spécialement de l’art Pelasgique ou
Étrusque en Italie. (leratismo orientale nell'
arte).

Le chapitre II, présente l’étude de la ma-
nifestation symbolique du beau idéal et ana-
lyse l’art de la Grande Grèce et de la Sicile.
[La manifestazione simbolica ciel bello tipico).

Le chapitre III, recherche les éléments
Gréco-étrusque épars dans la société latine
et raconte l’art de la Rome antique et des
provinces de l’empire. (Cli elementi greco-
etruschi nella societa latina).

Le chapitre IV, est consacré en entier à
l’influence du christianisme dans l’art ; c’est
le précis de l’art des premiers siècles chré-
tiens jusqu’il Beato Angelico inclusivement,
(Influenza del Chrislianismo sull' arte).

Le chapitre V, commence la période de la
Renaissance où l’étude de l’antique se com-
bine de celle de la nature pour renouveller
et rajeunir les principes de l’art. L’auteur va
de Masaccio ù Raphaël et consacre une
longue digression à l’architecture et aux
architectes. (L'antico ecl il naturale, rinnova-
lori dell’ arte).

Le chapitre VI possède un titre d’une jus-
tesse surprenante : «Période d’exagération
savante du type antique et naturaliste. » C’est
l’histoire de Michel-Ange et des « Michelan-
giolesques. » (Le dotte esagerazioni dell antico
e del naturale).

Le chapitre VII, caractérise avec non
moins de bonheur la période «Borromi-
nienne» : Le «Pompeux» dans l’art dont
M. Selvatico appelle énergiquement les

adeptes enrôlés sous la bannière du cava-
lière Bernini : décorateurs (macchmisti) et
maniéristes. (Le artificiate pomposita).

Le chapitre VIII est réservé à l’étude de
la seconde Renaissance de la fin du xvme
siècle provoquée par la découverte des citées
campaniennes ensevelies par l’éruption du
Vésuve de l’an 79, Herculanum, Pompeïa et
Stabies. C’est le règne des «plagiaires clas-
siques » Contrefattori dell antico épithète
cruelle mais mérité qu’applique l’auteur aux
œuvres de Camucini, de Benvenuti, de Landi
et des maîtres formant l’école des «stylistes»
(stilisti ) dont David fut l’importateur en
France et par contre-coup en Belgique.

Les œuvres de Canova et de ses imitateurs
pour la sculpture ; celles des architectes
imbus du style que M. Selvatico appelle si
plaisamment l'archilettura grecheggianle sont
finalement passées en revue. (Gli accademici
contrafattori dell' antico).

Le IXe et dernier chapitre sera certaine-
ment lu avec un immense intérêt, car M. Sel
vatico s’y occupe, au point de vue italien, de
la valeur esthétique de l’éclectisme moderne
dans les beaux-arts. Il y classe les artistes
en trois catégories : romantici, naturalisa,
avveniristi. Cette dernière appellation est
une vrai trouvaille et sera infailliblement
relevée quelque jour par les impression-
nistes,» les «facilistes» et autres «chrysali-
diens ; » « Nouveaux venus » au firmament
de l’art où régnèrent trop longtemps les doc-
trines de «visières vertes» du calibre de
Raphaël, Rubens ou Rembrandt.

La première partie du livre qui nous oc-
cupe comprenant les chapitres I à III est
actuellement terminée. Nous avons sous les
yeux le premier fascicule de la deuxième
partie commençant au chapitre IV : 17m-
fluence du christianisme dans l'art. Il com-
prend les titres suivants : 1° Considérations
générales. 2° Les basiliques romano-chré-
tiennes. 3° L’art byzantin en Italie. 4° L’art
byzantin dans l’ancienne république de Ve-
nise et dans les îles qui en dépendaient.

Nous y trouvons la révélation de toute une
série d’études archéologiques locales, incon
nues au-delà des monts, par exemple la
collection remarquable des Bulletins de la
Commission archéologique municipale de
Rome commencée en 1872; les opuscules
de M. Calogera, les Monumenti artistici e
storici delle provincie Venete; le judicieux
ouvrage, publié l’an dernier, par le Comman-
deur Alvive Pietro Zorzi, traitant de la res-
tauration intérieure et extérieure de la Basi-
lica Marciana (Saint Marc); le travail de
M. Cordero, Dell’ italiana in/luenza durante
la dominazione longobarda, etc., etc.

Les gravures et les vignettes sont particu-
lièrement intéressantes. La plupart sont
dues à des «bravi architteti» amis de l’auteur.

Le fragment de corniche à prolômes de
taureaux de St-Apollinare TSuovo à Ravenne,

le chapiteau d’une ancienne église de Théo-
doric aujourd’hui au Palais Rasponi et l’in-
térieur du Baptistère de la cathédrale dans
la même ville, offrent des exemples du plus
haut intérêt pour l’étude de l’une des pé-
riodes les plus obscures et les plus contro-
versées de l’art architectural. Citons au vol
les planches suivantes : une vue de la cathé-
drale et une autre des ruines du baptistère
d’Aquileja dit de Pagani et les fragments
d’un ca?icellum de la même provenance ;
l’ambon, le siège épiscopal, d’un archaïsme
renversant, et un précieux spécimen de ce
genre de clôtures de pierre àjourée, dont
YAgia Sophia de Constantinople fournit le
prototype, empruntés au dôme de Guardo;
l’intérieur de la cathédrale de Parenzo et la
vue de son Atrium rappelant Saint-Ambroise
de Milan; toute une série de chapiteaux iné-
dits dus au crayon du bravo architetto, M. le
professeur Franco; le Presbylerium de la
cathédrale de Torcello, Santa Fosca, avec
son plan byzantin et son appareil lapidaire
en mosaïque, proche parent de celui qui
embellit l’abside du dôme de Murano et fait
le sujet d’une autre grande gravure. Quant à
la Basilica Marciana, la légendaire église
patriarchale de Venise, connue du monde
entier, elle y est vulgarisée par une série des
détails nou- veaux, inédits, choisis spéciale-
ment au point de vue architectonique pour
lesquels l’auteur a mis à contribution les
monumenti artistici et le travail du Comman-
deur Zorzi. Le texte est toujours à la hauteur
des illustrations.

Nous avons éprouvé une véritable jouis-
sance à parcourir ce livre écrit par un ar-
chéologue compétent, doublé d’un patriote
convaincu professant un culte sincère pour
son Italie, madré degli arti, dont les puis-
santes mamelles suffirent à sustenter toutes
les écoles de l’Europe. Nous attendons avec
impatience la suite de ce beau travail dont la
partie publiée est loin de constituer le prin-
cipal intérêt. On connaît à peu près l’anti-
quité, le moyen-âge, la renaissance en Italie;
mais à partir du xvne que de choses à dé-
couvrir, à savourer sans doute, à la condition
qu’elles soient indiquées par quelqu’Ariane
complaisante qui tienne le fil dans le dédale
des recherches. Mieux que les boiseries de
San Martino à Naples, l'Esposizione Slorica
de Milan en 1873 nous avait déjà révélé tout
un monde d’œuvres d’art italiennes, héritage
enviable d’une époque jugée beaucoup trop
sévèrement sur la foi de classiques à tous
crins et qui avait conservé des effluves indis-
cutables du grand vent artistique qui de la
Rome de Léon X souffla par l’Europe. L’art
n’a jamais eu de léthargie mortelle en Italie.
Il s’est peut-être quelque soir assoupi sous
ses lauriers roses ; mais c’était pour étonner
davantage les écoles rivales de son radieux
réveil.

Auguste Schoy.
 
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