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La deuxième livraison concerne le lugubre
Châtelet et ses environs, avec une cinquan-
taine de bois qui retracent, en grande partie,
les scènes horribles qui, pendant plusieurs
siècles, ensanglantèrent les murs de ce hi-
deux cachot. C’est M. Bonnardot qui nous
introduit dans cette sombre histoire où les
personnes nerveuses peuvent être certaines
de rencontrer des sujets à secousses et des
gravures à l’unisson.

La série des gravures à part est ravissante :
ce sont vraiment des chefs-d’œuvre d’aqua-
relles. Voyez le Pont aux meuniers avec ses
demi-teintes si aérées et si fines ; le Pont de
bois si chaud de tons, si bien ensemble ; le
Pont au change d’un effet si pittoresque et
surtout ce Grand Châtelet pris de la rue St-
Denis, éclairé savamment de derrière par un
soleil du soir qui confond les objets dans une
teinte estompée douce et tremblottante. Ici
encore nous retrouvons l’excellent système
des plans superposés d’un usage si commode
et si pratique. Cette livraison comme la pré-
cédente est renfermée dans un cartonnage en
tout semblable à celui de la précédente livrai-
son. Tout l’ouvrage sera publié dans les
mêmes conditions.

Le Louvre forme la troisième livraison.
Le texte est de M. Edouard Fournier : c’est
dire assez l’intérêt que sa notice doit pré-
senter agrémentée et appuyée qu’elle est par
55 gravures qui toutes parlent aux yeux et
saisissent l’imagination A ce propos, nous
ferons la remarque qu’il semble que rien ne
soit plus inédit de ce qui concerne le Louvre.
Erreur complète ; c’est une mine inépuisable
où la maison Didot a trouvé un nouveau
filon. Dans tous ces bois il y a des choses
dessinées par Hoffbauer dans ce goût élégant
et animé dont Viollet-le-Duc semble le créa-
teur en France ou du moins le renovateur.
Les aquarelles du Louvre participent des
mêmes mérites que nous avons déjà signa-
lées : le palais en 1622 est mouvementé d’une
jolie scène de duel lestement troussée ; la Vue
de i38o est curieuse et bien enlevée dans
tous ses plans; le Louvre sous Louis XIV
se détache d’un fulgurant coucher de soleil
qui semble une allégorie sur les dernières
lueurs jetées par la royauté en France. Le
petit cortège royal que l’on distingue dans la
pénombre près de l’arche de Bourbon, jette
du piquant sur cette belle planche. Les deux
autres sont plus bourgeoises malgré la fête
sous Louis XV de l’une : l'autre révèle crû-
ment le caractère prosaïque et utilitaire de
notre mercantile époque. C’est froid, c’est
aligné, c’est mou. Ici encore, signalons des
plans superposés qui font la joie des anti-
quaires, des spécialistes, de presque tout le
monde en somme.

Voilà les trois livraisons sur douze que
doit avoir cette curieuse et minutieuse mono-
graphie de Paris. Ce beau livre est servi à
Petites doses et devient par cela même acces-

— 59 —

ble à toutes les bourses. Je connais des gens
qui mettent cinquante centimes par semaine
de côté pour s’acheter une livraison au bout
de l’an ; des Parisiens s’entend. Il y en a
d’autres qui voudraient payer tout de suite
le prix complet de l’ouvrage pour l’avoir en-
tier, de suite aussi. Un peu de patience :
voici trois nouvelles livraisons parues : nous
sommes donc arrivés à moitié. Nous en par-
lerons prochainement pour n’avoir pas tout
à faire à la fois. En attendant, vous qui lisez
ceci,tâchez de jeter un coup-d’œil sur l’œuvre.
Vous la trouverez chez tous les libraires et, à
la rigueur, nous nous ferons un plaisir de
vous la montrer dans nos bureaux.

COURBET ET SON ŒUVRE

par CAMILLE LEMONNIEK.

1 vol. gr. in-8° avec un portrait et six eaux-
fortes, Paris, Alph. Lemerre, passage Choi-
seul, 27-29.

M. Camille Lemonnier débute par déclarer
qu’il n’a jamais connu Courbet. Je l’en féli-
cite : j’ai circulé arec lui en Belgique en 1861.
Au bout de deux jours, abreuvé de dégoût,
j’ai laissé là ce personnage orgueilleux et cy-
nique qui n’avait le respect de rien et dont le
langage était à la hauteur du caractère. On a
essayé, à cause de son talent, très discutable
d’ailleurs, d’atténuer en lui ce que sa nature
humaine avait de réellement antipathique à
toute noblesse, à toute élévation ; on a presque
réussi. Heureusement pour la logique et pour
l’honneur du siècle, son souvenir ne sera point
falsifié à ce point : ce misérable fou passera
comme homme à la postérité avec l’étiquette
que Camille Lemonnier lui-même a mise sur
l’artiste : Courbet est le virtuose de la bestia-
lité.

L’étude de Lemonnier est écrite avec cette
plume colorée qui, si elle a l’art de vous
charmer, a quelquefois le malheur de vous
éblouir à l’excès. L’assemblage de certains
mots, la recherche visible de qualificatifs
d’une harmonie imitative, sont chez notre écri-
vain une habitude qui n’ajoute pas toujours
à sa pensée la force qu’il espère. L’auteur,
qui d’ordinaire voit juste, me parait avoir jugé
Courbet avec plus d’entrainement que de lo-
gique et cela fait peine à voir qu’un homme de
grand cœur et de grand talent s’égosille jus-
qu’à l’enrouement, à célébrer celui dont il res-
tera bien peu de chose quand sera venu le jour
où on réglera les comptes de tant de gloires
germées sur les tables de l’hôtel Drouot et
sous les roueries de quelques farceurs. Pa-
tience! M’est avis que Camille Lemonnier sera
le premier à sonder la question jusqu’au fin
fond de ses entrailles. Malheur alors, malheur
à ceux qui tomberont sous sa plume.

Une remarque curieuse : tout ce que Lemon-
nier dit en dehors de Courbet est vrai, éner-
gique, clair. Lisez les trois ou quatre pages
consacrées à Delacroix. C’est superbe; voyez

ce qu’il dit du réalisme et du naturalisme.
Cela est vrai au possible. Rappelons en pas-
sant que sur ce dernier point, depuis vingt-
cinq ans nous disons exactement la même
chose mais parce que c’est nous, parce qu’il a
plu à certaines gens de nous affubler d’une
perruque que nous n’avons jamais portée et
que nous ne porterons jamais, on fait semblant
de ne pas entendre. Ce n’est pas sans satisfac-
tion que nous voyons Camille Lemonnier
hurler comme nous et avec nous; lui, on le
croira, car on ne l’a pas encore rangé parmi
les poncifards. Cela viendra peut-être.

Au contraire. Quand notre écrivain fait
poser Courbet, il manque de simplicité et
semble se verser de l’absinthe pour se monter
l’imagination et alors arrive cette famille de
mots parfois recherchés, souvent heureux
mais continuellement imagés. C’est une ma-
nière devenue presque une formule. Je com-
prends cela dans cette adorable fantaisie de
Gras et de Maigres,d’après Breugliel,mais j’au-
rais voulu plus de naturel dans la circonstance
qui nous occupe.On dirait que l’auteur a donné
à l’expression de ses convictions un entraîne-
ment outré. Cela est tellement vrai que quand
il abandonne l’éloge de son modèle, la raison
semble avoir abattu la faconde de son enthou-
siasme et une langue sereine, austère, pleine,
toute nourrie de limpides et sages paroles,
tombe de sa bouche comme d’une source
naturelle. Somme toute 011 fera bien d’étudier
Courbet dans le travail de Lemonnier ; le lec-
teur séparera facilement le bon grain qui est
nombreux de l’ivraie qui est rare.

Le livre, supérieurement imprimé, est ac-
compagné de six eaux-fortes. Regardons-lcs :
d’abord un portrait de Courbet qui doit être
exact Ceux qui aiment les contrastes feront
bien de comparer l’eau-forte que voici avec
celle que donne Théophile Sylvestre dans les
Artistes vivants. Il y a 22 ans de distance entre
les deux. Là bas, il est jeune et magnifique,
mais déjà il entonne la chanson grivoise; ici
il s’alfaise et crève. Puis une eau-forte du doc-
teur Collin : L’habitation de Courbet-, c’est
tripoté avec désinvolture mais le ciel est
mauvais et je 11e vois pas de lumière; puis
la Baigneuse de Courtry, brutale, bestialement
lascive, de la couleur, de l’acquit : la tête tient
mal au corps; puis un Paysage, de Trimollet,
dur un peu, tiré trop noir; une Falaise, de
P. C. ; puis enfin une Chute d’eau sous des
rochers, puissante eau-forte de Weltner, mais
d’un effet manqué.

An. S.

France.

(Correspondance particulière).

EXPOSITION UNIVERSELLE.

L’heure approche. Déjà le programme de
l’inauguration solennelle est publié. Au mo-
ment où les lecteurs du Journal des Beaux-
 
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