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— 122 —

commerce, je dirai de première qualité, de
Courtois dit le Bourguignon; puis deux belles
scènes d’intérieur d’un artiste peu connu,
Frans Christophe Janneck, beau et fort colo-
riste! puis aussi un sévère paysage historique
signé K. D. Keuninck, qui pourrait bien être
le flamand connu jusqu’ici sous le nom de
Karel de Coninck.

Le plus beau Van Goyen que j’ai vu depuis
que ma vie se passe dans les musées, est celui
de la collection de von Hirsch. Cela représente
une plage (Scheveningue, je pense) : à gauche,
au premier plan,groupe d’hommes,de femmes,
d’enfants, plus un cavalier. On vend du pois-
son. Les groupes parlent entre eux. On croit
voir et entendre ce qu’ils disent. II n’est pas
un seul personnage dont l’intention ne soit
clairement manifestée, et la parole nettement
indiquée; c’est merveilleux et presque ef-
frayant. Tout cela est à peine frotté dans ce
ton blond et transparent que vous savez. Les
contours sont jetés, à petits traits rompus
mais spirituels. Le ciel est profond, le veut
circule, l’air passe, on y est. Ce Van Goyen est
prodigieux et inexplicable, il n’a rien et il a
tout; il fait une esquisse et c’est un chef-
d’œuvre; de plus j’ose vous affirmer que celui-
ci est un de ses plus beaux.

Autres chefs-d’œuvre... en gibier : ce sont
des Bécassinnes du bruxellois Hamilton. Il y
a de lui ici deux tableaux à faire rêver les
chasseurs non moins que les gourmands. Les
plumes des volatiles sont touchées avec une
étonnante énergie et une correction irrépro-
chable. Je ne sais si on ne les préférera point
à d’autres Bécassinnes peintes par David de
Heem avec beaucoup plus de finesse et peut-
être de séduction. En tous cas, je n’hésite pas
à déclarer ici que jamais, dans un musée
public ou particulier, je n’ai rencontré de
produits cynégétiques dignes d’être comparés
à ces peintures d’IIamilton et de de Heem,
et je pense que s’il pouvait revenir au monde
l’illustre Weenix lui-même s’avouerait vaincu.
Deux beaux sujets de basse-cour d’Antoine
Gryff, l'élève et un peu le rival de Snyders,
brillent aussi dans la collection von Hirsch
d’un éclat particulier.Ce sont des tableaux de
chevalet de taille très moyenne, mais qui sont
conçus et traités de façon grandiose. Comprise
ainsi, la nature morte n’a pas à céder le pas à
d’autres genres et je ne sais si les spécialités
modernes mises en regard de ces étonnants
morceaux s’v sentiraient bien à leur aise.

Une des pièces les plus vantées de cette col-
lection célèbre est une grande figure de vieille
femme de Tiépolo. Ici sa coloration générale-
ment peu intense a pris un caractère plus vi-
goureux. La femme est sans doute quelque
poissarde ivre dont le vêtement dépoitraillé
ù demi accuse la vie désordonnée. Le dessin
large et savant du maître s’impose au specta-
teur émerveillé, etle caractère profond, intime,
du talent de ce grand vénitien déclassé se ré
vêle ici d’une façon curieuse autant qu’impré-

vue ; en effet les coups de brosse, à l’état de
nature, sont ici aussi visibles que dans une
esquise heurtée et il y a loin du Tiépolo que
nous avons sous les yeux au Tiépolo du Roland
furieux ou de la Belle Hélène où la pompe du
sujet efface le naturel du talent. Quelque mu-
sée du Nord fera bien de se procurer cet
échantillon d’un maître utile à consulter et
charmant à regarder. Du reste, les Tiépolo
sont à la mode : ce n’est que justice.

Les Van Falens sont assez communs en Eu-
rope, mais je doute qu’on en rencontre un
aussi riche, aussi fort et aussi harmonieux
que l'assemblée dans un jardin de la collection
Hirsch Parthey le cite dans son ouvrage sous
le n° 13 et il mérite amplement la notoriété
dont il jouit. Plusieurs tableaux du même
maître figurent dans la même galerie, mais au-
cun ne possède le brio entraînant de celui-ci.
C’est encore ù unAnversois et ù un contempo
rain de Falens, Jacques Vau Helmont,que nous
devons cette grande Fête de village avec têtes
si fines, si expressives, au coloris si flamand
et d’une si admirable pureté de conservation.
En vérité, quand je considère tous ces tableaux
si entiers, si nets, si frais, si étonnamment
conservés de la collection Hirsch, je me dis
que bien des maîtres, dont le nom semblait
plus grands que leurs œuvres, nous appa-
raissent ici sous leur vrai jour et justifient
cette ancienne réputation que, la plupart du
temps, nous ne pouvions contrôler. C’est là la
leçon suprême que nous donne cette galerie
Von Hirsch où les tableaux semblent sortir de
l’atelier des maîtres et où on prend en pitié
les vanités et les sottes prétentions de tant de
charlatans modernes qui ne vont pas à la che-
ville de tous ces morts dont les œuvres ra-
dieuses éclairent le monde bien plus encore,
et bien mieux peut-être,que ne le font les sys-
tèmes au milieu desquels s’agitent les écoles
du jour.

Telles sont les réflexions qui m’assaillent
ici; elles se renouvellent à chaque pas que je
fais. Et tenez, me voici devant un splendide
Pieter de Hooghe, une Partie de musique, sujet
mal composé, mais quel jeu de lumière et
d’ombres ! Quelles têtes de femmes ! quelle
étonnante distribution d’effet et quel ragoût
délicieux règne dans cette assemblée vraiment
humaine, où la passion éclate, où le rire, l’at-
tention, la préoccupation de chacun des au-
teurs est caractérisée d’une magistrale façon.
Splendide,ai-je dit, je n’en démords pas et les
enchères me diront si j’ai raison.

Et ce Vander Meulen si fin, si délicat; et ce
Nicolas Poussin si noble; et ces deux pendants
admirables de Joseph Roos, signalé par Par-
they; et ce Jacques Ruysdael, un peu lourd
mais si profondément poétique ; et cette Vue
de Zurich si lumineusement fine de George
Schultz; et la Partie de cartes de Terburg,
joyau tout spécial comme on en rencontre peu;
et ce Vinckenboons si riant, si spirituellement
touché et dont le semblable ne s’est pas encore

rencontré; et ces deux Philippe Wouwerman
que Lebas a rangé dans ses meilleurs plan-
ches ; et ce Corneille Molenaer signé si riche
de composition comme de couleur; et ces
deux Huysmans si beaux malgré leur mollesse;
et ces deux vigoureuses et rutilantes batailles
du Bourguignon; et ces deux Paul Bril d’un
vert bleu si profond, si vastes, si bravement
travaillés ; et ces deux Pieters, dignes de
Berghem ; et ces Canaletti carrément dessinés ;
et ces Guardi dignes de son maître ; et ce van
Cuylenburg qu’on jurerait être un des plus
beaux Poelenburg s’il n’était signé et daté de
1644; et enfin, car il faut bien s’arrêter, ces
De Witte, ces Weenix, ces anonymes aux
monogrammes inconnus et irritants où l’on
rencontre des surprises étourdissantes, ces
Vande Velde,ces Teniers vieux et jeune d’une
authenticité qui se peut raisonner, mais d’un
réel mérite, ces fulgurantes batailles de Tem-
pesta, ces Solemaeker, ces Ryckaert, ces
Ricci, ces Querfurth, ces Palamède, ces Net-
scher, ces Vander Neer, ces Moucheron, ces
Metzu, ces Meugs, ces Dujardin, ces Denner,
ces Breughel, ces Breydel et tant d’autres
tableaux sur lesquels il ferait si bon de s’éten-
dre un peu et auxquels l’histoire de l’art
gagnerait de nouvelles clartés si on avait le
temps de dépouiller les signatures et les dates
qui les constellent.

La collection Von Hirsch est certainement
le fonds considérable dans lequel l’Europe
artiste va puiser de nouveaux trésors. Elle
doit avoir et aura d’ici à peu de temps un re-
tentissement considérable, et nos lecteurs me
seront gré d’y avoir aidé dans la mesure de
mes désirs et de mes connaissances. Je dois
aussi engager les amateurs dignes de ce nom
à conserver le catalogue de cette collection
qui servira aux travailleurs futurs, car il est
exact, consciencieux, et réunira dans son fais-
ceau primitif un ensemble désormais histo-
rique. Von Sch...

N. B. Pour votre prochain numéro je vous don-
nerai quelques notes sur les maîtres modernes,
notamment de Munich, qui font partie de la collec-
tion.

L’ARCHITECTURE NÉERLANDAISE
AU XVIIe SIÈCLE (Suite).

Un casin d’assez bon goût dans le genre
dont nous parlons, décoré de pilastres co-
rinthiens sur un soubassement, fut exécuté
pour les frères Arnold et Hans Pelt à un
quart de lieue de la ville de Weeps, près du
Gheijn Brugh, du côté du Sant-pat ou canal
vers Amsterdam.

C’est dans les projets non exécutés de son
livre que Vingboons affiche carrément ses
prédilections classiques. L’architecte les y a
consignés, sans doute, comme points de
comparaison ; mais ils constituent, en même
temps, une véritable profession de foi artis-
tique et une éloquente protestation à l’en-
 
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