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Journal des beaux-arts et de la littérature — 22.1880

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https://doi.org/10.11588/diglit.18917#0132
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— 114 —

au à laisser, car enfin l'œuvre d'un
ijomme n'est plus historique, si elle
date d'une seule époque. Ensuite on
eut dù marcher chronologiquement
pour bien asseoir la valeur de l'idée.

Quant à l'indépendance elle n'eût
été réellement possible qu'en dehors
de toute commission officielle. On
sait en effet que la dépendance est le
caractère rigoureux de toute commis-
sion. Il fallait ici une action une,
ferme, irresponsable, en un mot de
l'arbitraire si l'on veut, mais de l'ar-
bitraire circonscrit dans les limites
de l'idée même et dès lors incapable
de nuire. Les commissions plus elles
sont grandes moins elles sont effica-
ces ; l'autorité collective se débarrasse
de toute responsabilité personnelle et
on ne sait jamais où est le maître
quand tout le monde l'est.

Il fallait enfin de l'énergie pour ré-
sister aux obsessions de toute nature
qui ne pouvaient manquer de se pro-
duire, soit de la part d'individus in-
fluents, tapageurs, menaçants ou de
coteries insinuantes comme il y en a
partout et qui sont d'autant plus dan-
gereuses qu'elles se composent tou-
jours de personnes que leurs habitu
des, leurs goûts, leurs intérêts, leurs
occupations et leurs loisirs surtout,
rendent solidaires.

A ces conditions l'exposition histo-
rique dans la grandeur du mot, dans
la signification réelle de la pensée qui
y a donné lieu, était possible quoique
difficile. Hors de ces conditions on
ne pouvait arriver à d'autre résultat
que celui qu'on a obtenu : une eu
rieuse exposition. C'est donc comme
telle que nous entendons l'examiner

OLIVIER GILLES.

Le 26 juillet est décédé à Ghâtelet M. Oli
vîer Gilles. Ouvrier peintre de son état, le
défunt avait depuis plusieurs années pris le
goût de l'archéologie et acquis des connais
sances sérieuses dans cette science aride et
difficile. Il dépouilla, classa et annota les
archives d'un grand nombre de communes du
canton de Ghâtelet et en particulier de la ville
de ce nom. Il fournit des renseignements gé
néalogiques précieux, à un grand nombre de
familles'de l'ancien pays de Ghâtelet, qui au
trefois faisait partie de la principauté de
Liège.

Sans instruction première et uniquement à
force d'étude, il était parvenu à s'accoutumer
aux écritures et à la langue des siècles passés,
a se familiariser avec le latin. Son style même
ressemblait à celui de nos plus vieilles chartes
et le caractère archaïque n'est par le moindre
mérite de ses œuvres. De sa plume légère, de
sa» pinceau expérimenté, il reproduisait d'une
manière frappante les enluminures des manus-
crits las plus riches, les monnaies usées par
le temps, les sceaux brisés ou détériorés par
% rëttisfcé» Sa mémoire était non moins éton-

nante et la postérité sera privée de bien
des souvenirs qu'il n'a pu consigner dans ses
écrits. La mort est malheureusement venue
l'enlever au milieu de travaux nombreux,
qui peut-être n'auront pas de continuateur et
dont le fruit serait perdu, si quelque main
intelligente et dévouée ne reprenait la tâche
commencée par lui. Nous croyons savoir que
des mesures sont prises pour que les richesses
archéologiques accumulées par Gilles soient
conservées intactes et de plus ne demeurent
pas ensevelies dans l'oubli.

Modeste autant qu'érudit, serviable autant
que désintéressé, Gilles sera regretté de tous
ceux qui l'ont approché, on pouvait à toute
heure aller consulter les trésors accumulés
dans le cabinet de travail sans éclat extérieur,
où il passa la majeure partie de son existence;
il était loisible à toute personne intéressée de
mettre à contributions la science et les la-
beurs de cet érudit caché. Son abnégation fut
même exagérée, car, par amour excessif de
cette archéologie qu'il cultivait avec passion,
il rendit à un grand nombre de personnes et
de familles des services pour lesquels il ne
demanda jamais la moindre rétribution. Bref,
Gilles était artiste dans le sens élevé du mot.
Il travaillait avec intelligence, énergie et
suite; sa mort, causée en grande partie par
son zèle pour l'étude, laissera un grand
vide dans le vaste champ de l'archéologie
Carolorégienne. Nous espérons pouvoir ren-
seigner ultérieurement nos lecteurs sur les
manuscrits laissés par Gilles. A ses funérailles
qui ont eu lieu aujourd'hui, au milieu d'un
grand concours d'assistants à Châtelet,M. Henri
Pirmez, président du cercle catholique de cette
ville, a prononcé un discours ému, retraçant
les éminentes qualités du défunt comme homme
privé et comme savant.

Charles Pety de Thozée,
Gharleroy, 28 juillet 1880.

DOUZE DESSINS PAR X. MELLERY (1).

M. X. Mellery vient de composer pour Nos
amis les animaux douze dessins, lavés sur
pierre puis héliographiés. Ges dessins sont
très originaux. Ils tiennent par le côté idéal
au genre de Lemud, ce dessinateur oublié
depuis qu'il est riche; du côté du procédé à
teintesplates et grises qui suppriment àpeu près
le piquant des effets de lumière, il rappelle
Degroux ; enfin M. X. Mellery rappelle encore
le naturalisme de très bon goût qui caracté
rise l'illustrateur du'Graphie. Dans tout cela
il n'y a rien de flamand, mais ce n'est pas né-
cessaire; d'ailleurs il est convenu que grâce
au progrès, les nationalités dans l'art s'effa-
cent. Est-ce un bien, est-ce un mal? Laissons
aux Prudhommes du jour le soin d'examiner
cette question.

II y a dans les dessins de M. Mellery un
accent vital très intense qui dénote un profond
observateur et qui place l'artiste à la tête des
Belges dans ce genre d'illustrations Je citerai
notamment la mère avec ses deux fillettes à
table et le père serrant la main du cocher. Ce
dernier surtout est un des plus vivants de
l'œuvre. Le dessin qui accompagne Pierrot est
digne de Degroux dans ses meilleurs jours.
Les Saltimbanques un peu embrouillés au
premier aspect, gagnent a l'analyse et offrent
de grandes finesses de dessin. La vielle dame
au parapluie, la bohémienne, Vhomme qu i rap

(1) Nos amis les animaux par E. Leclercq,
Bruxelles, Office do publicité.

porte l'enfant, sont encore des planches où
gnent une émotion vraie.
Il faut louer M. X. Mellery d'avoir posé le
pied dans cette voie modeste. Illustrer des
livres destinés à l'enfance est une mission
importante et délicate, car il faut mettre un
grand soin à ne point fausser le goût de l'en-
fant. C'est peut-être à partir du premier livre
d'images que l'enfant reçoit le germe de son
jugement futur sur les choses d'art. Ne per-
dons par de vue non plus que souvent les gar-
çons et filles copient les illustrations qu'on
leur met dans les mains. On peut juger des
lors de l'importance qu'il y a à leur donner
de bons modèles. Je le répète, sous tous les
rapports il faut louer M. X. Mellery d'avoir
si bien compris la tâche qui lui a été confiée et
de l'avoir si heureusement exécutée.

LE PLUS VIEUX MANUSCRIT BELGE.

C'est un évangéliaire qui se trouve à l'exposition,
section de l'art industriel ancien. M. Gielen lui
consacre une notice intéressante dont nous extrayons
le passage suivant :

Ce précieux évangéliaire, appartenant aux ar-
chives de l'église primaire de Maeseyck, est l'œuvre
de deux sœurs, Harlinde et Relinde (filles du sei-
gneur Adalhard, issues de la noble famille des
Pépin) , fondatrices d'une petite chapelle et de
l'abbaye d'Eick. C'est l'évêque d'Utrecht, saint
Willebrodo et saint Boniface qui vinrent à Eick
pour y consacrer le monastère et la petite chapelle.
Puis ils bénirent les deux fondatrices et les éle-
vèrent à la dignité d'abbesses. Après avoir reçu
cette consécration, elles acceptèrent douze jeunes
filles, lesquelles, après un court noviciat, pronon-
cèrent les vœux éternels de religion.

Aussitôt que Harlinde et Relinde so trouvèrent à
la tête de leur petite communauté, elles vouèrent
leur vie entière à soulager les pauvres et à s'in-
struire dans les livres et les manuscrits, les trans-
crivant et les ornant de riches peintures; dans l'ar-
deur de leur goût pour les arts, elles avaient même
créé à Eick un gynécée où elles passaient une par-
tie do leurs jours et même de leurs nuits à ensei-
gner à do jeunes apprenties l'art de peindre et do
broder do riches étoffes en soie et à tisser le lin (1).

D'après un récit populaire dont l'origino et pos-
térieure à la rédaction de l'ancienne vie latine, un
soir, tandis que Harlinde et Relinde enlummaient
le texte du manuscrit, un nuage épais de souffre les
enveloppa subitement, et le démon, se montrant à
elles sous la forme d'un spectre, éteignit les deux
cierges qui éclairaient leurs veilles laborieuses ;
mais, ô prodige ! les flambeaux se rallumèrent sous
le souffle d'un esprit céleste, et ils brillèrent avec
plus d'éclat qu'auparavant. Ce récit naïf peut nous
faire comprendre en quelle estime étaient tenues à
Maeseyck les peintures de Harlinde et de Relinde;
l'auteur anonyme do leur vie, qui écrivait au ix°
siècle, nous apprend que les miniatures s'étaient si
bien conservées, qu'elles offraient des couleurs en-
core fraîches et brillantes do l'éclat de l'or et des
pierreries; cette admiration ne semble pas avoir
diminué, puisque l'on a conservé comme reliques
des saintes artistes leurs Evangéliaires et le Reli-
quaire (2).

Le magnifique manuscrit illustré de miniatures
évangéliaires conservé dans les archives de l'église
de Maeseyck est un poti in-folio dont le texte et les
lettres majuscules appartiennent encore à l'anti-
quité classique par leur forme.

Les premiers feuillets représentent une colonnade
romaine surmontée d'une arcade, dans laquelle sont
inscrites plusieurs arcades plus petites; dans ces

(1) Bollandistes (Acta Sanctorum). Tome III,
page 388.

(2) Ce reliquaire, en cuivre doré, contient les
deux cierges avec l'inscription suivante : « Dux
candilae S. S. Virginum per cœodœmonem extinctae
subinde per S. Angelum accensie dum S. Virginos
divinum persolubant officiam. » Se conserve-encore
de nos jours dans le trésor de l'église de Maesoyk.
 
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