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31 Mars 1882. /

,\o g 31 Mars 1882. < Vingt-quatrième Année

BEAUX-ARTS

ET DE LA LITTÉRATURE.

DIRECTEUR: M Ad. SIRET. paraissant deux fois par mois. ADMINISTRATION et correspondance

memkre de l'académie roy. de belgique, etc. PRIX PAR AN : BELGIQUE : Ç) FRANCS. a St-nicolas (belgique).

etranger : 12 fr.

SOMMAIRE. Beauy-Arts : L'exposition néerlan-
daise à Bruxelles. - Les dessins de Verboeckho-
ven - La musique à Paris. - Deux nouveaux
bas-reliefs de Bonassieux. — Littérature :
Odette - Théodore de Banville. - Chromqne
générale. - Cabinet de la curiosité. - Annonces.

Beaux-Arts.

EXPOSITION NEERLANDAISE.
PREMIER ARTICLE.

L'exposition Néerlandaise, annoncée de-
puis deux mois s'est ouverte à Bruxelles,
royalement. Cérémonies d'usage. Grand con-
cours de monde officiel, habits noirs, char-
mantes toilettes, avec un grand soleil prin-
tanier traversant les toits vitrés et satinant
toutes ces élégances.

L'exposition se compose de tableaux an-
ciens et modernes. Parmi ceux-là se trouvent
des chefs-d'œuvre de premier rang, les deux
salles qui les contiennent, sont comme des
sanctuaires d'art, parmi les autres. A part des
spécimens superbes de l'école romantique
française, peu de belles toiles sont à signaler.
Je m'occuperai dans ce premier article des
modernes, réservant les meilleurs morceaux
pour la bonne bouche.

Voici un portrait du baron de Haulleville,
signé Hermans. Fort bien fait. Le corps est
à l'aise, la physionomie vivante, mais la main
gauche morte.. Il y a dans cette peinture une
harmonie de tons irréprochable, la lumière
tombant sur la tête du modèle, fait la belle
tache claire qui anime tout. C'est très dis-
tingué.

 côté, un Vorwée, b^au comme toujours;
une admirable page de couleur flamande.
Quelle vie grasse d'animaux repus, somno-
lents, avec des yeux mi-clos! Tout ici, la ver-
dure et les bètes, ont la santé pesante, gon-
flée. Ce cheval, on le connaît, ce bétail, on l'a
vu souvent, qu'importe ! Voici une grande
vache brune accroupie, sa robe est splendide,
je n'en connais pas de plus belle dans toute
l'œuvre du peintre. L'ensoleillée du fond, ve-
nue de derrière un nuage et sabrant les toits
rouges du traditionnel village, met comme
une clarté triomphale dans le paysage. Déci-
dément, il serait difficile de faire plus fon-
cière œuvre d'art, et certes ce tableau vaut en
splendeur les Troyon exposés dans la même
salle.

Mellery expose deux têtes romaines d'hom-
mes, fort bien traitées.

La marine de Mesdag, large, pleine d'air,
avec ses lourds navires sombres au milieu, fait
un effet saisissant. Tout dénote le grand
peintre, vigoureux, grandiose, imposant à la
réalité sa façon magistrale de la comprendre.
Lui seul sait imprimer aux vagues les énormes
mouvements ou les sautillantsclapotages. Son
eau frissonnante au vent, a toute la transpa-
rence des cristaux, elle vit dans une conti-
nuelle agitation, on la voit couler et le ciel,
triste ou lumineux, s'y reflète profondément.
Cela est facturé et peint à forte poigne et la-
mé d'empâtements brutaux peut-être, mais
n'effarouchant que les myopes.

Plus loin, se trouve une marine d'un autre
Hollandais, H. Dever. Mesdag déteint sur
lui. Son morceau de peinture a certes bonne
allure, pourtant le ciel est par trop maçonné.
Le grand nuage qui le tâche fait craindre
non pas un orage mais un écroulement.

Israëls a envoyé une des scènes tragiques,
qu'il rend si sobrement et si puissamment.
Ce peintre voit noir, mais quelle dose d'hu-
manité il met dans son œuvre! Il est de la
famille des sombres, des Millet, des Leys,
des Degroux. C'est de l'eau-forte en peinture,
il traite comme pas un, les navrements, les
désespoirs, les hébétements de l'homme. Son
tableau où n'éclate aucune belle tache de
couleur a néanmoins une pénétrance, une
force subjuguante, que tous les artifices du
pinceau n'atteignent pas.

Et les Oyens? Les voici, avec quatre toiles
ragoûtantes, gluantes d'empâtements auda-
cieux, multicolorés comme des rectos de pa-
lette chargée. Même, la Zingara lamée a
l'emporte-pièce est par trop papillottante.
Mais la scène d'atelier, la Jeune Fille assise
et celle écrivant une lettre, sont d'excellentes
toiles où luisent des eouleurs chaudes, flam-
bantes, prouvant que les Oyens sont pein-
tres de forte race.

De Haas a deux bons morceaux d'art à la
rampe. Cela est plein de lumière et d'air;
pourtant je ne sais quoi de haché et de cin-
glant déplait dans la facture, qu'un jeune,
M. Schouten a pris soin d'exagérer dans la
sienne. De plus, cette grande lumière de jour
est parfois crayeuse et agaçante, ces croupes
d'animaux ont quelque chose dérapant.

Près de là, se trouve une marine de Bou-

vier, excellente A part le ciel, tout est digne
du plus sincère éloge. La vague maîtresse,
qui lance le navire, a un emportement gran-
diose et vrai. La couleur de la mer, faite de
verdeurs dorées, est attrapée à miracle, il
passe dans cet eau la superbe colère de
l'Océan. Cela est très dramatique et porte en
soi une unité puissante. La facture n'est ni
lourde ni commune comme dans beaucoup
de tableaux du même peintre.

Certains artistes sont dans cette exposition
tout à fait inférieurs à eux-mêmes : Gabriel,
Roelofs, De Pratere, T'Scharner, Verhaeren,
Charlet, dont la scène d'atelier est mesquine
et sèche à côté de celle d'Oyens, Tschageny,
dont les chevaux dans les dunes son agaçants
et lourds de couleur, mais le même artiste
expose une écurie dont les bêtes vus de
croupe sont bien peintes. Il y a là, justesse
de ton, charme de coloris, bonne lumière.
Tout près, se trouvent deux tableautins de
Storm de Gravesande. Cet artiste a la solide
couleur d'un maître-peintre, ses verts sont
opulents, pleins de sève, ses blancs de va-
gues éclatants de lumière. Les Toussaint
sont également remarquables, il y a dans son
grand paysage un amas de rochers digne de
Courbet. Les autres, faits dans de moindres
dimensions, ont tous un côté charmant, ar-
tistique, arrêtant le visiteur au passage dans
une contemplation de nature bien rendue.

Ilmereste àparlerdes tableautins de Mauve
et de Maris. Il y a évidemment de l'exagéra-
tions dans les Pécheurs de Coquillages du
second. Quelque fantastique qu'on suppose
les tons de plages vers le soir, on ne peut
admettre cette réverbération bleuâtre où des
noirs sales délimitent les objets Le chemin
des dunes du premier est par contre uu
joli coin de nature triste et solitaire. Le fils
Israëls exagère la manière paternelle. Son
portrait de Mme E... est néanmoins un inté-
ressant morceau de peinture. Keelhoff me
semble on ne peut plus maladroitement imi-
ter Dubois. Les pommiers de Le Mayeur ont
une couleur claire non crayeuse. C'est un
écueil évité. Zilken nous exibe une originale
tête de nègre sur fond blanc. M de Vos une
nature morte opulente, Sebes de jolis inté-
rieurs, mais d'une lumière trop voulue.

M. Herbo ne va pas mieux, sa peinture
continue à avoir la jaunisse. Au bout du
chemin qu'il parcourt, l'attend M. Van den
 
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