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LA CHRONIQUE DES ARTS
Eggimann, in-4°, 144 p. av. 556 fig.). Ce nouveau
volume s'étend du mot Gaultier au mot Ingres,
et, par suite, comprend entre autres, la nomen-
clature des dessins de Gillot, des curieux croquis
et aquarelles de Jules de Goncourt illustrant son
carnet de Notes d'un voyage en Italie, des nombreux
et beaux dessins de Granet, de ceux de Greuze,
de Gros, de Heim (notamment les études pour son
tableau de la Distribution des récompenses du
Salon de ISS4) ; de Houel, rapportés de son
voyage en Sicile, à Malte et à Liguri ; des dessins
de Paul Huet, enfin de l'imposante série des
crayous d'Ingres. C'est dire l'intérêt particulier de
ce recueil, où, comme dans les précédents, chaque
dessin est l'objet d'une notice descriptive détaillée
accompagnée, le plus souvent, de sa reproduction
en fidèle phoiotypie.
O. Munsterberg. — Chinesische Kunstge-
schichte. Stuttgart. P. Neff. 2 vol. in-S", avec
figures et planches.
Dans l'absence de toute œuvre d'ensemble con-
çue sur un plan analogue, un travail pareil
est appelé à rendre les plus grands services à
ceux qui, n'ayant pas accès aux sources, en sont
réduits à fonder leur observation sur des travaux
de seconde main. Il faudrait être un encyclopé-
diste d'une espèce rare, pour traiter avec une
égals compétence les diverses matières étudiées
dans ce volume. On y trouvera l'architecture et
les arts décoratifs ou industriels, avec toutes
leurs subdivisions. Naturellement, M. Munsterberg
ne peut prétendre à la fois à une science appro-
fondie de l'architecture chinoise, des bronzes,
des étoffes, des livres, des xylographes, de la por-
celaine, des tapis, des verres, mais il peut se pré-
valoir d'avoir donné une idée d'ensemble des mani-
festations de l'art chinois dans ces divers domaines.
Pour chacun d'eux, du reste, il s'est informé aux
sources les plus sûres ; soit qu'il s'agisse de tra-
ductions de textes chinois, soit, surtout, qu'il
s'agisse de travaux dus à ceux qui ont spéciale-
ment étudié chacune de ces catégories. On peut
regretter que ces sources, si abondamment consul-
tées, ne soient citées qu'avec une extrême parci-
monie : mais il faut reconnaître que la mise en
usage de ces matériaux est bien faite et que l'au-
teur n'a cédé que rarement à la tendance d'y
ajouter des théories personnelles un peu aventxi-
reuses. L'illustration du livre est d'une extrême
abondance. Elle en est aussi l'imago fidèle. Elle
n'apporte rien d'inédit, mais elle rassemble des
documents épars ; elle les classe d'une façon ri-
goureuse, si bien que, même pour les spécialistes
des études d'archéologie orientale, elle offre
une très réelle utilité. On pourrait faire des cri-
tiques de détail : regretter, par exemple, l'oubli
complet des xylographes bouddhiques, qui nous
livrent des documents du plus haut intérêt et qui
eussent pu occuper une page ou deux de la sec-
tion consacrée aux gravures sur bois. On pourrait
préférer parfois des documents figurés plus cer-
tains et plus démonstratifs que ceux que l'auteur
a choisis ; mais voilà, pour un ouvrage de ce
genre, des défauts de peu d'importance. Il faut
reconnaître que M. Munsterberg nous a donné,
sous une forme maniable, dans un classement bien
ordonné et avec une illustration très abondante,
un traité de vulgarisation sur l'art chinois qui
permettra à tous ceux que la question intéresse, de
se mettre au courant d'une manière assez appro-
fondie pour passer ensuite à l'étude de travaux
plus spéciaux. .Raphaël Petrucci.
-——<—^ûyo^e3CT*n3sû^-»-
NÉCROLOGIE
Jules Lefebvre
Le peintre Jules-Joseph Lefebvre, membre de
l'Institut, est mort à Paris, samedi dernier, 24 fé-
vrier, à l'âge de soixante-seize ans. Il était né le
14 mars 1836 à Tournan (Seine-et Marne).
Il commença ses études de dessin à Amiens, l'ut
à Paris élève de Léon Gogniet et entra à l'Ecole
des Beaux-Arts en 1852. Une première fois, il con-
courut pour le prix de Home en 1859, mais ne l'ob-
tint qu'on 1801, sur ce sujet : La Mort de Priam.
A son retour de Rome, il fit à la fois des por-
traits et des figures do femmes qui attirèrent l'at-
tention sur lui par la correction du dessin, le
charme discret de la couleur, la chasteté des nus.
Ses premières œuvres s'appelèrent La Veille de
Noël, La Charité romaine, qui est au Musée de
Melun ; Pèlerinage au Sacro Spcco, Jeune fille
endormie, Nymphe et Bacchus (1866, Musée du
Luxembourg) ; La Vérité, nue, debout, tenant un
miroir (1870 ; musée du Luxembourg), une do ses
œuvres les plus célèbres qui lui valut la croix de
la Légion d'honneur ; puis Madeleine. Pandore,
Yvonne, Mignon, Ondine, Fiametta, Nymphe
chasseresse, Gra^iella, Diane surprise au milieu
de ses nymphes dont l'Hôtel de ville d-3 Paris a
fait l'acquisition, taure, l'épisode de Lady Go-
diva, qui eut aussi un grand succès et que possède
le musée d'Amiens, etc.
Les portraits qu'il peignit entre temps sont nom-
breux; en dehors de quelques portraits masculins
(entre autres celui du Prince impérial (1874), au-
jourd'hui à Versailles, celui de M. F. Pelpel
(1880), etc., ce sont surtout des portraits de
femmes (portraits de sa fille, de M"' Madeleine
Lemaire, do fit™' Peylel. etc.) traités, comme toutes
les œuvres précédentes, suivant toutes les formules
académiques, avec probité, dans une facture lisse
et des colorations atténuées. Il figura à tous les
Salons de la Société d-'s Artistes français jusqu'en
1910, où son envoi s'appelait La Vestale condam-
née (1).
Longtemps professeur à l'École des Beaux-Arts
il y forma, ainsi que dans les ateliers Julian, de
nombreux élèves, dont plusieurs sont devenus cé-
lèbres.
Voici quelles sont les récompenses obtenues par
Jules Lefebvre : prix de Rome en 1861, médaillé en
1865, 1868 et 1870,chevalier delà Légion d'honneur
la même année, médaillé de lr° classe à l'Exposi-
tion Universelle en 1S78, promu officier à la suite
de cette Exposition, titulaire de la médaille d'hon-
neur au Salon de 18S6, grand prix à l'Exposition
Universelle de 1889, membre de l'Institut en 1891,
commandeur de la Légion d'honneur en 1895. Il fat
membre du jury, hors concours, à l'Exposition
Universelle de 1900.
On annonce aussi la mort du peintre Mèdéric
Bottin, décédé cette semaine au Canet (Alpes-Ma-
ritimes), à l'âge de trente-huit ans.
(1) La Gazette des Beaux-Arts a reproduit de
Jules'Lefebvre : Le Réce (1875), Chloê (1875), Ma-
deleine (eau-forte de l'artiste d'après sou tableau,
18^6), Pandore (1877), Laure (1885).
LA CHRONIQUE DES ARTS
Eggimann, in-4°, 144 p. av. 556 fig.). Ce nouveau
volume s'étend du mot Gaultier au mot Ingres,
et, par suite, comprend entre autres, la nomen-
clature des dessins de Gillot, des curieux croquis
et aquarelles de Jules de Goncourt illustrant son
carnet de Notes d'un voyage en Italie, des nombreux
et beaux dessins de Granet, de ceux de Greuze,
de Gros, de Heim (notamment les études pour son
tableau de la Distribution des récompenses du
Salon de ISS4) ; de Houel, rapportés de son
voyage en Sicile, à Malte et à Liguri ; des dessins
de Paul Huet, enfin de l'imposante série des
crayous d'Ingres. C'est dire l'intérêt particulier de
ce recueil, où, comme dans les précédents, chaque
dessin est l'objet d'une notice descriptive détaillée
accompagnée, le plus souvent, de sa reproduction
en fidèle phoiotypie.
O. Munsterberg. — Chinesische Kunstge-
schichte. Stuttgart. P. Neff. 2 vol. in-S", avec
figures et planches.
Dans l'absence de toute œuvre d'ensemble con-
çue sur un plan analogue, un travail pareil
est appelé à rendre les plus grands services à
ceux qui, n'ayant pas accès aux sources, en sont
réduits à fonder leur observation sur des travaux
de seconde main. Il faudrait être un encyclopé-
diste d'une espèce rare, pour traiter avec une
égals compétence les diverses matières étudiées
dans ce volume. On y trouvera l'architecture et
les arts décoratifs ou industriels, avec toutes
leurs subdivisions. Naturellement, M. Munsterberg
ne peut prétendre à la fois à une science appro-
fondie de l'architecture chinoise, des bronzes,
des étoffes, des livres, des xylographes, de la por-
celaine, des tapis, des verres, mais il peut se pré-
valoir d'avoir donné une idée d'ensemble des mani-
festations de l'art chinois dans ces divers domaines.
Pour chacun d'eux, du reste, il s'est informé aux
sources les plus sûres ; soit qu'il s'agisse de tra-
ductions de textes chinois, soit, surtout, qu'il
s'agisse de travaux dus à ceux qui ont spéciale-
ment étudié chacune de ces catégories. On peut
regretter que ces sources, si abondamment consul-
tées, ne soient citées qu'avec une extrême parci-
monie : mais il faut reconnaître que la mise en
usage de ces matériaux est bien faite et que l'au-
teur n'a cédé que rarement à la tendance d'y
ajouter des théories personnelles un peu aventxi-
reuses. L'illustration du livre est d'une extrême
abondance. Elle en est aussi l'imago fidèle. Elle
n'apporte rien d'inédit, mais elle rassemble des
documents épars ; elle les classe d'une façon ri-
goureuse, si bien que, même pour les spécialistes
des études d'archéologie orientale, elle offre
une très réelle utilité. On pourrait faire des cri-
tiques de détail : regretter, par exemple, l'oubli
complet des xylographes bouddhiques, qui nous
livrent des documents du plus haut intérêt et qui
eussent pu occuper une page ou deux de la sec-
tion consacrée aux gravures sur bois. On pourrait
préférer parfois des documents figurés plus cer-
tains et plus démonstratifs que ceux que l'auteur
a choisis ; mais voilà, pour un ouvrage de ce
genre, des défauts de peu d'importance. Il faut
reconnaître que M. Munsterberg nous a donné,
sous une forme maniable, dans un classement bien
ordonné et avec une illustration très abondante,
un traité de vulgarisation sur l'art chinois qui
permettra à tous ceux que la question intéresse, de
se mettre au courant d'une manière assez appro-
fondie pour passer ensuite à l'étude de travaux
plus spéciaux. .Raphaël Petrucci.
-——<—^ûyo^e3CT*n3sû^-»-
NÉCROLOGIE
Jules Lefebvre
Le peintre Jules-Joseph Lefebvre, membre de
l'Institut, est mort à Paris, samedi dernier, 24 fé-
vrier, à l'âge de soixante-seize ans. Il était né le
14 mars 1836 à Tournan (Seine-et Marne).
Il commença ses études de dessin à Amiens, l'ut
à Paris élève de Léon Gogniet et entra à l'Ecole
des Beaux-Arts en 1852. Une première fois, il con-
courut pour le prix de Home en 1859, mais ne l'ob-
tint qu'on 1801, sur ce sujet : La Mort de Priam.
A son retour de Rome, il fit à la fois des por-
traits et des figures do femmes qui attirèrent l'at-
tention sur lui par la correction du dessin, le
charme discret de la couleur, la chasteté des nus.
Ses premières œuvres s'appelèrent La Veille de
Noël, La Charité romaine, qui est au Musée de
Melun ; Pèlerinage au Sacro Spcco, Jeune fille
endormie, Nymphe et Bacchus (1866, Musée du
Luxembourg) ; La Vérité, nue, debout, tenant un
miroir (1870 ; musée du Luxembourg), une do ses
œuvres les plus célèbres qui lui valut la croix de
la Légion d'honneur ; puis Madeleine. Pandore,
Yvonne, Mignon, Ondine, Fiametta, Nymphe
chasseresse, Gra^iella, Diane surprise au milieu
de ses nymphes dont l'Hôtel de ville d-3 Paris a
fait l'acquisition, taure, l'épisode de Lady Go-
diva, qui eut aussi un grand succès et que possède
le musée d'Amiens, etc.
Les portraits qu'il peignit entre temps sont nom-
breux; en dehors de quelques portraits masculins
(entre autres celui du Prince impérial (1874), au-
jourd'hui à Versailles, celui de M. F. Pelpel
(1880), etc., ce sont surtout des portraits de
femmes (portraits de sa fille, de M"' Madeleine
Lemaire, do fit™' Peylel. etc.) traités, comme toutes
les œuvres précédentes, suivant toutes les formules
académiques, avec probité, dans une facture lisse
et des colorations atténuées. Il figura à tous les
Salons de la Société d-'s Artistes français jusqu'en
1910, où son envoi s'appelait La Vestale condam-
née (1).
Longtemps professeur à l'École des Beaux-Arts
il y forma, ainsi que dans les ateliers Julian, de
nombreux élèves, dont plusieurs sont devenus cé-
lèbres.
Voici quelles sont les récompenses obtenues par
Jules Lefebvre : prix de Rome en 1861, médaillé en
1865, 1868 et 1870,chevalier delà Légion d'honneur
la même année, médaillé de lr° classe à l'Exposi-
tion Universelle en 1S78, promu officier à la suite
de cette Exposition, titulaire de la médaille d'hon-
neur au Salon de 18S6, grand prix à l'Exposition
Universelle de 1889, membre de l'Institut en 1891,
commandeur de la Légion d'honneur en 1895. Il fat
membre du jury, hors concours, à l'Exposition
Universelle de 1900.
On annonce aussi la mort du peintre Mèdéric
Bottin, décédé cette semaine au Canet (Alpes-Ma-
ritimes), à l'âge de trente-huit ans.
(1) La Gazette des Beaux-Arts a reproduit de
Jules'Lefebvre : Le Réce (1875), Chloê (1875), Ma-
deleine (eau-forte de l'artiste d'après sou tableau,
18^6), Pandore (1877), Laure (1885).