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LA CHRONIQUE DES ARTS
C’est au point de vue de celle-ci que s’est placé
surtout l’auteur, sans négliger, cela va sans dire,
les renseignements archéologiques et héraldiques,
voire ceux de généalogie et de biographie que four-
nissent les épitaphes. Les dalles tombales alle-
mandes sont exceptionnellement intéressantes en
fait de blason ; l’arrangement décoratif aussi, un
peu bien touffu, est riche, ingénieux ; quant aux
effigies, elles présentent, au même titre qu'ailleurs,
d’abondantes et précises indications pour le cos-
tume.
Le travail de M. Leonliardt, illustré de nom-
breuses reproductions, se termine par des tables
et un véritable catalogue ; il ne sera pas moins
utilement consulté que celui de son confrère an-
Von alter und æltester Bauernkunst, von R.
Fokrer (43 p. av. 33 fig.);—Schœne Gartenkunst
von J.-A. Lux (64 p. av. 31 fig.); — Religion
und Kunst, von Joh. Gaulke (52 p. av. 8 fig.
hors texte); — Anfænge der Kunst und der
Schrift, von Th. Kirchberger (49 p. av. 20fig.);
— Von deutscher Kunst, von K. Wœrmann
(85 p. av. 60 fig.) ; — Antoine Watteau, von
E. Borkowsicy (48 p. av. 12 fig.); — Das
Bewegungsproblem in der bildenden Kunst,
von L. Volkmann (62 p. av. 30 fig.); — Kætbe
Kollwitz, von Hans W. Singer (49 p. av. 22 fig.);
— Schœn und prattisch, von Konrad Lange
(217 p.) ; — Esslingen, P. Neff Verlag (Max
Schreiber). In-16 (Collection des Führer zur
Kunst. Chaque volume cartonné : 1 mark).
Il n’est peut-être pas de maison d’édition qui
n’ait maintenant sa collection de monographies
artistiques. Nous en avons déjà signalé ici plu-
sieurs. En voici une nouvelle qui n’est pas parmi les
moins attrayantes. Elle ne s’astreint pas, comme
la plupart des autres, à un programme uniforme :
biographies d’artistes, ou histoire de telle branche
ou de telle période de l'art; vaguant à travers tout
le domaine artistique, elle se propose uniquement
de fournir, avec l’aide de plumes autorisées, des
« guides » illustrés, instructifs et agréables, à tra-
vers diverses questions d’histoire ou d’esthétique,
et les thèmes les plus variés, — on peut s’en con-
vaincre par les titres ci-dessus des derniers volu-
mes parus dans cette collection, qui en comprend
déjà une vingtaine — sont l’objet de ces disserta-
tions où les auteurs s'efforcent avant tout d’aider
à la connaissance, à la compréhension et à la
jouissance des œuvres étudiées.
M. R. Forrer, par exemple, nous fait goûter la
saveur des œuvres d’art populaires : meubles,
toiles peintes, ustensiles de toute sorte encore en
usage dans les provinces fidèles aux traditions
d’autrefois ou conservés dans les musées ethno-
graphiques ; il en montre les caractères dans les
différents pays : Alsace, Allemagne, pays Scandi-
naves, Islande, etc. et à diverses époques, remon-
tant même aux Byzantins, aux Grecs de l’époque
classique et jusqu’aux temps préhistoriques (gra-
vures sur os de renne).
On peut joindre à cette étude le très intéressant
volume que M. Th. Kirchberger a consacré à
l’histoire des origines populaires de l’art et de
l’écriture figurée. La question a été traitée magis-
tralement dans la Gazette des Beaux-Arts (1), par
M. Edmond Pottier. On aura plaisir à en repren-
dre l'étude dans ce petit livre et à (consulter les
curieux documents réunis pour l’illustrer : hiéro-
glyphes égyptiens, ancienne écriture chinoise
figurée, idéogrammes de peuplades sauvages, des-
sins australiens sur écorces d'arbres, etc.
M. J.-A. Lux étudie à travers les âges, d’après
les documents figurés (décors de tableaux, an-
ciennes gravures, plans, etc.), l’art des jardins.
Après les jardins de l’antiquité, voici les haies
de roses où les Primitifs colonais ont placé leurs
Madones, les jardins maures d’Espagne, les no-
bles perspectives des jardins italiens de la Renais-
sance, les jardins du xvu* et du xvhi* siècle, des
jardins viennois de style baroque, un jardin à
l’époque Empire, un jardin de couvent à Salz-
bourg, des jardins rustiques, enfin plusieurs dessins
de jardins de style moderne dus à divers artistes.
L’évolution est intéressante et poétiquement dé-
crite ; l’illustration seule pèche par plusieurs la-
cunes qu’il serait facile de combler dans une
nouvelle édition.
La religion dans l’art est un sujet plus sédui-
sant et plus riche encore. M. J. Gaulke l’a traité
de façon savante, et même peut-être avec trop de
prétention philosophique, étudiant les rapports de
ces deux éléments de la civilisation successivement
dans l'antiquité égyptienne, grecque et romaine,
aux débuts du christianisme, au Moyen âge et à
la Renaissance, à l’époque de la Réforme, en Hol-
lande, enfin, de nos jours, avec des artistes comme
Uhde, Bœcklin et Klinger (pourquoi n’y avoir
pas joint un Rossetti, un Puvis de Chavannes, un
Dulac ?)
Le volume que M. Karl Wœrmann a consacré à
l’art allemand est un des meilleurs de la collection.
Ce petit livre est une conférence où l’auteur, après
avoir mis en relief les caractères distinctifs de l’art
germanique, en résume l’évolution dans une large
vue d’ensemble, à laquelle concourent dos exemples
significatifs empruntés aux monuments de l’archi-
tecture, de la sculpture, de la peinture et de la gra-
vure, et où aucune considération essentielle ne
manque, même sur l’art le plus moderne.
Notre art français est représenté dans cette col-
lection par un volume sur ce peintre délicieux, en
qui se résument nos meilleures qualités : Wat-
teau. M. E. Borkowsky en a parlé avec goût, et
l’illustration offre un bon choix des principales
peintures du maître et de quelques-uns de ses
dessins.
Au contraire, c’est une artiste contemporaine,
M"* Kæte Kollwitz, dont nos lecteurs connaissent
déjà le viril talent et les eaux-fortes si colorées (t),
a fait l’objet d’une remarquable étude de M. Hans W.
Singer. L’éminent critique a bien mis en relief le ca-
ractère original de cette âpre inspiration et la beauté
farouche, la puissance d’évocation saisissante
d’œuvres telles que La Guerre des Paysans, La
Carmaynole, le cycle des Tisserands, etc., repro-
duites dans le livre.
C’est une question d’esthétique qu’a traitée M. L.
Volkmann; il a étudié dans l’histoire de l’art la
façon dont les artistes de tous les temps ont com-
pris et su rendre le mouvement, depuis le Discobole
(auquel une photographie instantanée d’un lanceur
de disque sert de contrôle) jusqu’aux représenta-
tions du galop du cheval et d’une automobile, en
passant par les chevaux de la frise du Parthénon,
(1) N* du 1" décembre 1907.
(1) V. Gazette des Beaux-Arts, 1902,1.1, p. 137.
LA CHRONIQUE DES ARTS
C’est au point de vue de celle-ci que s’est placé
surtout l’auteur, sans négliger, cela va sans dire,
les renseignements archéologiques et héraldiques,
voire ceux de généalogie et de biographie que four-
nissent les épitaphes. Les dalles tombales alle-
mandes sont exceptionnellement intéressantes en
fait de blason ; l’arrangement décoratif aussi, un
peu bien touffu, est riche, ingénieux ; quant aux
effigies, elles présentent, au même titre qu'ailleurs,
d’abondantes et précises indications pour le cos-
tume.
Le travail de M. Leonliardt, illustré de nom-
breuses reproductions, se termine par des tables
et un véritable catalogue ; il ne sera pas moins
utilement consulté que celui de son confrère an-
Von alter und æltester Bauernkunst, von R.
Fokrer (43 p. av. 33 fig.);—Schœne Gartenkunst
von J.-A. Lux (64 p. av. 31 fig.); — Religion
und Kunst, von Joh. Gaulke (52 p. av. 8 fig.
hors texte); — Anfænge der Kunst und der
Schrift, von Th. Kirchberger (49 p. av. 20fig.);
— Von deutscher Kunst, von K. Wœrmann
(85 p. av. 60 fig.) ; — Antoine Watteau, von
E. Borkowsicy (48 p. av. 12 fig.); — Das
Bewegungsproblem in der bildenden Kunst,
von L. Volkmann (62 p. av. 30 fig.); — Kætbe
Kollwitz, von Hans W. Singer (49 p. av. 22 fig.);
— Schœn und prattisch, von Konrad Lange
(217 p.) ; — Esslingen, P. Neff Verlag (Max
Schreiber). In-16 (Collection des Führer zur
Kunst. Chaque volume cartonné : 1 mark).
Il n’est peut-être pas de maison d’édition qui
n’ait maintenant sa collection de monographies
artistiques. Nous en avons déjà signalé ici plu-
sieurs. En voici une nouvelle qui n’est pas parmi les
moins attrayantes. Elle ne s’astreint pas, comme
la plupart des autres, à un programme uniforme :
biographies d’artistes, ou histoire de telle branche
ou de telle période de l'art; vaguant à travers tout
le domaine artistique, elle se propose uniquement
de fournir, avec l’aide de plumes autorisées, des
« guides » illustrés, instructifs et agréables, à tra-
vers diverses questions d’histoire ou d’esthétique,
et les thèmes les plus variés, — on peut s’en con-
vaincre par les titres ci-dessus des derniers volu-
mes parus dans cette collection, qui en comprend
déjà une vingtaine — sont l’objet de ces disserta-
tions où les auteurs s'efforcent avant tout d’aider
à la connaissance, à la compréhension et à la
jouissance des œuvres étudiées.
M. R. Forrer, par exemple, nous fait goûter la
saveur des œuvres d’art populaires : meubles,
toiles peintes, ustensiles de toute sorte encore en
usage dans les provinces fidèles aux traditions
d’autrefois ou conservés dans les musées ethno-
graphiques ; il en montre les caractères dans les
différents pays : Alsace, Allemagne, pays Scandi-
naves, Islande, etc. et à diverses époques, remon-
tant même aux Byzantins, aux Grecs de l’époque
classique et jusqu’aux temps préhistoriques (gra-
vures sur os de renne).
On peut joindre à cette étude le très intéressant
volume que M. Th. Kirchberger a consacré à
l’histoire des origines populaires de l’art et de
l’écriture figurée. La question a été traitée magis-
tralement dans la Gazette des Beaux-Arts (1), par
M. Edmond Pottier. On aura plaisir à en repren-
dre l'étude dans ce petit livre et à (consulter les
curieux documents réunis pour l’illustrer : hiéro-
glyphes égyptiens, ancienne écriture chinoise
figurée, idéogrammes de peuplades sauvages, des-
sins australiens sur écorces d'arbres, etc.
M. J.-A. Lux étudie à travers les âges, d’après
les documents figurés (décors de tableaux, an-
ciennes gravures, plans, etc.), l’art des jardins.
Après les jardins de l’antiquité, voici les haies
de roses où les Primitifs colonais ont placé leurs
Madones, les jardins maures d’Espagne, les no-
bles perspectives des jardins italiens de la Renais-
sance, les jardins du xvu* et du xvhi* siècle, des
jardins viennois de style baroque, un jardin à
l’époque Empire, un jardin de couvent à Salz-
bourg, des jardins rustiques, enfin plusieurs dessins
de jardins de style moderne dus à divers artistes.
L’évolution est intéressante et poétiquement dé-
crite ; l’illustration seule pèche par plusieurs la-
cunes qu’il serait facile de combler dans une
nouvelle édition.
La religion dans l’art est un sujet plus sédui-
sant et plus riche encore. M. J. Gaulke l’a traité
de façon savante, et même peut-être avec trop de
prétention philosophique, étudiant les rapports de
ces deux éléments de la civilisation successivement
dans l'antiquité égyptienne, grecque et romaine,
aux débuts du christianisme, au Moyen âge et à
la Renaissance, à l’époque de la Réforme, en Hol-
lande, enfin, de nos jours, avec des artistes comme
Uhde, Bœcklin et Klinger (pourquoi n’y avoir
pas joint un Rossetti, un Puvis de Chavannes, un
Dulac ?)
Le volume que M. Karl Wœrmann a consacré à
l’art allemand est un des meilleurs de la collection.
Ce petit livre est une conférence où l’auteur, après
avoir mis en relief les caractères distinctifs de l’art
germanique, en résume l’évolution dans une large
vue d’ensemble, à laquelle concourent dos exemples
significatifs empruntés aux monuments de l’archi-
tecture, de la sculpture, de la peinture et de la gra-
vure, et où aucune considération essentielle ne
manque, même sur l’art le plus moderne.
Notre art français est représenté dans cette col-
lection par un volume sur ce peintre délicieux, en
qui se résument nos meilleures qualités : Wat-
teau. M. E. Borkowsky en a parlé avec goût, et
l’illustration offre un bon choix des principales
peintures du maître et de quelques-uns de ses
dessins.
Au contraire, c’est une artiste contemporaine,
M"* Kæte Kollwitz, dont nos lecteurs connaissent
déjà le viril talent et les eaux-fortes si colorées (t),
a fait l’objet d’une remarquable étude de M. Hans W.
Singer. L’éminent critique a bien mis en relief le ca-
ractère original de cette âpre inspiration et la beauté
farouche, la puissance d’évocation saisissante
d’œuvres telles que La Guerre des Paysans, La
Carmaynole, le cycle des Tisserands, etc., repro-
duites dans le livre.
C’est une question d’esthétique qu’a traitée M. L.
Volkmann; il a étudié dans l’histoire de l’art la
façon dont les artistes de tous les temps ont com-
pris et su rendre le mouvement, depuis le Discobole
(auquel une photographie instantanée d’un lanceur
de disque sert de contrôle) jusqu’aux représenta-
tions du galop du cheval et d’une automobile, en
passant par les chevaux de la frise du Parthénon,
(1) N* du 1" décembre 1907.
(1) V. Gazette des Beaux-Arts, 1902,1.1, p. 137.