LE GRAND CAMÉE DE VIENNE
(PLANCHE 3i.)
Parmi les objets d'art que nous a laissés l'antiquité, il en est peu dont l'histoire soit
plus obscure, plus entourée de légendes que celle des camées. Le Moyen-Age a souvent
remplacé par des fables l'histoire des monuments figurés qu'il ne comprenait pas, et
prêté un sens chrétien à des sujets entièrement païens. Telle fut la légende du bas-relief
des Baux, où la piété des fidèles voulut voir les saintes Maries, honorées dans la
Camargue et le pays d'Arles; tel aussi fut le sort du camée de Chartres, qui représente
Jupiter et dans lequel tous les inventaires de la cathédrale de Chartres virent presque
jusqu'au xviT siècle un saint Jean l'Evangéliste h
Les plus belles pierres gravées appartenaient généralement à des trésors d'églises
cathédrales ou conventuelles, qui les avaient reçues en don, et qui, ne voyant dans le
sujet qui s'y trouvait que la représentation d'un fait religieux, transformaient les dieux
de l'Olympe, les empereurs romains en patriarches, en évangélistes, augmentant
encore ainsi, par ces fausses appréciations, les ténèbres qui entouraient leur origine.
C'est ainsi que le camée de la Sainte-Chapelle s'appelait le Triomphe de Joseph, avant
que Peiresc lui restituai, en 1619,*son véritable nom d'agate de Tibère; en même
temps, le savant archéologue faisait venir de Vienne une épreuve sur soufre du Grand
Camée auquel il donnait le nom de Triomphe d'Auguste?, que Kœhler a changé depuis
en Gloire d'Auguste h Peiresc décrivait cette pierre magnifique : il disait comment elle
était parvenue dans le Trésor des empereurs d'Allemagne. Rapporté de Palestine par les
chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, donné par eux à Philippe le Bel, légué parle
roi au couvent des religieuses de Poissv, qu'il avait fondé en 1304, ce camée aurait été
pris au xvù siècle pendant les guerres de religion (1562) et vendu douze mille écus d'or
à Rodolphe 11 h
1. Mé!y, Le TWsor & CimUres. Paris, Picard, 1886,
in-8°, p. 36 , pl. x.
2. Gassendi, Pic & Peiresc. ltagæ Cotnituni, Adrians
Vlacq , 165o , in-8°, i. 1U , p. III.
Dans l'/7M7nntoire des ?77edaiiies, proreores^ pio7'res pre-
Geoses et poids mdiqMesde /CM N. & Peiresc, nous trouvons
n un tabieau de !a m'ain de M. Rubens, représentant l'apo-
théose d'Auguste, tiré sur l'original qui est en agathe à la
Sainte Chapelle de Paris, un autre tableau de la main de
M. Nicolas, de l'apothéose d'Auguste vivant, tiré sur l'ori-
ginal de l'agathe qui est aujourd'hui au cabinet de l'Em-
pereur.» (GiueMe des Pecnu; Arts, t. XIV, 2e périodes P-
422). Ce document nous montre combien Peiresc attachait
d'importance à ces deux Camées.
3. L. Stephani, (nowes coTopiètes do ÆeeMor. Saint-
Pétersbourg, in-8o, t. V, p. 21.
4. /or/o SM&ioPiTM; ?77ercotores
i/7 Gor77MMin777 oc direi7derM7it Podoipdo 7/
duodeci??! ?7GGii7;ts o?!roo7'M777. — Gassendi, Pic de Peiresc,
1. 111, p. 111.
(PLANCHE 3i.)
Parmi les objets d'art que nous a laissés l'antiquité, il en est peu dont l'histoire soit
plus obscure, plus entourée de légendes que celle des camées. Le Moyen-Age a souvent
remplacé par des fables l'histoire des monuments figurés qu'il ne comprenait pas, et
prêté un sens chrétien à des sujets entièrement païens. Telle fut la légende du bas-relief
des Baux, où la piété des fidèles voulut voir les saintes Maries, honorées dans la
Camargue et le pays d'Arles; tel aussi fut le sort du camée de Chartres, qui représente
Jupiter et dans lequel tous les inventaires de la cathédrale de Chartres virent presque
jusqu'au xviT siècle un saint Jean l'Evangéliste h
Les plus belles pierres gravées appartenaient généralement à des trésors d'églises
cathédrales ou conventuelles, qui les avaient reçues en don, et qui, ne voyant dans le
sujet qui s'y trouvait que la représentation d'un fait religieux, transformaient les dieux
de l'Olympe, les empereurs romains en patriarches, en évangélistes, augmentant
encore ainsi, par ces fausses appréciations, les ténèbres qui entouraient leur origine.
C'est ainsi que le camée de la Sainte-Chapelle s'appelait le Triomphe de Joseph, avant
que Peiresc lui restituai, en 1619,*son véritable nom d'agate de Tibère; en même
temps, le savant archéologue faisait venir de Vienne une épreuve sur soufre du Grand
Camée auquel il donnait le nom de Triomphe d'Auguste?, que Kœhler a changé depuis
en Gloire d'Auguste h Peiresc décrivait cette pierre magnifique : il disait comment elle
était parvenue dans le Trésor des empereurs d'Allemagne. Rapporté de Palestine par les
chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, donné par eux à Philippe le Bel, légué parle
roi au couvent des religieuses de Poissv, qu'il avait fondé en 1304, ce camée aurait été
pris au xvù siècle pendant les guerres de religion (1562) et vendu douze mille écus d'or
à Rodolphe 11 h
1. Mé!y, Le TWsor & CimUres. Paris, Picard, 1886,
in-8°, p. 36 , pl. x.
2. Gassendi, Pic & Peiresc. ltagæ Cotnituni, Adrians
Vlacq , 165o , in-8°, i. 1U , p. III.
Dans l'/7M7nntoire des ?77edaiiies, proreores^ pio7'res pre-
Geoses et poids mdiqMesde /CM N. & Peiresc, nous trouvons
n un tabieau de !a m'ain de M. Rubens, représentant l'apo-
théose d'Auguste, tiré sur l'original qui est en agathe à la
Sainte Chapelle de Paris, un autre tableau de la main de
M. Nicolas, de l'apothéose d'Auguste vivant, tiré sur l'ori-
ginal de l'agathe qui est aujourd'hui au cabinet de l'Em-
pereur.» (GiueMe des Pecnu; Arts, t. XIV, 2e périodes P-
422). Ce document nous montre combien Peiresc attachait
d'importance à ces deux Camées.
3. L. Stephani, (nowes coTopiètes do ÆeeMor. Saint-
Pétersbourg, in-8o, t. V, p. 21.
4. /or/o SM&ioPiTM; ?77ercotores
i/7 Gor77MMin777 oc direi7derM7it Podoipdo 7/
duodeci??! ?7GGii7;ts o?!roo7'M777. — Gassendi, Pic de Peiresc,
1. 111, p. 111.