COLLECTION VAIN DEN EECKE-BÀUT. /|9
houppes de cheveux gris, bouclés aux tempes, barbe grise arrondie en
ses deux parties égales, séparées au meuton. Visage austère, triste, pro-
fondément creusé au front par des rides. Cette tête est d'un modelé
solide, mais un peu sec, trop positif pour être sorti du pinceau de Rem-
brandt. Je doute de l'authenticité de cette œuvre, qu'on me pardonne
mon audace, malgré les grandes qualités qui s'y révèlent. Il est bon
d'ajouter cependant que le fond d'un gris fauve, plaqué de taches, et les
vêtements noirs paraissent avoir été repeints, ou tout au moins retouchés
largement. On n'y retrouve point ces dessous à la fois transparents et
solides qui font l'admiration des peintres dans les œuvres de Rembrandt.
Tout y est plein, lourd, et ne s'harmonise plus avec le visage, malgré la
dureté exceptionnelle de son modelé.
Mais à qui attribuer alors cette tête de Rembrandt? Ce n'est point à
Ferdinand Bol, qui n'a jamais tant de franchise de modelé, qui n'attaque
jamais ses plans avec une telle certitude. Ce n'est pas non plus à Fabri-
cins, l'auteur de cette superbe tête de jeune homme qui est au musée
de Rotterdam, et qu'on a si longtemps crue appartenir à Rembrandt.
Fabricius est plus gras, plus onctueux dans sa fermeté. Van der Helst
est plus joli; nulle part il n'a cette touche hardie, ni ce ton brûlé. Ce
n'est pourtant point de Rembrandt. Le caractère de la tête, qui a des
rapports avec les types classiques, me semble ne point être du style de
Rembrandt. Il faudrait, pour qu'il eût peint cette physionomie, qu'il
eût été influencé par quelque image étrangère à ses préoccupations;
et c'est là une hypothèse difficile à admettre. Y a-t-il une signature?
Je ne sais. En tous cas, le catalogue nous édifiera à ce sujet.
On peut voir, par cette analyse écourtée, que la collection van den
Hecke-Baut enrichit positivement le musée d'Anvers. Le Jean Steen, le
Jacob Ruijsdael, les deux petits Rembrandt, le Rubens, le Nicolas
Berchem, sont des œuvres qui attireraient partout l'attention et qui sont
dignes d'admiration. Le Paysage de Ruijsdael ainsi que le Samson de
Jean Steen sont cle première qualité. On peut en dire autant du Ber-
chem. et du Berckheyde, dans un ordre inférieur. Les deux petites têtes
de Rembrandt et le Rubens sont très-curieux dans l'œuvre de ces
maîtres. Et Ton ne peut finir cet article sans un témoignage cle recon-
naissance à la mémoire de mademoiselle van den Hecke-Baut, la géné-
reuse donatrice de cette belle réunion d'œuvres diverses, si intéressantes
â étudier.
EMILE LEGLERCQ.
IX.
houppes de cheveux gris, bouclés aux tempes, barbe grise arrondie en
ses deux parties égales, séparées au meuton. Visage austère, triste, pro-
fondément creusé au front par des rides. Cette tête est d'un modelé
solide, mais un peu sec, trop positif pour être sorti du pinceau de Rem-
brandt. Je doute de l'authenticité de cette œuvre, qu'on me pardonne
mon audace, malgré les grandes qualités qui s'y révèlent. Il est bon
d'ajouter cependant que le fond d'un gris fauve, plaqué de taches, et les
vêtements noirs paraissent avoir été repeints, ou tout au moins retouchés
largement. On n'y retrouve point ces dessous à la fois transparents et
solides qui font l'admiration des peintres dans les œuvres de Rembrandt.
Tout y est plein, lourd, et ne s'harmonise plus avec le visage, malgré la
dureté exceptionnelle de son modelé.
Mais à qui attribuer alors cette tête de Rembrandt? Ce n'est point à
Ferdinand Bol, qui n'a jamais tant de franchise de modelé, qui n'attaque
jamais ses plans avec une telle certitude. Ce n'est pas non plus à Fabri-
cins, l'auteur de cette superbe tête de jeune homme qui est au musée
de Rotterdam, et qu'on a si longtemps crue appartenir à Rembrandt.
Fabricius est plus gras, plus onctueux dans sa fermeté. Van der Helst
est plus joli; nulle part il n'a cette touche hardie, ni ce ton brûlé. Ce
n'est pourtant point de Rembrandt. Le caractère de la tête, qui a des
rapports avec les types classiques, me semble ne point être du style de
Rembrandt. Il faudrait, pour qu'il eût peint cette physionomie, qu'il
eût été influencé par quelque image étrangère à ses préoccupations;
et c'est là une hypothèse difficile à admettre. Y a-t-il une signature?
Je ne sais. En tous cas, le catalogue nous édifiera à ce sujet.
On peut voir, par cette analyse écourtée, que la collection van den
Hecke-Baut enrichit positivement le musée d'Anvers. Le Jean Steen, le
Jacob Ruijsdael, les deux petits Rembrandt, le Rubens, le Nicolas
Berchem, sont des œuvres qui attireraient partout l'attention et qui sont
dignes d'admiration. Le Paysage de Ruijsdael ainsi que le Samson de
Jean Steen sont cle première qualité. On peut en dire autant du Ber-
chem. et du Berckheyde, dans un ordre inférieur. Les deux petites têtes
de Rembrandt et le Rubens sont très-curieux dans l'œuvre de ces
maîtres. Et Ton ne peut finir cet article sans un témoignage cle recon-
naissance à la mémoire de mademoiselle van den Hecke-Baut, la géné-
reuse donatrice de cette belle réunion d'œuvres diverses, si intéressantes
â étudier.
EMILE LEGLERCQ.
IX.