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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 9.1861

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Nr. 4
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Blanc, Charles: De la gravure a l'eau-forte et des eaux-fortes de Jacque
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https://doi.org/10.11588/diglit.17225#0201

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19^ GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

brillent les taches claires du pelage, tandis qu'un rayon qui s'est glissé
entre deux branches pique le bout des cornes ou l'extrémité des longues
oreilles. Les tons fauves de la vache, le poil grisonnant de l'âne, forment
par places des demi-teintes chaudes ou argentées; le pâtre, qui s'appuie
sur la margelle, varie les silhouettes, accidente le drame du clair-obscur,
et, sans le savoir, il achève la grâce du troupeau... Cette image naïve a
saisi le peintre; elle s'est déjà gravée dans son esprit, et, plus elle a mordu
sur sa mémoire, plus il est impatient de la faire mordre sur le cuivre. Le
lendemain il passe à la hâte une couche de vernis sur la première planche
venue, et d'une main rapide, nerveuse, qui frémit encore sous le coup
de l'impression reçue, il dessine, ou, pour mieux dire, il colore toute la
scène champêtre, présente à ses regards; d'avance il la voit se peindre
en relief sur ce fond noir du vernis, qui va devenir le fond blanc du papier;
il verse l'acide, se brûle les doigts, fait mordre au jugé, court chez l'im-
primeur, obtient une épreuve... l'eau-forte est enlevée!

On conçoit maintenant pourquoi ces sortes d'estampes sont si avide-
ment recherchées par les artistes et par les vrais amateurs : c'est juste-
ment parce qu'elles ont un caractère intime et une apparence d'impro-
visation. L'eau-forte, telle que nous l'entendons, est un pur dessin,
c'est-à-dire l'œuvre d'un maître qui écrit lui-même sa pensée à mesure
qu'il l'invente, et qui nous la transmet sans l'intermédiaire d'un traduc-
teur; mais c'est un dessin à plusieurs exemplaires, et, chose bizarre, clans
le monde des curieux, où toute valeur augmente en raison de la rareté,
une planche de laquelle on peut tirer un assez grand nombre d'épreuves
est souvent plus estimée qu'un dessin unique. Il est certain que le plus
beau lavis de Rembrandt n'a jamais été payé au même prix qu'une
épreuve de la Pièce de cent florins ou du Bourgmestre Six. A vrai dire,
un dessin à la plume ou à la pierre noire, ou même à la sanguine, ne sau-
rait avoir la saveur, le piquant d'une eau-forte, parce que ni le crayon
ni l'encre ne peuvent arriver à ce beau noir velouté de l'imprimeur, qui
forme dans la gamme du clair-obscur la note la plus grave, et sans
lequel on n'obtient qu'un effet incolore et nuageux. Quoi qu'il en soit,
l'eau-forte dont nous voulons parler aujourd'hui est un dessin sur
cuivre exécuté par un peintre. Les graveurs en taille-douce, pour abré-
ger leur besogne, ont bien associé le travail de l'acide à celui du burin,
dans la préparation de leurs planches, sauf à rentrer ensuite chaque taille
avec l'échoppe, et à faire disparaître ainsi les inégalités de là morsure et
les bavures du sillon; quelques-uns même, Gérard Audran, par exemple,
et Suyderhoef, craignant que la régularité des alignements et le poli
excessif des coupes du cuivre ne vinssent refroidir l'aspect frémissant et
 
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