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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 12.1862

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Nr. 3
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Blanc, Charles: Grammaire des arts du dessin, 1, Architecture, 11: architecture, sculpture, peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.17331#0254

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246 GAZETTE Dl'.S BEAUX-ARTS.

lies, en coulisse, à double bascule, en compas, en poutres empaillées, en
barques renversées, en cordes tendues... Dans les pays plats, les monu-
ments s'élèvent davantage, comme pour tenir lieu d'observatoires, et,
sans sortir de France, nous pouvons constater que les tours de nos plus
hautes cathédrales dominent de vastes plaines à perte de vue. Au nord,
dans les pays voilés, bas et monotones, l'architecture remue ses con-
tours et multiplie ses nuances ; elle détache sur le gris du ciel des toi-
tures déchiquetées et souvent colorées.

Quand la végétation est absente ou rare, l'architecte y supplée, au-
tant qu'il peut, par les ressources de la ligne et de la couleur. Par
exemple, le voyageur qui regarde Venise du haut d'un campanile s'ex-
plique aussitôt l'architecture vénitienne. Sur le sol ingrat qu'ils ont dis-
puté aux lagunes, les Vénitiens ont voulu compenser, par les décorations
architectoniques, la stérilité morne d'une patrie sans arbres, sans prai-
ries et sans fleurs. De là les innombrables édifices qui appellent et
occupent sans cesse le regard. De tous côtés se dressent des clochers
rouges, des tours roses, des flèches élégantes, tantôt quadrangulaires,
tantôt coniques. Ici, c'est une basilique avec cinq coupoles qui paraissent
lamées d'argent; là, c'est un dôme aux côtes rugueuses, aux enroule-
ments de pierre, qui passe par tous les effets de la lumière et de l'ombre,
de l'aurore au couchant. Plus loin c'est une église qui se termine par une
calotte de cuivre, puis une autre qui est flanquée d'aiguilles légères. Çà
et là, sur l'étendue des lagunes, flottent des monuments qui forment
comme des îles d'architecture. Tel bureau de douane s'annonce par une
énorme boule d'or; telle façade est toute décorée de mosaïques; telle
autre se hérisse de statues, ou bien se colore de revêtements magnifiques
et enchante l'œil par les tons caressants des plus riches marches, le vert
de mer, le jaune antique, la brocatelle de Vérone, le bleu turquin, la
brèche rose. Ensuite se déroule une rangée de palais arabes aux devan-
tures découpées en dentelles, qui laissent entrevoir des perspectives
profondes et qui réunissent le charme du mystère à la gaieté d'une
façade percée à jour... C'est à Venise surtout qu'il faut aller, pour voir
comment l'architecture subit l'influence du sol qui lui sert de base, soit
qu'elle en cache la tristesse, soit qu'elle en achève et en couronne la
beauté.

CTIVRLES BLA^C.
 
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