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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 20.1866

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Nr. 3
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Blanc, Charles: Grammaire des arts du dessin, 3, Peinture, 11-12: architecture, sculpture, peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.19277#0251

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GRAMMAIRE DES ARTS DU DESSIN.

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Fille de la lumière, la peinture crée à son tour une lumière à elle, et
tout en imitant les effets lumineux qu’elle a observés dans la nature, elle
porte en elle-même les éléments de sa clarté et de son obscurité. Il n’en
est pas du peintre comme de l’architecte ou du sculpteur, dont les palpa-
bles créations sont soumises à la puissance mobile et changeante de la
lumière naturelle. Tel monument qui paraît simple et grandiose au clair
de lune, peut perdre ces qualités au grand jour, s’il est chargé de détails
et rapetissé par une abondance d’ornements superflus qui avaient disparu
à l’incertaine clarté de la nuit. Telle sculpture expressive, presque tragi-
que, comme le Pensieroso de Michel-Ange, pourrait changer de caractère
si on la changeait de place, et si, au lieu d’être éclairée par en haut, elle
recevait une lumière d’en bas, qui dissiperait les ombres si profondé-
ment mélancoliques dont s’enveloppe le visage du héros. Au contraire, le
peintre puise sa lumière dans sa boîte à couleurs, et lors même qu’il lui
plairait de n’employer que les différents degrés d’une couleur unique, il
est le maître de distribuer sur son œuvre le clair et l’obscur avec cette
seule couleur, pourvu qu’il se conforme aux lois de l’optique. C’est le so-
leil, il est vrai, qui éclaire la toile du peintre; mais c’est le peintre qui
éclaire lui-même son tableau. En y représentant à sa volonté les appa-
rences de la lumière et de l’ombre qu’il a choisies, il y fait tomber un
rayon de son esprit.

Libre ainsi d’illuminer son drame d’une manière qui restera invariable,
il n’a pas à craindre que la lumière extérieure vienne jamais contredire
le sentiment qui l’a inspiré, et cette liberté est justement ce qui lui per-
met de faire servir à l’expression le ménagement des lumières et des
ombres, le clair-obscur. Bien que ce mot soit quelquefois employé par
les peintres pour désigner un ton crépusculaire qui tient le milieu entre
le jour et les ténèbres, il faut entendre par clair-obscur cette partie es-
sentielle de la peinture, qui est l’art de l’éclairer.

Nous avons comparé à un bas-relief monochrome l’esquisse dessinée
du peintre. Supposons maintenant que ce bas-relief a cessé d’être un
marbre; qu’il se compose de substances diverses; que certains person-
nages y sont revêtus, dans l’ombre, de draperies claires, et, dans la lu-
mière, de draperies sombres; que, parmi les figures, il s’en trouve de ba-
sanées ou de noires; qu’il se mêle à la composition des arbres au feuillage
brun et d’autres au feuillage pâle : voilà le clair-obscur modifié par la
somme de noir et de blanc que viennent y apporter les divers éléments du
tableau. La lumière, en rencontrant des surfaces qui l’absorbent et des
surfaces qui la renvoient, a changé l’effet du dessin et en a varié l’aspect,

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