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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 20.1866

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Nr. 4
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Blanc, Charles: Grammaire des arts du dessin, 3, Peinture, 13: architecture, sculpture, peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.19277#0401

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GRAMMAIRE DES ARTS DU DESSIN.

389

toutes sortes de licences, chercher des prétextes à couleurs, introduire des
objets brillants, des meubles, des lambeaux d’étoffes, des fragments de
mosaïque, des armes, des tapis, des vases, des perrons, des murs, des
animaux d’un riche pelage, des oiseaux d’un riche plumage, et ainsi les
couches inférieures de la nature prendront peu à peu la première place
et le disputeront à la dignité des figures humaines, qui seules doivent
occuper la cime de l’art, parce que seules elles représentent la plus haute
expression de la vie, qui est la pensée.

Oui, en poursuivant avec passion le triomphe de la couleur, le peintre
court risque de sacrifier l’action au spectacle. Aussi, que font nos colo-
ristes? Ils s’en vont en Orient, en Egypte, au Maroc, en Espagne, pour
en rapporter tout un arsenal de matériaux voyants : coussins, babouches,
narghilés, turbans, burnous, cafetans, nattes, parasols... Us se font des
héros avec les lions et les tigres. Us exagèrent l’importance du paysage ;
ils doublent l’intérêt du costume et des substances inertes, et ainsi, la
peinture devenant descriptive, le grand art déchoit insensiblement et
menace de disparaître.

Que le coloris joue donc son vrai rôle, qui est de nous amener le
cortège de la nature extérieure et d’associer les splendeurs de la création
matérielle à l’action de l’homme ou à sa présence. Surtout, que le colo-
riste choisisse dans les harmonies de la couleur celles qui semblent,
comme dit le poète, se conformer à sa pensée. Mais, qu’on le sache bien,
la prédominance de la couleur aux dépens du dessin serait une usurpa-
tion du relatif sur l’absolu, de l’apparence passagère sur la forme perma-
nente, de l'impression physique sur l’empire des âmes. De même que
les littératures inclinent à leur décadence quand les images l’emportent
sur les idées, de même l’art se matérialise et décline infailliblement lors-
que l'esprit qui dessine est vaincu par la sensation qui colore; lorsqu’en
un mot l’orchestre, au lieu d’accompagner le chant, devient à lui seul
tout le poème.

CHARLES RLANC.
 
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