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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 20.1866

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Nr. 6
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Blanc, Charles: Salon de 1866, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.19277#0513

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à98

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

ans la critique d’art, ont pu assister au triomphe et à la déchéance
d’une école, sinon de plusieurs ! Il suffit de l’intervalle de temps qui
mesure la vie moyenne, pour voir des personnages qui tenaient le haut
bout, s’éclipser peu à peu et s’effacer du souvenir au point de n’être
plus de ce monde. A moins d’avoir la juvénile ardeur et l’assurance du
novice qui ne doute de rien, on n’ose plus porter un jugement sur un
sculpteur ou un peintre qui vivent encore, dans la crainte d’être bientôt
cruellement démenti par ce tribunal suprême, qui est le temps.

Mais d’où vient cette extrême mobilité de nos opinions en peinture?
Elle tient sans doute à ce qu’il n’existe parmi nous aucun principe re-
connu, publiquement enseigné (je veux dire enseigné au public), tou-
chant la peinture et la statuaire. Au lieu de répandre à ce sujet quelques
idées saines, beaucoup de jeunes écrivains se sont dispensés d’en avoir,
croyant ou laissant croire au lecteur que les questions du beau sont com-
plètement livrées à l’arbitraire, et que l’on ne saurait discuter des goûts
pas plus que des couleurs. Là-dessus, chacun s’est contenté d’avoir des
impressions personnelles, et comme ces impressions changent constam-
ment quand rien ne les guide, les lois de l’art sont devenues une pure
affaire de caprice, une dépendance de la mode. Il en résulte, pour le dire
en passant, que la critique fait une besogne absurde et parfaitement inu-
tile. Car s’il n’y a aucun principe du beau, de quel droit se permet-on
de juger un artiste? Pourquoi le sentiment de l’écrivain vaudrait-il
mieux que celui du peintre? Et pourquoi, dès lors, ne laisserait-on pas
le public, livré à ses propres inspirations, jouir en paix de ce qui le ravit
ou se moquer à son aise de ce qui lui déplaît ?

II.

Une autre cause de ces revirements continuels du goût général, c’est
la fréquence des expositions. Fréquentes, elles sont faibles. Il ne se fait
point chaque année une somme de belles choses qui suffise pour former
un salon magnifique et imposant. Si, au lieu de se fractionner ainsi et de
s’éparpiller dans plusieurs salons successifs, l’École réunissait de temps
à autre toutes ses œuvres pour en composer une exposition solennelle,
tout s’en trouverait mieux, ce nous semble. Un plus grand nombre d’ou-
vrages remarquables donnant du lustre à la peinture, à la sculpture, à
la gravure, rehausseraient l’importance que le monde y attacherait.
Dans un salon plus riche et qui, en raison même de sa richesse, pourrait
être soigneusement épuré, sans être appauvri, les visiteurs formeraient
 
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