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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Mantz, Paul: Adrien Brauwer, 2
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https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0036

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ADRIEN BRAUWER.

0 A

01

« Notre Brauwer n’a pas deux pieds de haut; mais les figures effrayantes
et grotesques sont grandes comme ces cariatides abruptes que l’art
antique introduisait parfois dans la décoration architecturale. Oui, c’est
le grandiose de la tournure et des mouvements, je ne sais quel élan delà
forme et de la physionomie qui frappent d’abord quand on avance vers

ce tableau. Un homme est assis carrément sur un banc, le corps

tourné à droite, la tête de face, le pied droit posé sur un tabouret de
bois. II a une casaque jaunâtre, dans les tons chamois de Frans Hais,
une culotte émeraude foncée, à glands rouges, des bas couleur feuille
morte. De la main gauche il tient sa pipe, de la main droite son pot à
boire. Il a une tête de lion, à crinière ébouriffée, et il ouvre une gueule
formidable, d’où sort la fumée du tabac comme la vapeur d’une locomo-
tive. L’écarquillement de ses yeux n’est pas moins merveilleux que le
rictus de sa bouche, et il se livre à cet exercice avec une gravité à faire

trembler. » Autour de cette figure dominante se groupent quatre

autres personnages, dont Burger décrit avec soin l’attitude et le costume.
« Les fonds, dit-il encore, sont superbes : à droite, une lucarne ouverte,
par laquelle on aperçoit un paysage digne de Rembrandt; à gauche,
sur une planche, des pots rouges et des fioles, le reste neutre, d’un gris
verdâtre glacé de brun. » Et il ajoute enfin : « Tout en bas, la petite
signature Brouwer, suivie d’une date très difficile à déchiffrer, mais qui
est, je pense, 1631, ou peut-être 1630 l. »

Si cette date a été exactement lue, elle est bien voisine du moment
où Brauwer va recevoir à Anvers son brevet de maîtrise. Ce n’est donc
pas là une œuvre de début, d’autant mieux qu’elle est de l’exécution la
plus résolue et la plus vaillante. Je le répète, les commencements de
Brauwer sont presque inconnus.

Quoi qu’il en soit, on est tenté de croire, en raison d’une certaine
ressemblance dans les tons des chairs, et surtout en présence de la simi-
litude de l’idéal et de l’expression, que nous avons au Louvre une
œuvre qui, parla date, doit être singulièrement voisine du tableau que
Burger admirait dans le cabinet Steingracht. Je veux parler du Fumeur
de la galerie Lacaze. Cette peinture, que M. Gaujean a gravée pour la
Gazette, nous a toujomrs paru présenter un intérêt de premier ordre. Rien
n’est plus fortement écrit, et conséquemment rien n’est plus inoubliable.
L’étrange personnage est en buste dans des proportions qui sont celles
de la nature faiblement réduite. Vu de face et tenant des deux mains
un flacon et une pipe, l’heureux adorateur du tabac ouvre largement la

1. L’Artiste, 23 janvier 1859.
 
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