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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Chennevières-Pointel, Charles Philippe de: François Boucher par M. Paul Mantz
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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Richelieu et Fénelon ont estimé le Poussin, que ces philosophes, qui ont
fait notre monde moderne, ont d’instinct adoré le faux, le joli, le con-
venu, le gâté, le contraire du sens droit et solide, le contraire de la vraie
nature, de la vraie sincérité, que leur raison comme leur goût était en
fausse route. Ils se sont complu dans le rêve, dans le chinois, le liber-
tin et le malsain, et partant l’on en pourrait déduire que l’état social
créé par eux dans la mesure et à l’image d’un idéal ainsi perverti ne
pouvait donner que des utopies sans grandeur ni poésie, livrées par
avance à toutes les licences de la grossièreté humaine. Moi, j’aime
mieux ne voir dans François Boucher que le peintre amoureux des nym-
phes dodues et des bergères de comédie, bergères au corsage bien
ajusté, aux fines jambes etaux petits pieds blancs et bien lavés ; l’homme
aux paysages d’un vert bleuâtre, pleins de moulins et de ponts rustiques;
l’improvisateur du monde féerique et couleur de rose, où s’ébattent les
caprices sans gêne et sans fidélité de l’ancienne mythologie, celui qui
a le plus tourné et retourné sous toutes ses faces la figure sans voiles de
Vénus et a écrit, des aventures de la déesse, l’histoire la plus complète
qu’artiste ait jamais racontée ; peintre de race, après tout, et d’un beau
et libre pinceau, qui, dans son bon temps, a connu la souriante harmo-
nie, non pas, hélas! seulement l’harmonie flamande, celle dérivant de
Rubens par Watteau, et qui lui profita dès l’abord, mais plutôt celle que
les décadents italiens, les prestes et abondants décorateurs du xvn' et du
xvme siècle, les Pierre de Cortone, les Luca Giordano, les Solimène,
avaient enseignée aux Coypel, à Lemoyne, à Natoire, à Trémolières,
etqu’en adroit courtisan il conduisit tout doucement à la fadeur, pour
la mettre d’accord avec l’esprit et les lettres de son siècle. Quant à ses
voluptueuses formes féminines, arrondies et grassouillettes, replètes,
coquettes, mignardes et mollettes, on ne peut en bonne conscience lui
demander de les emprunter à l’idéal du xvie siècle, par la raison que Bou-
cher n’a jamais eu et n’a jamais prétendu avoir ce qu’on appelle d’idéal ;
elles ont tout bonnement leurs précédentes dans les Andromèdes et les
baigneuses de Lemoyne, ou dans les femmes du Giordano, dont on ne
saurait au palais Ricardi, à Florence, ne pas méconnaître la parenté
d’ancêtre avec notre Boucher; tout au plus pourraient-elles remonter aux
belles romaines du Guide. Et devait-il en être autrement dans un siècle
où le président de Brosses, bon juge en ces matières, mettait haute-
ment le Guide bien au-dessus de Raphaël ?

J’ai dit que le livre était magnifique, magnifique par la beauté et le
goût des caractères, vrai type de l’habileté renommée de l’imprimerie
Quantin, et digne de la représenter dans les plus importantes biblio-
 
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