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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Nr. 1
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Ephrussi, Charles: À propos d'une gravure inconnue du XVe siècle
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https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0101

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94

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

œuvres que nous venons d’énumérer1. Cetle priorité résulte clairement du caractère
indépendant de notre œuvre, qui n’a subi, en ce qui regarde la facture, l’influence
d’aucune école ou d’aucune tradition. Pour ces raisons, en se reportant d’ailleurs aux
déductions suggérées par le costume, on peut assigner à l’estampe de Berlin une date
voisine de 1450. L’adoption do cette date relativement reculée n’a rien de trop témé-
raire. Vers 1450 l’art de la gravure était déjà connu en Allemagne : témoins la Pas-
sion de 1446 et les planches du maître E. S., qui accusent un savoir si avancé. Les
rapports entre l’Allemagne et l’Italie étaient alors assez fréquents pour que les nou-
veaux procédés, employés dans le Nord, eussent promptement franchi les Alpes2.

Quel serait bien l'auteur de l’œuvre anonyme ?

On peut répartir les gravures italiennes du xvc siècle en deux grandes catégories.
La première, se rattachant à l’art florentin, accuse des moyens de facture propres aux
orfèvres et l’habitude du maniement du métal. A cette classe appartiennent les spéci-
mens attribués à Baccio Baldini et les épreuves de nielles qui ont illustré Maso Fini—
guerra et son école. La seconde catégorie est celle des peintres-graveurs aspirant à
produire l’effet du dessin à la plume, sans se préoccuper beaucoup des exigences du
métal et du burin; tels sont Mantegna, les artistes lombards, l’école de Léonard, peut-
être Léonard lui-même, Bramante, etc. Entre ces deux séries se placent des hommes
comme Pollajuclo, maniant dès leur début le burin avec autant d’habileté que le
pinceau.

Il ressort de ce que nous avons dit que l’auteur de notre gravure appartient à la
première catégorie. On sent, en effet, dans les lignes si arrêtées et si vigoureuses de
ce beau profil, une main titre d’elle-même, habituée à traiter le métal dont la dureté
et la résistance ne l’incommodent pas; certains défauts de perspective dans l’agrafe de
la coiffure, dans le collier et dans quelques ornements du costume révèlent encore un
artiste familiarisé avec le travail du relief; et tout en se résignant à ignorer le nom du
maître, il faudrait le chercher parmi ces grands médaillcurs du xv° siècle, comme Vit-
tore Pisano ou Matteo de’ Pasti, qui portaient leur brillante activité sur toutes les
branches de l’art; peut-être encore le trouverait-on dans l’atmosphère de Piero délia
Francesco. Remercions M. Lippmann de nous avoir présenté, avec la science de discus-
sion critique qui lui est ordinaire, un document des plus intéressants sur les origines
de la gravure italienne.

CHARLES EPIinUSSI.

1. Quanta la tête de femme attribuée à Léonard de Vinci (Passavant, t. V, p. 71, I), elle offre avec
notre gravure une analogie qui porte plutôt sur le sujet et la dimension que sur la facture; elle est des
dernières années du xvc siècle.

2. Nous laissons à M. Lippmann la responsabilité de ces conclusions, la priorité do l’invention de la
gravure étant une question des plus épineuses et des plus controversées.
 
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