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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Nr. 4
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Fillon, Benjamin: Pour qui fut peint le portrait d'Érasme par Hans Holbein
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https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0344

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LE PORTRAIT D’ÉRASME PAR HANS HOLBEIN.

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vestiges d’un cachet sur cire, où l’on distinguait avec peine les initiales
D. E. (Desiderius Erasmus) en très petits caractères. Cette empreinte
devait provenir de la seconde des bagues en question. — Une recherche
attentive dans les lettres originales d’Érasme ferait certainement retrou-
ver, à une place analogue, celle du terme gravé sur onyx.

Le document que j’analyse ouvre donc une éclaircie toute nouvelle
sur les côtés les plus intimes de la vie d’un homme qui ne livrait pas
aisément l’entrée de son foyer domestique. Il nous réserve bien d’autres
surprises.

III

Un fait acquis désormais, c’est qu’Érasme aimait les ornements de
mains. On le savait déjà, du reste, par les nombreuses représentations
qu’on possède de sa personne. On ignorait seulement qu’à la fascina-
tion instinctive qu’exerçaient sur lui les pierres précieuses venait se
joindre un autre sentiment non moins délicat. Il les aimait pour elles et
pour ceux de qui il les avait reçues. En se parant de ces bijoux, il don-
nait encore plus satisfaction à sa propre nature et à ses sentiments
d’ami qu’il ne sacrifiait à la mode de son temps. Les gemmes l’atti-
raient. Voùlait-il peindre la candeur et la limpidité de l’âme d’un homme,
il leur empruntait sa comparaison : « Je n’ai jamais vu mœurs plus
pures que les siennes », dit-il dans la lettre où il raconte à Toussain la
mort du cordelier Pierre Lamy, le maître de Rabelais, décédé à Bâle,
en 1525; « nul givre ne les altérait1. » Eût-il parlé autrement d’un
saphir ou d’une émeraude?

Sa façon de se vêtir était, d’ailleurs, sévère. Une ample robe noire
enveloppait son corps, d’une maigreur un peu maladive. De même teinte
sombre était le bonnet d’étoffe qui couvrait son chef osseux. On eût dit
quelque magistrat de petite juridiction en tenue de ville. L’hiver,
comme il était frileux, il mettait sur sa robe un long vêtement garni
de fourrures. Seules, ses mains, soigneusement entretenues, étaient
parées d’anneaux de dimension moyenne, décorés de pierres à reflets
atténués. 11 avait horreur des couleurs voyantes. Cette aversion naturelle
dut être pour quelque chose dans son refus de la pourpre romaine. Son
œil en eût été, outre mesure, effarouché.

L’inventaire de l’ensemble du mobilier d’Érasme serait fort curieux.

1. Erasmi Epislolœ (édition de Bâle, 1540, p. 1004).
 
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