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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Nr. 4
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Fillon, Benjamin: Pour qui fut peint le portrait d'Érasme par Hans Holbein
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https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0348

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LE PORTRAIT D’ÉRASME PAR HANS HOLBEIN.

331

François 1er, catholique par éducation, avait, grâce à sa sœur, des
attractions passagères en sens inverse, bien vite comprimées par l’intérêt
de sa politique, ce qui le rendait néanmoins apte à entendre, de temps à
autre, la voix de la tolérance. En s’adressant à lui, Érasme avait, à
coup sûr, agi d’après les conseils de Budé. L’envoi de son portrait, dans
ces circonstances, était le complément de la dédicace au patron de
l’humaniste français. Afin de rester absolument dans le rôle qu’il s’était
tracé, il portait au doigt le diamant du cardinal Campeggi, constitué
ainsi garant de son catholicisme, si mitigé qu’il pût être.

Les péripéties de la guerre entre François 1er et Charles-Quint empê-
chèrent vraisemblablement l’envoi du portrait à Paris, et le firent rester
chez Érasme, d'où il passa plus tard, avec le mobilier de celui-ci, en la
possession de Boniface Ainerbach; de telle sorte qu’il ne sortit jamais de
Bâle.

En résumé, il ressort de tout ce qui précède que le portrait du Salon
carré a été exécuté en 1523, et sa répétition, vers la fin de la même
année, ou bien au commencement de l’année suivante. Plusieurs copies
du temps sont conservées dans diverses grandes collections.

V

Une récente visite au Louvre m’a permis d’admirer de nouveau le
chef-d’œuvre de Ilolbein. Rarement peintre a serré d’aussi près la nature,
rarement il a traduit avec plus de sincérité la physionomie d’une créa-
ture humaine. C’est bien là Érasme, tel que nous le font comprendre
les actes de sa vie et ses œuvres écrites. Chez lui l’enveloppe corporelle
avait été façonnée tout exprès pour l’âme qu’elle contenait. Libéré
loquitur, sed auguste scribit, a dit de lui Balthazar Hubmeier, le pei-
gnant d’un seul trait. On sent à merveille que son cœur, naturellement
bon, s’était refroidi dans l’égoïsme du célibat, imposé à lui, fils de l’amour
d un prêtre, dès ses jeunes années.

Assis à son bureau, dans son étude, il écrit sur un feuillet placé
devant lui. Une tapisserie, du \ve siècle, d’un ton verdâtre, semée de
fleurettes, un coin de boiserie servent de fond. La peinture en est ferme,
chaude, largement comprise, et, avec cela, d’un fini prodigieux.

Prêt à se diriger, en image, vers Me d’Utopie, d’où certains raffine-
ments n’étaient point bannis, Érasme s’est fait presque coquet pour la
circonstance. Irréprochable est sa tenue. Il sait qu’il va prendre place
 
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