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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
mais, bien plus, on serait fort empêché de lui en attribuer d’autre que celle de
Filippo Strozzi. L’examen du style nous permet d’en rapprocher toutefois
d’autres pièces que je voudrais rapidement passer en revue. La plus voisine
est celle d’Alexandre Pagagnotti, dont le relief est bien plus accentué ; on peut
citer encore celle de Girolamo Santucci, communément attribuée àGuazza-
lotti ; en s’éloignant davantage on trouverait celles de Giovanni Tornabuoni,
de Giovanni Gaddi, mais les traits communs deviennent de plus en plus
rares. Par contre, les médailles dites du « Médailleur à l’aigle » aux effigies
de Giovanni de Contiguidi, de Giovanni Gozzadini ne sont certainement pas
de Benedetto da Majano. M. Hill met en avant le nom de ce dernier, à propos
de deux médailles de Piero et de Giovanni de’ Medici, les fils de Côme, le
Père de la Patrie, médailles reproduites dans un manuscrit d’Aristote de
la Bibliothèque Laurentienne, qui ne peut être postérieur à i46g. J’avoue
que les analogies de style que signale M. Hill ne m’ont point frappé, du
moins sur les exemplaires que j’ai eus entre les mains, à moins qu’il ne
s’agisse effectivement d’œuvres de jeunesse de Benedetto bien antérieures à
la médaille de Filippo Strozzi. Il serait alors difficile d’expliquer qu'on n’ait
point d’autres productions de Benedetto médailleur à placer dans l’intervalle
des deux dates 1465 environ - 1490 (P). Au contraire, la curiosité peut se
tenir pour satisfaite si l’on suppose que Benedetto da Majano, par exception,
s’essayant dans un art alors fort à la mode, fit une médaille de son protecteur
peu de temps après qu’on eut posé la première pierre du palais dont il avait
reçu la commande. Malheureusement pour sa réputation, les critiques et les
historiens déploreront toujours qu’il ait laissé pour toute signature sur la
belle médaille de Filippo Strozzi, si délicate et si vivante, et sur ce frêle
modèle de cire venu jusqu’à nous, l’empreinte anonyme de sa main minu-
tieuse, et que les traces légères de son âme honnête et fière soient seules à
nous suggérer son nom.
JEAN UABELON
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mais, bien plus, on serait fort empêché de lui en attribuer d’autre que celle de
Filippo Strozzi. L’examen du style nous permet d’en rapprocher toutefois
d’autres pièces que je voudrais rapidement passer en revue. La plus voisine
est celle d’Alexandre Pagagnotti, dont le relief est bien plus accentué ; on peut
citer encore celle de Girolamo Santucci, communément attribuée àGuazza-
lotti ; en s’éloignant davantage on trouverait celles de Giovanni Tornabuoni,
de Giovanni Gaddi, mais les traits communs deviennent de plus en plus
rares. Par contre, les médailles dites du « Médailleur à l’aigle » aux effigies
de Giovanni de Contiguidi, de Giovanni Gozzadini ne sont certainement pas
de Benedetto da Majano. M. Hill met en avant le nom de ce dernier, à propos
de deux médailles de Piero et de Giovanni de’ Medici, les fils de Côme, le
Père de la Patrie, médailles reproduites dans un manuscrit d’Aristote de
la Bibliothèque Laurentienne, qui ne peut être postérieur à i46g. J’avoue
que les analogies de style que signale M. Hill ne m’ont point frappé, du
moins sur les exemplaires que j’ai eus entre les mains, à moins qu’il ne
s’agisse effectivement d’œuvres de jeunesse de Benedetto bien antérieures à
la médaille de Filippo Strozzi. Il serait alors difficile d’expliquer qu'on n’ait
point d’autres productions de Benedetto médailleur à placer dans l’intervalle
des deux dates 1465 environ - 1490 (P). Au contraire, la curiosité peut se
tenir pour satisfaite si l’on suppose que Benedetto da Majano, par exception,
s’essayant dans un art alors fort à la mode, fit une médaille de son protecteur
peu de temps après qu’on eut posé la première pierre du palais dont il avait
reçu la commande. Malheureusement pour sa réputation, les critiques et les
historiens déploreront toujours qu’il ait laissé pour toute signature sur la
belle médaille de Filippo Strozzi, si délicate et si vivante, et sur ce frêle
modèle de cire venu jusqu’à nous, l’empreinte anonyme de sa main minu-
tieuse, et que les traces légères de son âme honnête et fière soient seules à
nous suggérer son nom.
JEAN UABELON