LA TOMBE EN PHÉNIGIE. 145
les élargit et les aménagea; l'habitude était si bien prise que, lors
même qu'on sut tailler et assembler la pierre, on resta fidèle à l'ancien
usage. Presque toutes les tombes phéniciennes sont donc des caveaux
souterrains. C'est tout à fait par exception que Ton rencontre quelques
tombeaux qui dérogent à cette règle. Tel est, par exemple, un des plus
curieux monuments d'Amrith, le Burdj-el-Bezzâk (fig. 6). Les chambres
qu'il renferme et dont le caractère funéraire n'est pas contestable se
trouvent bien dans un édifice construit au-dessus du sol ; mais il n'y a
là qu'une sorte de transposition ; ce sont, si l'on peut ainsi parler, des
cavernes exhaussées, des grottes artifi-
cielles, qui ont été réservées ici dans la
masse de l'appareil, comme celles qui
leur ont servi de modèle étaient taillées
dans la masse du rocher (fig. 87) \
Grâce à l'épaisseur de ses parois,
la caverne, une fois son entrée close
par une grosse pierre, garde bien son
dépôt ; mais l'homme, quaud il pourvoit
à sa propre sépulture ou à celle des
êtres qui lui sont chers, ne se contente
pas d'avoir assuré le repos du mort qui
va prendre possessionde cette demeure;
il désire encore placer sur la tombe,
comme diront les Grecs, un signe1,
c'est-à-dire un objet quelconque qui
frappe les yeux et qui rappelle ainsi la mémoire de celui qui n'est
plus. Ce signe, lorsque l'écriture aura été inventée, ce sera l'inscription
funéraire; en attendant, ce peut être un tertre, un tronc d'arbre, une
pierre levée, aussi lourde et aussi haute que possible. Dans la Genèse.
qui nous a conservé quelques-uns des plus vieux souvenirs de la race
sémitique, nous lisons ces mots : « Ainsi mourut Rachel, et elle fui
ensevelie au chemin d'Ephrat, qui est Bethléem. Et Jacob érigea un
monument sur sa tombe ; c'est le monument de la tombe de Rachel
jusqu'à ce jour. » Jacob, voulant honorer l'épouse préférée, avait dû
se borner à dresser au-dessus de la fosse qui avait reçu son corps un
1. Renan, Mission, pp. 81 et 8(>.
2. Sy^oc. On connaît l'expression homérique, c^-a xe"£tv> mot à m°t- <( répandre un
signe », c'est-à-dire amonceler de la terre, de telle sorte que ce tertre indique à tous les
yeux l'emplacement de la sépulture. ..
TOME III.
87. — Le Burdj-el-Bezzâk. Coupe.
Renan, Mission, pl. 14.
les élargit et les aménagea; l'habitude était si bien prise que, lors
même qu'on sut tailler et assembler la pierre, on resta fidèle à l'ancien
usage. Presque toutes les tombes phéniciennes sont donc des caveaux
souterrains. C'est tout à fait par exception que Ton rencontre quelques
tombeaux qui dérogent à cette règle. Tel est, par exemple, un des plus
curieux monuments d'Amrith, le Burdj-el-Bezzâk (fig. 6). Les chambres
qu'il renferme et dont le caractère funéraire n'est pas contestable se
trouvent bien dans un édifice construit au-dessus du sol ; mais il n'y a
là qu'une sorte de transposition ; ce sont, si l'on peut ainsi parler, des
cavernes exhaussées, des grottes artifi-
cielles, qui ont été réservées ici dans la
masse de l'appareil, comme celles qui
leur ont servi de modèle étaient taillées
dans la masse du rocher (fig. 87) \
Grâce à l'épaisseur de ses parois,
la caverne, une fois son entrée close
par une grosse pierre, garde bien son
dépôt ; mais l'homme, quaud il pourvoit
à sa propre sépulture ou à celle des
êtres qui lui sont chers, ne se contente
pas d'avoir assuré le repos du mort qui
va prendre possessionde cette demeure;
il désire encore placer sur la tombe,
comme diront les Grecs, un signe1,
c'est-à-dire un objet quelconque qui
frappe les yeux et qui rappelle ainsi la mémoire de celui qui n'est
plus. Ce signe, lorsque l'écriture aura été inventée, ce sera l'inscription
funéraire; en attendant, ce peut être un tertre, un tronc d'arbre, une
pierre levée, aussi lourde et aussi haute que possible. Dans la Genèse.
qui nous a conservé quelques-uns des plus vieux souvenirs de la race
sémitique, nous lisons ces mots : « Ainsi mourut Rachel, et elle fui
ensevelie au chemin d'Ephrat, qui est Bethléem. Et Jacob érigea un
monument sur sa tombe ; c'est le monument de la tombe de Rachel
jusqu'à ce jour. » Jacob, voulant honorer l'épouse préférée, avait dû
se borner à dresser au-dessus de la fosse qui avait reçu son corps un
1. Renan, Mission, pp. 81 et 8(>.
2. Sy^oc. On connaît l'expression homérique, c^-a xe"£tv> mot à m°t- <( répandre un
signe », c'est-à-dire amonceler de la terre, de telle sorte que ce tertre indique à tous les
yeux l'emplacement de la sépulture. ..
TOME III.
87. — Le Burdj-el-Bezzâk. Coupe.
Renan, Mission, pl. 14.